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Les entreprises entre court et long termes

SANS | publié le : 31.08.2004 |

Les grandes entreprises mettent en place des outils qui permettent d'anticiper les évolutions de leurs métiers. Chez Air France, l'observatoire des métiers reste orienté "GPEC", tandis que chez Renault, les études prospectives jouent un rôle de veille et, éventuellement, d'alerte.

L'observatoire des métiers d'Air France a été créé suite à des accords sociaux en 1997 et 1999, puis relancé, en 2002, à l'occasion de "l'Accord pour progresser ensemble". Piloté par la DRH centrale, il suit 60 métiers non cadres qui font, chacun, l'objet d'une fiche avec des données quantitatives et qualitatives, à partir de celles fournies par les gestionnaires de filière.

Pour chaque fiche, on trouve une description du métier, l'effectif total, la répartition par âges et par sexes, les modalités d'entrée (diplôme requis), les compétences développées, le taux de turn-over sur trois ans, les perspectives d'évolution de carrière, etc.

Gestion prévisionnelle

S'il n'est pas un outil de prospective à proprement parler, il favorise la démarche de gestion prévisionnelle par métiers en fournissant aux gestionnaires de filière des éléments de comparaison avec les autres filières, et au réseau RH des informations dans le cadre de la politique de l'emploi et de la gestion individuelle. Mais, pour l'instant, il n'est pas connecté au plan de formation de l'entreprise.

Accessible sur l'intranet depuis le 21 juin dernier, il constitue aussi un outil d'aide à la mobilité pour les salariés. Il permet, enfin, de donner du grain à moudre lors des rencontres avec les organisations syndicales.

« Les DRH d'entité se sont approprié l'outil et ont voulu le présenter eux-mêmes dans les comités de suivi locaux pour être au plus près du terrain », indique Morgane Guiziou, de la DRH d'Air France, qui note « le fort intérêt témoigné par les organisations du personnel à la structure et au contenu de l'observatoire ».

Prudence

Difficile, selon Paulette Nevoux, chef de projet à l'Observatoire européen des métiers de l'aérien, qui travaille avec l'Observatoire d'Air France, de faire plus prospectif dans le contexte actuel : « Anticiper alors que le secteur est en crise, que les contraintes européennes changent régulièrement la donne, que les technologies nouvelles vont modifier les compétences requises dans certains métiers, réclame de la prudence. »

Chez Renault, la prospective s'est d'abord exercée de façon informelle avant de devenir une fonction bien identifiée au sein de la direction centrale des ressources humaines. Avant de devenir responsable des études, de la prospective et de la planification, il y a six ans, François Michaux était, en effet, responsable de l'emploi chez Renault. A ce titre, il s'est occupé du reclassement des salariés suite à la fermeture du site de Billancourt, un poste qui nécessite d'envisager les futurs possibles : « Le service joue un rôle de veille sur l'emploi et les métiers, repère les courants faibles à travers la lecture de rapports et de la presse. Quand ces éléments d'information sont suffisamment nombreux, nous travaillons sur la façon dont le problème se présente chez Renault et, si l'entreprise est concernée, nous faisons une "alerte" au niveau de la DRH. Si elle est considérée comme assez sérieuse, nous présentons le sujet à des groupes de managers concernés. » Exemple d'alerte : le choc démographique et ses effets sur les secteurs de la fabrication et de la réparation automobiles.

Elément moteur

A contre-courant de ceux qui pronostiquent le déclin inéluctable des emplois industriels et la montée des services, François Michaux observe que, dans bien des cas, « c'est l'industrie qui, dans un bassin d'emploi, soutient certains services et non des moindres. Outre les services d'accompagnement, comme le gardiennage, l'entretien, la restauration, l'industrie génère des activités importantes de maintenance industrielle, de sous-traitance en conception et gestion de production. Elle génère aussi une sous-traitance très importante qui peut représenter jusqu'au double des effectifs employés par l'activité industrielle "de tête". Le jour où le site industriel aura disparu, tout cela disparaîtra avec. Il faut donc se poser la question de savoir comment faciliter l'emploi des jeunes dans l'industrie - par l'amélioration des transports, la construction de logements, car les ouvriers sont peu mobiles - et les orienter davantage vers les métiers industriels ».

Et il y a urgence, car la pénurie de main-d'oeuvre s'annonce, « d'une ampleur qu'on ne mesure pas » avec, heureusement, une bonne nouvelle : « La France sera, dans quinze ans, le pays européen qui comptera le plus de jeunes. »

Contraintes

Tout en livrant cette vision à l'entreprise, François Michaux reconnaît qu'elle peut difficilement l'intégrer dans sa stratégie, car « elle est contrainte et se bat avec les réalités de l'instant ». C'est donc auprès des pouvoirs publics, les responsables du Commissariat au Plan, par exemple, qu'il défend inlassablement son point de vue. « Le rôle d'une veille, c'est aussi d'être le porte-parole de la réalité de l'entreprise dans les milieux qui n'ont pas l'habitude de l'écouter. »