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LES PME AUSSI

SANS | publié le : 20.04.2004 |

La responsabilité sociale d'entreprise (RSE) n'est pas un dossier réservé aux grands groupes. Beaucoup de PME et d'entreprises non cotées, qui n'ont pourtant pas les mêmes contraintes dans ce domaine, ont entamé des démarches, parfois de longue date, généralement concrètes et fructueuses. En outre, des guides sérieux d'évaluation et d'accompagnement de la RSE leur sont destinés.

Bonne nouvelle pour les zélateurs du développement durable et de la responsabilité sociale d'entreprise : ces notions et les pratiques qu'elles encouragent semblent parfaitement adaptables à la petite échelle des PME ou des groupes non cotés.

Dans ce cas, point d'actionnaires éthiques ou d'agences de notation, de risque de réputation sur un marché de biens de consommation, de programmes des Nations unies... Pas plus d'obligation légale, comme l'article 116 de la loi française NRE, qui contraint les groupes présents en Bourse à publier un rapport de développement durable. Et pourtant, de nombreuses PME collectionnent les bonnes pratiques et sont aptes à se lancer dans une démarche stratégique de RSE, qui ne ressemble pas tout à fait à celle des grands groupes.

D'abord, elles ne l'envisagent pas dans le cadre d'une opération de communication obligatoire auprès d'un tiers, mais comme une démarche de progrès, qu'elles engagent plus facilement, pour améliorer concrètement les relations avec les fournisseurs ou les clients, la motivation des salariés et l'attractivité de l'entreprise sur un marché local.

Patron "éclairé"

D'autre part, sans doute plus encore que dans les grands groupes, la conviction du dirigeant est déterminante. La plupart des expérimentations les plus avancées dépendent, en effet, d'un patron "éclairé", souvent membre d'un réseau professionnel comme le Centre des jeunes dirigeants (CJD), actif dans sa région, ou ayant, dès l'origine, orienté son entreprise dans la voie de l'économie sociale ou coopérative.

Une fois donnée l'impulsion patronale, les PME disposent d'un atout de taille : la légèreté de la structure, qui permet une communication plus concrète et plus efficace. Leur principal handicap : la question des moyens. Elles ne disposent pas de services centraux et ne peuvent pas dédier des compétences en propre à un dossier "RSE". Difficile, dès lors, de structurer un ensemble de bonnes pratiques pour en faire une démarche stratégique.

Absence de normes

Pour l'heure, il n'existe pas de standard de la RSE, pas de norme Iso, par exemple. Mais les guides d'évaluation, les référentiels permettant de réaliser un bilan se sont multipliés, ces dernières années. On en compterait une trentaine en Europe, selon le site d'informations spécialisé Novethic.

En France, quatre guides présentent une démarche très construite, et généralement accompagnée, correspondant aux besoins et à la réalité des PME : Le bilan sociétal, du Centre des jeunes dirigeants et des acteurs de l'économie sociale (CJDES) ; La performance globale, du CJD ; Le guide de l'association du Nord- Pas-de-Calais Alliances, élaboré avec le réseau d'entreprises CSR Europe ; et le guide SD 21 000, de l'Afnor (lire p. 15). Ils sont le fruit de réflexions parfois anciennes et, pour ceux qui émanent des réseaux professionnels du CJD et du CJDES, se sont élaborés autour d'expérimentations nombreuses en entreprises.

Thèmes de communication

« Nous avons commencé à mener une réflexion dès 1995, explique Gérard Leseul, vice-président du CJDES. Il nous semblait que les notions de responsabilité sociale et de développement durable, mises en avant par les grands groupes, pouvaient devenir des thèmes de communication plus que d'auscultation sérieuse. D'autre part, les entreprises de l'économie sociale et les petites structures nous semblaient tout aussi légitimes que les grands groupes dans ce domaine. Mais il fallait dépasser le discours et créer un outil de diagnostic. »

Bilan sociétal

Le bilan sociétal, consistant en une batterie de 450 questions, et reposant sur l'accompagnement par un consultant agréé, paraît, aujourd'hui, l'un des référentiels d'évaluation les plus précis et impliquants en matière de RSE. Quelques entreprises mutualistes, Maïf et Macif, notamment, sont en train de le mettre en oeuvre.

Les jeunes dirigeants du CJD étaient, eux aussi, historiquement et culturellement, sensibilisés à l'idée d'une croissance responsable. Depuis plus de deux ans, ils travaillent sur leur diagnostic de la "performance globale". « Les questions s'articulent autour de la gouvernance et des parties prenantes, détaille Alain Gavand, le consultant qui a accompagné la structuration de cette démarche. Par la suite, ceux qui le souhaitent s'engagent dans une réflexion assistée par des pairs membres du CJD, pour préciser des axes d'amélioration pour leur entreprise. » Sept cents jeunes patrons sont, aujourd'hui, lancés dans l'aventure.

C'est le cas de Bruno Hug de Larauze, dirigeant de MTTM, une société de manutention portuaire de Saint-Nazaire de 300 personnes, née en 1919 : « Nous sommes une des rares entreprises françaises de manutention encore indépendantes. Dans un environnement qui se concentre et se mondialise, notre enjeu est de continuer à intéresser le client et à avoir un sens pour le salarié. Il y a plus de sept ans, nous avons commencé à chercher une démarche et des indicateurs du développement durable. Le CJD a structuré sa démarche petit à petit. Nous y avons pris part. »

Budget formation

Aujourd'hui, MTTM a affirmé des valeurs d'entreprise : co-entreprendre, responsabilité, équité, engagement, respect, solidarité. « Si un projet entre en contradiction avec une de ces valeurs, on ne le fait pas. » En cinq ans, l'entreprise a multiplié par quatre son budget de formation ; en quatre ans, elle a investi plus de 3 millions d'euros dans le domaine de la sécurité/environnement (pour un chiffre d'affaires de 60 millions d'euros). Elle a aussi créé un comité stratégique composé de membres extérieurs, qui a entamé, par exemple, un travail sur la gestion des risques. Tout aussi innovant : elle encourage ses salariés à s'investir dans la vie locale et associative, en prenant en charge des cotisations, en aménageant en conséquence le temps de travail. « Les bonnes pratiques existaient avant le bilan performance globale, que nous avons réalisé en 2003, explique Bruno Hug de Larauze. Mais il permet une prise de recul sur l'activité à des dirigeants qui sont souvent isolés, et une approche plus stratégique et prospective. »

Sensibilité sociale

MTTM est une société coopérative de production (Scop), qui appartient à ses salariés et dont l'objet est, notamment, de pérenniser l'activité. Dans le domaine de la RSE, il n'y a guère de hasard. Parmi les bons élèves, les PME ayant un statut de Scop, les mutualistes, les sociétés de l'économie sociale, ou encore celles gérées par un patron affilié à une organisation "progressiste" comme le CJD, sont, évidemment, sur représentées.

Pour la masse des autres, le mouvement sera plus lent. Mais, selon Sylvain Breuzard, président du CJD, il est inéluctable, comme le fut celui des normes de qualité. Les donneurs d'ordres exigeront de leurs PME sous-traitantes une attitude socialement responsable, et ne pourront se contenter de peser sur les coûts dans leur relation avec cette partie prenante.

Les banquiers devraient aussi, de plus en plus, examiner les risques non financiers des PME auprès desquelles elles s'engagent, pour ne pas être solidairement responsables en cas de sinistre social ou environnemental. Quant aux outils d'évaluation, ils existent et sont en train de faire leurs preuves.

L'essentiel

1 Des centaines de PME ou de groupes non cotés, qui n'ont pas d'obligations particulières en la matière, ont commencé à évaluer, puis à travailler sur leur RSE (responsabilité sociale d'entreprise). Pour l'heure, il s'agit, bien sûr, de pionnières dirigées par des patrons motivés.

2 Leurs atouts sont nombreux : légèreté de la structure, réactivité, importance de l'impulsion du dirigeant, facilité à déterminer des indicateurs simples et fiables... En revanche, avec des moyens limités, il faut pouvoir faire vivre la démarche dans le temps.

3 En l'absence de norme officielle ou de standards de la RSE, plusieurs référentiels d'évaluation très complets, et particulièrement destinés aux petites structures, sont utilisables.