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Mon Panthéon... est décousu

SANS | publié le : 23.03.2004 |

Nous parlons de Valeurs.

Le client est un solide, un DRH de terrain, un vrai de vrai, un homme d'expérience, longuement rodé aux aléas des entreprises multinationales. Sa réputation de "nettoyeur de tranchées" et de "grand effaceur" est largement surfaite. Dans la vraie vie, un homme délicieux, attentif, respectueux de chacun et de tous, sans jamais aucune démagogie dans son approche des équipes dont il a la charge. Aucune différence d'attitude à tous les niveaux hiérarchiques. Aucune flatterie. Aucune manipulation. Une volonté farouche de concilier les basses besognes de la fonction et ses exigences de respect. Tout ce que j'aime.

Il faut toiletter la "charte des Valeurs". L'exercice est classique. Six ans après la première mouture, il n'y a rien de choquant à vouloir vérifier que le choix initial des Valeurs sur lesquelles s'engage l'entreprise a encore un peu à voir avec la réalité. La double réalité, devrait-on dire : l'évolution de l'environnement et la réalité des pratiques de management. Où en sommes-nous ?

« Nos métiers changent. Très rapidement. Ce qui a fait l'essentiel de nos ressources est en train de disparaître plus vite qu'on l'imaginait. Mais on réagit. Notre mutation est conduite pied au plancher. Dans toutes les divisions. La mondialisation est, pour nous, une terrible contrainte. Muter très vite ou disparaître, c'est notre seul choix face aux pays émergents, qui lorgnent sur nos marchés et pulvérisent nos marges. Nos plans d'action sont revisités chaque semestre. Les équipes reconfigurées en permanence. Le système de reporting de plus en plus frénétique. Alors c'est vrai que notre Valeur "Anticipation" a un peu de plomb dans l'aile. Il serait plus juste de parler maintenant de "Réactivité", non ? »

Difficile à dire.

Je comprends bien ce qu'on voulait dire par "anticipation", et cette idée séduisante de « travailler d'abord pour le long terme », comme le précise justement la charte. Et je vois tout l'intérêt de mobiliser les équipes sur des projets de longue durée, les seuls intéressants à mes yeux. Mais si le métier ne le permet plus, alors ne mentons pas. Que signifie "anticipation" dans un contexte d'agitation permanente et d'imprévisibilité de toutes les évolutions, conditionnées par des évolutions technologiques impossibles à maîtriser ? Quelle "anticipation" peut-on promettre aux salariés de toutes les divisions entraînées dans ces réformes brutales ? Sans compter les pratiques de management ! Restent-elles inscrites dans le long terme ?

Vive réaction du client, heurté dans sa sincérité.

« D'accord. Au Panthéon de nos Valeurs, il y a un peu de vrac. Mais je vous affirme la chose suivante : je ne sais pas quel métier nous allons faire demain. Je ne sais pas sur quel marché nous allons focaliser nos efforts. Ni depuis quelles usines. Mais chaque fois que possible, je sais que nous travaillerons, dans l'avenir, avec ceux qui nous ont fait confiance jusqu'ici. Plus malin en management que sur nos métiers ? Peut-être. Mais c'est là-dessus que nous comptons d'abord pour faire face à notre avenir. Et sur ce point, nous sommes tous d'accord ! »

Alors tant mieux ! Une charte de Valeurs, je pense qu'il vaut mieux la mettre en conformité avec nos pratiques de management qu'avec les aléas de nos métiers. Les métiers passent. Restent nos obligations face aux équipes.