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La chambre sociale a fait de l'explication de texte

SANS | publié le : 04.05.2004 |

La chambre sociale de la Cour de cassation, toujours submergée de pourvois, s'est davantage attachée, selon son bilan 2003 qui vient de paraître, à clarifier les normes légales plutôt qu'à opérer des revirements de jurisprudence.

La chambre sociale de la Cour de cassation ne désemplit pas. A elle seule, elle concentre plus d'un tiers de l'activité des chambres civiles de la Haute juridiction. Et pour cause ! Le nombre des pourvois ne cesse d'augmenter depuis des années. 2003 ne fait pas figure d'exception, comme l'a remarqué Guy Canivet, premier président de la Cour, lors de la présentation, le 28 avril dernier, du rapport 2003 de l'activité de cette instance.

Ce n'est pourtant pas faute d'avoir tenté de résoudre cet encombrement. En effet, en mars dernier, l'ensemble des contentieux de Sécurité sociale, autrement dit, les accidents du travail, ont quitté la chambre sociale pour la deuxième chambre civile. Les flux n'ont, néanmoins, pas faibli. Ce sont, ainsi, 8 930 pourvois qui ont été comptabilisés en 2003, contre 9 529 en 2002, comprenant alors les affaires de Sécurité sociale (soit 1 589 pourvois). Et, rien qu'au premier trimestre 2004, 2 800 se sont déjà fait connaître. « L'inflation provient principalement des affaires prud'homales, dont le nombre a atteint, en 2003, 8 512 contre 7 830 en 2002, soit 9 % de hausse en un an et 31 % sur cinq ans ! », explique Pierre Sargos, président de la chambre sociale, ajoutant, qu'en la matière, il restait encore, en mars dernier, quelque 12 500 affaires en attente.

L'explication ? Selon Pierre Sargos, l'essentiel du contentieux trouve sa source dans la contestation des motifs de licenciement. En ligne de mire : les licenciements disciplinaires, pour lesquels les justiciables entendent revenir sur la faute qui leur est reprochée. Est-ce dû à l'utilisation de plus en plus répandue de faux motifs ou, tout simplement, à la hausse des licenciements disciplinaires ? Pierre Sargos ne prend pas position. Pour autant, il est tentant de considérer le premier scénario comme probable, à l'heure où les prud'hommes sont particulièrement sollicités dans des affaires mettant en cause plusieurs entreprises ayant procédé à quelques centaines de licenciements pour motif personnel, juste avant la mise en place d'un plan de sauvegarde pour l'emploi (voir Entreprise & Carrières n° 711).

Le temps de travail

Autre matière à pourvoi : la santé des salariés et l'ensemble des modalités à respecter, en particulier, pour ce qui concerne les visites médicales et les obligations de l'employeur.

Selon le président de la chambre sociale, un autre thème risque de faire une entrée très remarquée dans les prochains mois : celui relatif à la durée du temps de travail. Il fait, ainsi, référence aux accords nés après les lois Aubry, rarement unanimes. Aux magistrats de la Haute juridiction d'être bientôt interpellés sur leur légalité.

Quoi qu'il en soit, les prochains pourvois devront être fondés. L'année dernière, près de 45 % de ceux reçus par la chambre sociale ne l'auraient pas été. C'est pourquoi les magistrats de la Cour de cassation attendent avec impatience le décret obligeant les justiciables à se faire assister par des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. Des avocats spécialisés, qui devraient éviter de déposer des pourvois irrecevables. Ce serait imminent !

Cela étant, la chambre sociale a su faire face à l'ampleur des sollicitations, selon les statistiques de son activité. Ainsi, les délais moyens de jugement ont diminué. Ils sont passés d'un an et onze mois à un an et huit mois. Et 24 % de décisions et d'arrêts de plus ont été prononcés (7 103 en 2003 contre 5 709 en 2002).

Les arrêts 2003

En matière de décisions, le cru 2003 ne fait pas particulièrement état de revirements jurisprudentiels, comme ce fut le cas, en 2002, avec la contrepartie financière des clauses de non-concurrence ou la nouvelle définition de la faute inexcusable de l'employeur en matière d'accidents du travail et de maladies professionnelles. « Notre souci a été de simplifier et de clarifier l'interprétation de certaines normes légales, mais aussi d'élaborer une nouvelle jurisprudence pour corriger certains excès ou de fixer une ligne directrice plus cohérente », signale Pierre Sargos.

Du côté des nouvelles orientations de la Cour, on retiendra, pour 2003, différents arrêts comme celui du 3 juin, ceux du 26 novembre ou encore celui du 19 décembre. Dans le premier, elle s'est prononcée sur la portée de la mention du lieu de travail dans le contrat, à savoir sa seule valeur d'information sauf s'il est stipulé, par une clause claire et précise, que le salarié exécutera son travail exclusivement dans ce lieu. Dans les seconds, la Cour fixe sa doctrine en matière de CDD d'usage. Dans le troisième, elle a tranché la délicate question de l'impartialité des conseillers prud'homaux lorsqu'ils appartiennent à la même organisation syndicale que l'une des parties.

Autre position importante : celle prise dans les arrêts du 21 janvier et du 2 décembre 2003. La chambre sociale y a réaffirmé qu'un contrat de travail peut prendre fin non seulement par un licenciement ou par une démission, mais aussi à la suite d'un accord entre les parties. Et ce, même dans le cadre d'une rupture pour motif économique ; à condition qu'elle résulte d'un départ volontaire s'inscrivant dans le cadre d'un accord collectif mis en oeuvre après consultation du comité d'entreprise. « Ces arrêts marquent, ainsi, le souci de la chambre de maintenir ce principe fondamental du droit des contrats qu'est la possibilité de rupture amiable du contrat de travail, dès lors que le salarié est pleinement informé de ses droits », souligne le rapport.

Sécurité des salariés

En matière de sécurité des salariés, un arrêt du 13 novembre a rappelé que les contrats de travail ne peuvent contenir de clauses de rémunération de nature à compromettre la sécurité des salariés. Particulièrement visées, les sociétés de transports routiers, qui incitent, de manière directe ou indirecte, au dépassement de la durée du travail ou des temps de conduite autorisés, avec l'octroi de primes ou de majoration de salaire en fonction des distances parcourues ou du volume des marchandises transportées.

Enfin, dans le domaine des rapports collectifs de travail, la Cour de cassation, depuis son arrêt du 30 avril 2003, permet aux employeurs et aux syndicats d'un même groupe de sociétés d'organiser une représentativité syndicale à l'intérieur du groupe.