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Jean-Louis Borloo s'attaque aux exclusions

SANS | publié le : 12.07.2004 |

Dix ans après l'invention par Jacques Chirac de l'expression "fracture sociale", Jean-Louis Borloo lance sa bataille contre les exclusions. Parmi les mesures phares : la création de contrats d'activité dans le secteur non marchand, la relance de l'apprentissage et un effort important en faveur du logement social.

Prudent, il n'a pas fixé d'objectif chiffré, ni d'échéance. Mais Jean-Louis Borloo, le nouveau ministre du Travail, s'est engagé à réduire les inégalités. Une manière, pour lui, de confirmer que l'emploi sera bien le thème de réforme de l'année 2004.

La publication des chiffres du chômage pour le mois dernier est venue à point nommé. Le ministre du Travail a, en effet, fait état d'une hausse de 0,8 % du nombre de demandeurs d'emploi en mai. Il y a donc, en France, aujourd'hui, 2,451 millions de personnes qui pointent à l'ANPE. Sans compter les exclus, allocataires des minima sociaux, en tout, 4 millions de personnes "out", selon Jean-Louis Borloo. De fait, comparé à l'Union européenne, le tableau est sombre. « Nous sommes le pays d'Europe qui a le plus de métiers sous tension, de métiers pénuriques, et le pays qui est le moins préparé aux grandes mutations démographiques de demain, a-t-il indiqué. Nous avons 26 % de taux d'activité des jeunes en France pour 56 % en Europe. »

Trois axes d'intervention

Pour endiguer ce phénomène, le plan Borloo s'appuie sur trois piliers : emploi, logement, égalité des chances. Il mobilisera 16,2 milliards d'euros sur cinq ans, dont 12,7 de nouveaux crédits. C'est le volet emploi qui en absorbera la plus grande part, et, en particulier, le contrat d'activité, dont l'objectif est d'aider les RMistes et les chômeurs en fin de droit à retrouver un emploi. Ce contrat, d'une durée de 26 heures, devra bénéficier à 1 million de personnes d'ici à 2009. Il sera conclu par des associations ou des collectivités locales, rémunéré au Smic horaire et ouvrira droit à une qualification ou à une attestation de compétences.

Fonction publique par l'alternance

L'ancien maire de Valenciennes souhaite également que les entreprises de plus de 100 salariés comptent au moins 2 % d'apprentis dans leur effectif. Il donne aussi la possibilité à 100 000 jeunes d'entrer dans la fonction publique (territoriale, hospitalière et d'Etat) par celle de l'alternance et non par celle du traditionnel concours.

Il se propose, également, de booster les emplois auprès des particuliers et de favoriser la création d'entreprise par les chômeurs. Dans le volet sur l'égalité des chances, il souhaite renforcer les outils juridiques de la lutte contre le racisme et promouvoir la diversité dans l'entreprise grâce à une charte ad hoc.

Scepticisme sur le financement

Sur le fond, les syndicats sont satisfaits du plan Borloo. Hormis la CGT, les partenaires sociaux ont loué la méthode et les ambitions du projet, tout en exprimant un certain scepticisme sur son financement. Le ministre reste silencieux, toutefois, sur plusieurs thèmes abordés dans les rapports de Virville et Marimbert, présentés en janvier dernier, à François Fillon, l'ex-ministre du Travail, et qui devaient servir de base à la construction de la future loi. Le plan Borloo fait l'impasse sur la fin du monopole de l'ANPE, ou encore sur la création du contrat de projet, d'une durée de cinq ans, qui avait déclenché la polémique l'hiver dernier. Il n'évoque pas du tout le rapprochement probable entre l'Unedic et l'ANPE ni le renforcement des contrôles des demandeurs d'emploi.

Renvoi à la négociation

Le plan Borloo mise sur la lutte contre l'exclusion. Mais le ministre arrivera-t-il à servir de caution sociale au gouvernement Raffarin, mal en point après les désastreuses régionales de mars dernier ? De fait, le projet renvoie tous les sujets qui fâchent à la négociation. C'est pourquoi il laisse aux partenaires sociaux le soin d'opérer eux-mêmes des arbitrages avant de modifier le droit du travail en définissant six thèmes prioritaires de discussion, dont les sujets très polémiques de la durée et du droit du travail (voir encadré ci-dessus).

Six thèmes prioritaires

« Dans six mois, le gouvernement prendra le relais sur ces six sujets et nous légiférerons, sans doute, dans un texte global, en tenant compte des accords partiels, s'il n'y a pas eu d'accord total, et des points de convergence, et nous arbitrerons le reste », a indiqué Gérard Larcher, ministre délégué aux Relations du travail. En espérant, toutefois, reproduire, à l'instar de l'accord sur la formation professionnelle, l'union sacrée entre les partenaires sociaux.

Les principales mesures pour l'emploi

Création d'un contrat d'activité pour les bénéficiaires de minima sociaux dans les secteurs non marchands, avec pour objectif d'offrir un million de contrats en quatre ans. Budget : 5,55 milliards d'euros.

Accompagnement de 800 000 jeunes en difficulté vers l'emploi par trois voies : 350 000 par l'alternance, 350 000 par des contrats aidés dans les secteurs marchands, 100 000 par l'ouverture du recrutement en alternance dans la fonction publique. Budget : 2,19 milliards d'euros.

Objectif de parvenir à 500 000 apprentis en 2009 (+ 40 %). Création d'incitations fiscales pour les employeurs, amélioration de la rémunération et du statut de l'apprenti. Budget : 2 milliards d'euros.

Création ou labellisation de 300 "maisons pour l'emploi" pour fédérer les acteurs de l'emploi au niveau local et accompagner les chômeurs en difficulté. Budget : 1,73 milliard d'euros.

Création d'un dossier unique du demandeur d'emploi.

Amélioration du contrôle des chômeurs et mise en place de sanctions graduées, sous contrôle de l'Etat.

Définition de six thèmes prioritaires de négociation professionnelle : gestion sociale des restructurations, emploi des seniors, santé et sécurité au travail, sécurisation des règles régissant les relations individuelles ou collectives au travail, évolution de la législation sur la durée du travail, modernisation du financement du paritarisme.