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« On se dirige vers une généralisation du droit d'opposition »

SANS | publié le : 04.05.2004 |

E & C : Estimez-vous que la loi Fillon atteindra son objectif de mise en place de l'accord majoritaire ?

G. B. : Le gouvernement s'est attaqué à un formidable chantier... mais l'a raté. Pour ma part, j'estimais qu'il n'était pas raisonnable de passer d'emblée à un système majoritaire, et je plaidais pour l'adoption d'un dispositif, au moins temporaire, de minorité qualifiée d'adhésion. C'est-à-dire qu'un accord serait valide, à condition d'être signé par des organisations syndicales représentant au moins 30 % des salariés, d'après les dernières élections professionnelles.

Avec le texte actuel, nous nous dirigeons, au contraire, vers une généralisation du droit d'opposition. En effet, soit les branches n'aborderont pas le sujet de l'accord majoritaire, soit elles ne trouveront pas de majorité pour le mettre en place. Or, le système du droit d'opposition n'est pas vraiment pertinent avec l'objectif de départ, qui est de développer la négociation d'entreprise. Car, très souvent, les PME comptent une grande part d'élus du personnel non syndiqués. Cela signifie qu'un syndicat qui obtient moins de 50 % des voix aux élections professionnelles pourra y signer un accord, pour lequel le droit d'opposition ne pourra jamais être exercé.

E & C : L'assouplissement de la hiérarchie des normes pourra-t-il, alors, permettre d'atteindre cet objectif de départ ?

G. B. : Ce volet est, à mon sens, lui aussi, mal engagé. Au lieu de permettre, comme le prévoyait l'accord interprofessionnel de 1995, l'organisation par la branche de l'articulation entre les deux niveaux - branche et entreprise - de négociation, la loi pose que le silence de l'accord de niveau supérieur autorise la dérogation. Le résultat, c'est qu'il n'y aura jamais de silence, et, donc, que l'on risque de geler les positions des partenaires sociaux sur ce point.

Mon analyse est que les pratiques effectives de négociation collective ne changeront pas tant que ça, et, en tout cas, pas tout de suite. On va rester dans un système où ceux qui ne signent pas ne s'opposent pas pour autant. Par ailleurs, la question de la légitimité des acteurs a été éludée. Si les pistes permettant de mieux mesurer leur représentativité sont nombreuses (élections nationales ou de branche, ou encore traitement différents des résultats des élections professionnelles), ce sujet reste politiquement délicat.