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21 mois pour créer un nouveau statut social

SANS | publié le : 12.07.2004 |

Le DRH de Champion supermarchés France (CSF) et les syndicats ont mis près de deux ans pour doter la société créée de nouvelles instances de représentation du personnel et d'un statut harmonisé.

« C'est à un véritable Everest social que nous nous sommes attelés », commente Thierry Raulin, DRH de Champion France. Créée le 1er mai 2002, la société CSF (Champion supermarchés France) se voyait dotée, le 30 janvier 2004, d'un statut commun pour ses 30 000 salariés. Au terme de vingt et un mois et quarante-trois réunions de négociation.

A l'été 1999, lors de la fusion entre Carrefour, Promodès et les Comptoirs modernes, les formats supermarchés de ces groupes sont rassemblés sous l'enseigne Champion. Mais, juridiquement, ils relèvent de dix sociétés différentes, dont aucune ne compte plus de 25 % des salariés. « Il existait un véritable morcellement des politiques et des pratiques RH, et des cultures d'entreprise très différentes, souligne Thierry Raulin. Dans un même département, nous pouvions, ainsi, avoir trois supermarchés Champion relevant, chacun, d'une convention d'entreprise spécifique. »

Société unique

Les organisations syndicales font le même constat et réclament la constitution d'une UES. Les négociations s'ouvrent mais n'aboutissent pas. Alors, la direction décide de créer une société unique, et d'y transférer tous les salariés, sous le régime du L 122-12. Une solution dont les avantages sont multiples : simplification de la gestion et renforcement de l'esprit d'appartenance, mais aussi prévention de contentieux locaux sur le registre des inégalités de traitement, et imposition aux syndicats d'une négociation avec obligation de résultat.

En effet, à l'issue d'une période transitoire, tous les accords collectifs cessaient de produire leurs effets. « A partir de la date de création de la nouvelle société, nous avions quinze mois pour trouver un accord de substitution dans tous les domaines sociaux - représentation du personnel, droit syndical, statut social, ARTT », explique Thierry Raulin. A défaut, la convention collective s'appliquait. « Nous avons jugé cette décision positive, dans la mesure où notre objectif premier était que les salariés dépendant de la même enseigne bénéficient des mêmes avantages, commente Sophie Jacobik, déléguée syndicale centrale CFDT. Il était évidemment hors de question d'aller vers des accords à la baisse, nous réclamions même le statut, plus avantageux, des hypers Carrefour. »

Marathon social

La première étape de ce marathon social consiste en la signature unanime, le 30 avril 2002, d'un accord transitoire maintenant les comités d'entreprise et d'établissement, ainsi que tous les mandats de représentation (CHSCT, DP, délégués syndicaux). En revanche, il supprime les CCE, réunissant leurs titulaires au sein d'un "super CCE" transitoire, comptant 92 membres.

« Dans une période de post-fusion, il est important d'expliquer et d'accompagner des changements inéluctables qui, par nature, concernent de manière individuelle chacun des salariés, souligne Thierry Raulin. Le fait que tous ces représentants du personnel puissent entendre le même discours a évité les incompréhensions et facilité le travail des DRH locaux, qui avaient des interlocuteurs bien informés. »

Cet accord transitoire comportait également un calendrier des négociations, et dotait chaque organisation syndicale de moyens supplémentaires, dont un budget mensuel de 1 550 euros.

Intéressement commun

Très rapidement, ensuite, est négocié un intéressement commun, puis un accord sur la représentation du personnel. Cette négociation se révèle plus difficile, dans la mesure où la direction souhaite supprimer les CE qui existaient dans les magasins de moins de 50 personnes, et instaurer des CE regroupés par zones commerciales. « Cela revenait à supprimer des mandats d'élus et de délégués syndicaux, s'indigne Leila Chalal, déléguée syndicale centrale CGT. Ce qui signifie, par exemple, qu'un élu doit pouvoir interve- nir dans 60 magasins différents. »

L'accord est toutefois validé par la DDTEFP, puis par le ministère. Par ailleurs, il est suivi d'un accord sur le droit syndical (unique en son genre dans le groupe Carrefour), créant la fonction de délégué syndical national, et pérennisant les moyens matériels supplémentaires prévus par l'accord transitoire.

Trois accords

Enfin, le 30 janvier dernier, trois accords créant un statut Champion commun, harmonisant les modalités d'AORTT (aménagement, organisation et réduction du temps de travail) et généralisant le compte épargne temps, sont signés. Là encore, la négociation ne se déroule pas sans heurts, puisque les mois de décembre et de janvier sont émaillés d'arrêts de travail. Mais elle débouche sur « un programme social juste et équilibré », estime le DRH. Sont notamment mis en place de nouveaux congés familiaux (entre autres en cas de signature d'un Pacs), ainsi qu'une prime de vacances, se substituant, progressivement, à diverses primes versées dans les sociétés initiales. « Même si certains périmètres n'ont pas vu de progrès, aucun salarié n'a eu, au final, à déplorer une perte financière, estime Sophie Jacobik. Nous avons obtenu l'essentiel, c'est-à-dire la mutualisation et la solidarité avec les salariés des plus petites entités. »

CSF

Activité : supermarchés.

Effectifs : 32 000 salariés (60 000 personnes avec les franchisés).

Implantations : 1 012 magasins, dont 55 % d'intégrés et 45 % de franchisés.

Chiffre d'affaires : 12 milliards d'euros en 2003.

Etapes de la construction sociale

1er mai 2002 : création de CSF.

30 avril 2002 : accord transitoire (unanimité).

27 juin 2002 : intéressement (CFDT, CFTC, FO).

4 octobre 2002 : accord sur la représentation du personnel (CFDT, CFTC, FO).

9 janvier 2003 : protocole d'accord préélectoral (CFDT, CFTC, CGC, FO).

2 avril 2003 : NAO (CFDT, FO).

4 avril 2003 : élections professionnelles.

26 juin 2003 : prorogation des dispositions sociales (unanimité).

10 juillet 2003 : accord sur le droit syndical et le fonctionnement des IRP (CFDT, CFTC, FO).

30 janvier 2003 : accords sur le statut social (CFDT, FO), l'harmonisation des modalités AORTT (CFDT, FO), et le compte épargne temps (CFDT, CFTC, CGC, FO).