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La dérogation généralisée

SANS | publié le : 04.05.2004 |

Désormais, un accord interprofessionnel ou de branche devra préciser s'il s'impose à l'accord de niveau inférieur, tandis que de nouveaux sujets sont ouverts à la négociation d'entreprise.

Le Conseil constitutionnel ayant validé les articles relatifs à la hiérarchie des normes, il sera désormais possible aux accords d'entreprise et aux accords de branche de déroger largement aux accords de niveau supérieur. « Attention, souligne, toutefois, Jean-Denis Combrexelle, directeur des relations du travail : la loi Fillon ne permet en aucun cas de déroger aux dispositions légales et réglementaires du Code du travail. Elle se contente de réorganiser le principe de faveur à l'intérieur du bloc conventionnel, tout en instituant deux garde-fous. Le caractère impératif de l'accord de niveau supérieur ne doit pas être précisé, et l'accord dérogatoire doit être majoritaire. »

Par ailleurs, l'article 42 précise que, dans quatre domaines, les accords de branche restent impératifs : les salaires minima, les classifications, les garanties collectives de protection sociale complémentaire et le financement de la formation professionnelle.

Effet bloquant

Pour autant, les syndicats déplorent que le gouvernement n'ait pas choisi l'option inverse (contenue dans l'accord interprofessionnel de 1995), où l'accord de branche doit prévoir la possibilité de dérogation : « Certes, tous les syndicats s'opposeront à ce qu'un accord ne soit pas normatif, insiste Roland Metz, du secteur négociation collective de la CGT. Mais le fait de faire tomber le principe de faveur dans le domaine du négociable ne va pas favoriser le dialogue. » Voire, pour Jean-Luc Cazettes, président de la CFE-CGC, « cela risque tout simplement de bloquer la machine contractuelle et de donner à l'Etat un rôle accru ». Soit l'effet inverse de celui recherché...

Parallèlement, l'article 43 prévoit que, dans la plupart des cas où le Code du travail renvoie à un accord de branche la mise en oeuvre d'une disposition législative, un accord d'entreprise pourra désormais intervenir (voir encadré p. 20). Cette nouveauté fait hurler les syndicats, qui y voient la porte ouverte à un dumping social mortifère (notamment en matière de temps de travail).

Verrou essentiel

« D'autant, ajoute Michel Coquillion, secrétaire national CFTC, que l'accord majoritaire revient un peu à une ligne Maginot : il n'empêchera pas l'employeur de brandir le chantage à l'emploi ». Mais là encore, la loi institue un verrou essentiel au niveau de la branche : en effet, l'article 45 sécurise les accords antérieurs. Concrètement, toutes les conventions de branche signées avant la promulgation de la loi, notamment en matière de temps de travail, continuent de s'appliquer impérativement... en attendant une renégociation.

Pour Max Matta, DRH de Rhodia, le rôle clé attribué à la branche en matière de dérogation est complètement justifié : « Dans une branche composée essentiellement de PME, les professionnels de la négociation se trouvent au niveau de la branche, et il est donc logique qu'elle décide d'interdire les dérogations. »

Les nouveaux points négociables par l'entreprise

CDD : indemnité de fin de contrat ramenée à 6 % (au lieu de 10 %) en contrepartie d'actions de formation (L 122-3-4).

Travail temporaire : fixation de la période d'essai (L 124-4-1) ; suppression de l'indemnité de fin de mission (L 124-4-4, 1°) ; définition du champ des missions de travail temporaire (L 124-21-1).

Temps partiel et temps partiel modulé : réduction du délai de prévenance en cas de modification de la répartition de la durée du travail ; augmentation de la limite dans laquelle peuvent être effectuées des heures complémentaires ; interruption au cours d'une même journée supérieure à deux heures ou plus d'une interruption (L 212-4-4 et L 212-4-6, 4° et 8°).

Durée du travail : fixation du taux de majoration des heures supplémentaires (10 % a minima) (L 212-5) ; détermination des périodes de référence pour le décompte des heures supplémentaires et repos compensateurs en cas de travail saisonnier (L 212-5-2) ; fixation du contingent d'heures supplémentaires (L 212-6) ; dérogation au repos quotidien de 11 heures (L 220-1) ; dérogation au repos hebdomadaire de 2 jours consécutifs des salariés et stagiaires de moins de 18 ans (L 221-4) ; repos par roulement pour les équipes des suppléances (L 221-5-1).

Travail de nuit : dérogation à la durée du travail quotidienne et hebdomadaire (L 213-3).

Santé et sécurité au travail : formation spécifique des membres du CHSCT dans les établissements de moins de 300 salariés (L 236-10, 4e alinéa).