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Un dispositif pour renouer des relations constructives

SANS | publié le : 11.05.2004 |

Créé il y a huit ans, le dispositif expérimental d'Appui au dialogue social est aujourd'hui en place dans trois régions. Son but : accompagner les entreprises pour qu'elles renouent des relations sociales constructives. Près d'une cinquantaine y ont déjà eu recours.

Le dispositif Appui au dialogue social n'en finit pas d'être expérimenté. Né courant 1996, à l'initiative du ministère du Travail et de l'Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (Anact), en Rhône-Alpes-Auvergne, il est, aujourd'hui, en place dans deux autres régions, la Lorraine et la Haute-Normandie, après que les partenaires sociaux siégeant aux conseils d'administration des Aract concernées ont donné leur "feu vert".

« Cet outil est directement inspiré de l'expérience québécoise et de sa pratique de médiation préventive, qui prévoit l'intervention d'un tiers dans les entreprises confrontées à une dégradation de leurs relations sociales. Certes, le cadre régissant le dialogue social n'est pas le même en France. Pour autant, la question des relations sociales est universelle », explique Daniel Xirau, chargé de mission à l'Anact.

Un début de légitimité en France

S'il a fait ses preuves ou- tre-Atlantique, ce dispositif commence à trouver sa légitimité dans l'Hexagone. Ainsi, les régions Rhône-Alpes et Auvergne ont traité 43 dossiers, dont 6 en dehors de ses frontières. En Lorraine, depuis 2001, une trentaine de contacts ont été pris avec des entreprises et ils se sont soldés par 8 interventions complètes. Enfin, en Haute-Normandie, 13 entreprises de toute taille ont interpellé les chargés de mission, depuis 2002, et 4 interventions sont actuellement en cours.

« Rares sont les entreprises qui prennent seules l'initiative de nous contacter, convient Gilles Picard, chargé de mission à l'Aract Haute-Normandie. Certes, elles ont conscience d'un problème dans leurs relations sociales, mais elles n'en prennent vraiment conscience qu'après qu'un inspecteur du travail le leur a signifié. » En cela, l'inspection du travail est un véritable introducteur au dispositif. « Elle intervient, ainsi, souvent, lors d'une grève et prévoit notre intervention dans le protocole de fin de conflit », précise Michel Perron, chargé de mission à la DRTEFP Rhône-Alpes, ajoutant que ce service du travail est à l'origine des trois quarts des dossiers.

Le dialogue social dans l'impasse

Si les contextes, les symptômes et les causes sont différents, tous les cas approchés se soldent par le même diagnostic : le dialogue social dans l'entreprise est dans l'impasse. Et certains signes ne trompent pas, dont « la récurrence de litiges qui ne se règlent jamais en interne, mais plutôt devant les tribunaux ou l'inspection du travail, un turn-over et un absentéisme élevés, le recours grandissant à des sanctions disciplinaires, une productivité en baisse... », énumère Michel Perron.

A qui la faute ? Alain Dollé, chargé de mission à l'Aract Lorraine, identifie trois scénarios récurrents. Le premier fait référence à un ratage. « Un malentendu s'est produit dans le passé entre direction et syndicats qui a conduit, au fil du temps, les deux parties à se méfier l'une de l'autre. » Autre source possible : les partenaires sociaux considèrent les négociations comme leur pré carré. La direction ne prend plus la peine de consulter sa ligne hiérarchique, et les syndicats s'éloignent des salariés. « Inévitablement, cette distance brouille les cartes, souligne-t-il. Enfin, il y a des situations où les parties ont perdu le sens même du dialogue et du jeu de la négociation en restant campées sur leurs positions. » Au final, une compétition pour le pouvoir s'engage, car « chacune est convaincue que l'autre veut la détruire », ajoute Michel Perron.

La volonté partagée de s'engager

Alors, tout doit être remis à plat. La première étape du dispositif d'Appui au dialogue social consiste à prendre contact avec les deux parties afin de s'assurer de leur volonté de s'engager dans le processus. « Bien souvent, l'une des parties est surprise de voir l'autre décidée à améliorer le dialogue social », souligne Alain Dollé. Pour autant, rien n'est jamais gagné d'avance. Pour preuve, près d'une intervention sur deux ne passe pas cette étape décisive.

Intervention de facilitateurs

Si, en revanche, les partenaires sociaux démontrent leur envie de collaborer, le travail peut commencer avec l'intervention dans l'entreprise d'un binôme de "facilitateurs" choisis parmi les trois composantes du dispositif, à savoir l'Aract, l'inspection du travail ou des consultants, spécialisés dans les relations sociales. Il opte, ensuite, pour l'une des deux voies possibles. Soit un travail concentré sur trois jours, avec direction et représentants du personnel pour mettre au jour et résorber l'écart existant entre la situation actuelle et celle qui devrait être ; soit un travail de plus longue haleine de médiation préventive, donnant à chaque catégorie de personnel l'occasion de faire un diagnostic de son quotidien. Plusieurs mois sont alors nécessaires.

« Mais quel que soit le cadre, nous n'intervenons jamais à chaud, autrement dit en plein conflit. Par ailleurs, nous ne donnons jamais de solutions. Notre rôle est plutôt d'accompagner, d'aider nos interlocuteurs à exprimer leurs attentes, puis, ensuite, à s'accorder sur les conditions favorables au bon déroulement de la démarche », précise Michel Perron. « En cela, le dispositif ne doit pas être confondu avec une opération de conciliation », ajoute Alain Ninauve, directeur adjoint de la DRTEFP de Haute-Normandie.

Une généralisation attendue

Et cela marche. Dans la quasi-totalité des entreprises qui y ont eu recours, les interventions réalisées ont conduit à un rétablissement effectif de la confiance et à l'instauration d'un dialogue. Reste à le généraliser. Dix régions se sont déjà portées candidates. Elles devront attendre, en particulier, les conclusions de l'évaluation du dispositif - promises pour 2004 -, réalisée actuellement par des universitaires.

L'essentiel

1 Le dispositif expérimental d'Appui au dialogue social, créé à l'initiative du ministère du Travail et de l'Anact, est, aujourd'hui, en place en Rhône-Alpes-Auvergne, en Lorraine et en Haute-Normandie.

2 Il consiste à accompagner les entreprises pour les aider à améliorer leurs relations sociales. Près d'une cinquantaine ont adhéré au dispositif.

3 En attendant les résultats prochains de l'évaluation de cet outil, dix régions se sont déjà portées candidates à cette expérimentation.

Les principes du dispositif

Sont éligibles au dispositif les entreprises pourvues d'organisation(s) syndicale(s).

Il est financé sur fonds publics.

Son préalable : l'engagement volontaire des deux parties, direction et syndicats, qui acceptent de travailler ensemble pour la recherche de solutions.

Il n'est pas un substitut à la négociation ni au fonctionnement des institutions représentatives du personnel.

Il s'intègre hors conflit ou en dehors des situations de crise ouverte.

Différentes catégories de personnel, opérateurs et encadrement, peuvent être sollicitées.

A lire : Le tiers facilitateur, un appui au dialogue social dans l'entreprise, coordonné par Bernard Maurin et Daniel Xirau, éditions Liaisons (2003).