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Les crèches d'entreprise en plein essor

SANS | Point fort | publié le : 14.09.2004 |

Les mesures décidées par la Conférence de la famille 2003 afin d'inciter les entreprises à investir dans la garde des jeunes enfants commencent à porter leurs fruits. Les projets de crèches interentreprises ont, particulièrement, le vent en poupe.

Un coût divisé par six, en moyenne ! Pour Frédéric Paul, gérant des Petits chaperons rouges, entreprise spécialisée dans la conception et la gestion de crèches pour les entreprises, les mesures, adoptées en 2003 par la Conférence de la famille (lire encadré p. 21), ont permis de faire baisser les coûts de fonctionnement de cet équipement d'environ 10 000 euros par an et par enfant, à une moyenne de 1 750 euros. Se comptant sur les doigts des deux mains hier (quelques structures créées par de grands groupes au lendemain de la guerre, la crèche du quotidien Libération, celle du Crédit lyonnais...), les crèches d'entreprise pourraient bientôt concerner plusieurs centaines d'enfants, et, à terme, plusieurs milliers. Le plan crèche, récemment lancé par les pouvoirs publics, prévoit une enveloppe de 200 millions d'euros, pour créer 20 000 places de garde collective, en priorité au sein de structures reposant sur des financements mixtes (communes/CAF/entreprises) ou interentreprises, et, pour 20 %, au sein de structures entièrement privées.

Coup de pouce

« En 2005, nous ouvrirons cinq crèches d'entreprise ou interentreprises. Ensuite, nous tablons sur un rythme moyen de huit ouvertures par an », souligne, par exemple, Frédéric Paul, dont la première réalisation - la transformation de la crèche d'Aventis Romainville (93) en crèche interentreprises - est opérationnelle depuis début septembre. Car ce coup de pouce à l'investissement et au fonctionnement rend abordables des projets que certains DRH envisageaient déjà, pleinement conscients des difficultés de leurs salariés (et plus encore de leurs salariées), qui doivent jongler avec les problèmes de garde. Une enquête, menée par l'Institut des mamans, en juillet dernier, auprès de salariées franciliennes, montre, ainsi, qu'à Paris, près de 8 % d'entre elles ont été obligées d'arrêter de travailler après la naissance de leur enfant, 18 % passant à temps partiel et 36,3 % modifiant leurs horaires.

Mais le problème se pose tout aussi crucialement en zone rurale. A Vitré (35), la SVA-Jean Rozé (abattoirs) menait, depuis trois ans, en interne, un projet de création de crèche pour ses 2 500 salariés, confrontés à une offre de garde collective très limitée, et handicapés par des horaires décalés. « Faute de compétences pour mener à bien un tel chantier, et en raison du coût, la direction avait fini par abandonner », relate Soline Gravouil, fondatrice de la société de conseil Iziy-Les enfants d'abord. Aujourd'hui, grâce à l'aide de ce prestataire, les travaux de construction des 900 m2 de bâtiments neufs (pour 45 à 60 berceaux) sont en cours et les recrutements réalisés. L'entreprise sera également la première signataire, au niveau national, d'un contrat enfance entreprise avec la CAF.

Elle ne devrait cependant pas rester longtemps isolée. Aujourd'hui, la situation est telle que les quelques prestataires spécialisés n'ont quasiment pas besoin de démarcher : « Nous recevons, en moyenne, trois appels d'entreprises intéressées par jour, témoigne Maïlys Cantzler, directrice de Crèche attitude, qui prévoit dix ouvertures en 2005. Celles-ci emploient aussi bien 3 que 5 000 salariés - commerces, sociétés de conseil, entreprises d'économie mixte ou encore ministères -, et sont implantées tant en milieu urbain que rural... Et, de plus en plus, nous sommes contactés par des salariées qui projettent de monter tout un dossier avant de présenter le projet à leur direction. » Les CE peuvent également être à l'origine du projet, et s'y trouvent, de toute façon, associés, dans la mesure où une crèche relève des activités sociales.

Qualité du travail

Pour Pierre Chlabovitch, DRH d'Apicil (protection sociale, 1 150 salariés), qui envisage d'organiser, avec le cabinet lyonnais Crèches et Cie, une enquête auprès de ses salariés sur la création d'une structure de garde, un tel projet participe de l'amélioration de la qualité du travail : « Nous employons 75 % de femmes, et bénéficions d'une pyramide des âges équilibrée. Cela se traduit, naturellement, par des congés maternité, souvent prolongés par des congés parentaux. Nous sommes alors obligés de remplacer ces salariées par des intérimaires ou des employées en CDD, que nous devons former et encadrer. »

Outre la réduction de ces congés parentaux «subis» (faute de solution de garde appropriée), une crèche permet aussi de revoir à la baisse l'absentéisme lié aux problèmes ponctuels de garde (nounou malade, grève, etc.), en réservant, par exemple, une ou deux places à l'accueil ponctuel d'enfants de salariés.

Un élément d'attractivité

Une crèche d'entreprise représente, dès lors, un élément non négligeable d'attractivité pour une entreprise ou un site. La foncière Silic accueillera, ainsi, début 2005, dans son parc d'affaires de Rungis, une crèche gérée et commercialisée par les Petits chaperons rouges : « Désormais, nous ne pouvons plus nous contenter d'offrir à nos clients de simples plateaux de bureaux, souligne Sylvain Vene, directeur régional Ile-de-France. Les services aux salariés deviennent un critère prioritaire de choix d'implantation des entreprises, et une enquête menée à Rungis auprès des salariés fait arriver la crèche et la salle de fitness en tête des services préférés. »

A Romainville (93), où le groupe Aventis ferme, actuellement, son site dédié à la recherche (transféré à Vitry), la pérennisation de la crèche, créée en 1947, fait partie intégrante du plan de réindustrialisation. « La crèche, d'une trentaine de places, principalement réservée aux enfants des salariés du centre de recherche, était menacée de fermeture avec le déménagement, expose Philippe Subiron, directeur de l'établissement (qui compte encore 300 salariés). Fin 2003, nous avons décidé, avec le CE et l'aide des Petits chaperons rouges, de transformer la structure en crèche associative interentreprises. » Ce projet, opérationnel depuis le début du mois de septembre, a permis aussi bien de poursuivre l'accueil des enfants des salariés du site de production {qui est maintenu, NDLR} que de conserver les sept emplois au sein de la crèche (deux départs ayant été compensés par des recrutements), et d'offrir des places aux entreprises nouvellement installées sur le site - devenu le parc technologique Biocitech - et des communes environnantes, ou encore à la préfecture du 93 (qui a réservé dix berceaux).

Mutualisation

Les exemples de Silic et d'Aventis sont assez emblématiques de la tendance actuelle. Selon Maïlys Cantzler, 80 % des projets passent par une mutualisation de la structure. Sur la zone d'activité Perica, en banlieue lyonnaise, une crèche devrait, ainsi, voir le jour grâce à un partenariat entre les cinq plus grosses entreprises du site, qui réserveront, chacune, une partie des places et pourront même les «sous-louer» à des TPE-PME au travers d'une bourse d'échange.