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LES ENTREPRISES SERRENT LA VIS

SANS | publié le : 29.06.2004 |

Alors que le projet de loi sur l'assurance maladie arrive en discussion à l'Assemblée, les régimes complémentaires, couvrant une majorité de salariés en entreprise, peinent à conserver leur équilibre dans un contexte de dérive des dépenses. L'heure est à la moralisation de la consommation, à l'augmentation des cotisations, voire à la limitation des garanties.

Le choix est difficile : faut-il exclure son conjoint, voire ses enfants, du bénéfice de la mutuelle d'entreprise, accepter une nouvelle augmentation de la cotisation ou une baisse des remboursements ? Pas simple... Dans cette grosse PME francilienne, d'environ 500 personnes, les contributions, pourtant substantielles, de l'employeur et des salariés au régime obligatoire de complémentaire santé ne permettent plus de couvrir des coûts en perpétuelle augmentation.

Payer encore plus cher ou couvrir moins bien : la réflexion, entamée entre les partenaires sociaux et l'assureur de cette PME, ressemble à celle qui a commencé, depuis quelques années, dans la plupart des entreprises grandes et moyennes. Et 7 salariés sur 10, en France, pourraient être rapidement concernés, car couverts par une complémentaire santé au sein de leur entreprise. « La tendance lourde des deux dernières années sur ce marché est indéniablement la dérive des dépenses de santé, qui va conduire les entreprises à faire évoluer leur régime », constate ainsi Yanick Philippon, directeur technique du groupe AG2R.

Pas d'amélioration immédiate

La réforme de l'assurance maladie, dont le projet était présenté le 16 juin au Conseil des ministres, et qui doit être discutée, dès ce 29 juin, à l'Assemblée, aura-t-elle un impact sur ces régimes de prévoyance/santé en entreprise, dont le financement est difficile à ajuster ? Les professionnels sont partagés, mais, dans l'ensemble, n'attendent pas d'amélioration avant plusieurs années. Si l'objectif du projet de loi est la maîtrise des dépenses, le texte risque de se traduire d'abord par de nouveaux transferts de charge du régime de base vers les complémentaires. Le dispositif le plus spectaculaire, le reste à charge d'un euro pour une consultation médicale de généraliste, qui pourrait augmenter par la suite, n'est pas en cause : les régimes complémentaires obligatoires d'entreprise devront se garder de rembourser cette franchise, sous peine de se voir écartés des dispositifs de déductibilité sociale et fiscale qui leur sont appliqués.

Répercussions du forfait hospitalier

L'augmentation du forfait hospitalier sur trois ans aura, en revanche, des conséquences sur les finances des complémentaires. Le contrôle plus serré des affections de longue durée (ALD) par le régime de base pourrait aussi se traduire par des transferts de charges.

En attendant, l'heure est au "serrage des boulons" : recul de la participation de l'employeur, sortie de certaines garanties en options payantes, réévaluation de la situation des retraités du régime, ou de la famille (lire aussi p. 16). « Alors que les cotisations augmentent bien plus vite que les salaires, souvent sans combler l'écart entre cotisations et dépenses, on essaie, également, de moraliser la consommation, explique Bruno Menicucci, membre du directoire du courtier en assurances Siaci. On conçoit des régimes qui correspondent le mieux aux besoins et aux moyens des entreprises, avec des restes à charge et des limitations : du nombre de paires de lunettes, des consultations de praticiens non conventionnés... »

En phase avec les politiques de santé

La puissance publique poussera en ce sens, puisque la déductibilité des régimes dépendra, outre le respect de la fameuse franchise d'un euro, d'un cahier des charges à préciser. Celui-ci est censé faire en sorte que les complémentaires accompagnent les politiques publiques de santé. En prévoyance lourde, les prévisions sont encore moins optimistes. « Une nouvelle fois, en 2003, nous constatons une forte augmentation du nombre et de la durée des arrêts de travail. L'entrée en incapacité est plus fréquente. Or, les excédents enregistrés sur les décès ne permettent plus de compenser les dépenses qui, sur l'arrêt de travail, ont augmenté de 10 % à 11 % », indique Yanick Philippon.

Hausse des arrêts maladie

Selon un rapport de l'Igas, d'octobre 2003, les indemnités journalières s'envolent depuis plusieurs années : + 46 % de 1997 à 2002. Les arrêts maladie ont augmenté d'autant plus vite que la manne des préretraites se tarissait. Le rapport montre que les dépenses d'indemnités journalières se concentrent sur les plus de 50 ans. « Mais le vieillissement de la population active n'explique pas la totalité du phénomène, estime Luc Coeurdevache, directeur commercial des assurances collectives de Generali. Il se traduit par une hausse des cotisations afin de préserver les garanties. Mais jusqu'à quand ? Il va bien falloir arbitrer sur le contenu même des garanties. »

Renégociations

Les assureurs recommandent de diminuer le montant des prestations en cas d'incapacité. En d'autres termes, de ne plus garantir le maintien du salaire à 100 %. Selon Jocelyne Conan, de Prémalliance, « plusieurs branches sont en train de renégocier dans ce sens leur convention collective. Elles envisagent, aussi, d'augmenter le délai de franchise au-delà duquel l'assuré commencera à percevoir ses indemnités complémentaires ». Les prestations versées en cas d'invalidité pourraient également être révisées à la baisse.

L'assistance psychologique reste très exceptionnelle. Generali, qui l'a testée, la juge peu concluante. MV4, qui la propose également dans ses contrats, est plus séduite. Elle a l'avantage de s'inscrire dans une logique de prévention et de pilotage du risque. Fallait-il imaginer une meilleure prévention en entreprise et mentionner les conditions de travail ? Le projet de loi ne le fait pas, pas plus qu'il ne sollicite financièrement les entreprises, au grand dam des syndicats. « C'est pour préserver l'emploi », a tranché le ministre des Affaires sociales.

L'essentiel

1 Le coût des régimes de santé/ prévoyance ne cesse d'aug- menter, à cause des désengagements de la Sécurité sociale, du vieillissement de la population active, de l'augmentation du coût des soins et de la consommation de santé.

2 Les employeurs qui financent les régimes d'entreprise à hauteur de 60 %, en moyenne, demandent de renégocier le niveau des garanties, de créer des options payantes ou de revoir l'éligibilité de certaines populations (retraités, conjoints) au régime abondé.

3 La réforme, et son objectif affiché de maîtrise des coûts, pourrait se traduire d'abord par de nouveaux transferts sur les complémentaires. Les professionnels espèrent qu'ils auront les moyens de mettre en oeuvre des "contrats responsables", dont le cahier des charges reste à préciser.