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QUEL PARTAGE AVEC LA HIERARCHIE DE PROXIMITE ?

SANS | publié le : 16.03.2004 |

Evaluation, recrutement, gestion du temps de travail... sont quelques-unes des tâches RH confiées au management de proximité. Pourtant, celui-ci pourrait être plus impliqué, sans soustraire aux DRH leurs prérogatives. Encore faut-il élaborer des règles du jeu transparentes pour tous.

Dans les années 90, les entreprises et les DRH ne juraient que par le partage de la fonction RH avec les managers de proximité. Il en allait de la performance de l'entreprise et de la responsabilisation du management. Ils en étaient convaincus. Mais, pour grand nombre de consultants, tout cela n'est resté que belles théories. La critique est sévère : « Si les entreprises conviennent que certaines tâches doivent être gérées au plus près du terrain, il n'est toutefois pas souvent question de distribuer le pouvoir décisionnaire et les moyens qui vont avec », remarque Thierry Heurteaux, dirigeant de Pactes conseil, cabinet spécialisé en stratégie sociale. Pire, « ces managers n'ont ni les moyens, ni la connaissance, ni les formations pour assumer ces rôles, on les maintient ainsi dans une sorte de médiocrité. Cause à effet ? Les directions ne font pas confiance aux opérationnels et ne les jugent pas à la hauteur pour la mise en oeuvre des politiques RH construites en haut lieu », renchérit Jean-François Carrara, responsable d'activité chez Algoé.

Vision concrète

Dommage, car leur contribution serait profitable à toute l'organisation. « Il ne faut pas sous-estimer leur maturité et leur qualité de visionnaire, signale Dominique Nioré, responsable de la gestion des cadres du groupe Unilever (5 200 salariés). En tant que RH, nous sommes intégrés dans la stratégie de l'entreprise, eux nous apportent leur vision concrète, ce qui alimente nos réflexions ce sont un apport et une reconnaissance réciproques. » Cette présence sur le terrain pourrait, ainsi, justifier davantage d'implication. Chez Unilog (5 700 salariés), par exemple, « les managers sont chargés de maintenir le contact entre les ingénieurs, en mission chez les clients, et l'entreprise », souligne Cécile Fougeron, DRH. Les opérationnels sont également bien placés pour gérer les compétences collectives et individuelles de leur équipe, déceler les envies de mobilité, faire appliquer le règlement intérieur et, le cas échéant, la discipline... « Ils sont les seuls à connaître les contraintes et les réalités de leur service », soutient Thierry Heurteaux. En termes de relations sociales, ils constituent aussi un excellent baromètre.

Données chiffrées

Les managers sont, en règle générale, mis à contribution pour tout ce qui relève des données chiffrées liées à la gestion de leur équipe : congés, arrêts maladie, organisation des plannings et gestion des 35 heures. « Les DRH ont d'ailleurs fait un effort pour les équiper en conséquence », souligne Gilles Dacquet, directeur général du cabinet-conseil DDI. Egalement bien entrée dans les moeurs, l'évaluation, guide méthodologique à l'appui. En matière de recrutement, ils participent de plus en plus au processus.

Relais d'information

Mais, à quelques exceptions près (voir pages suivantes), les managers de terrain demeurent de simples relais d'information sur les questions de gestion des compétences, de formation ou encore de rémunération. « La prise de décision revenant, le plus souvent, aux RH locaux », avance Gilles Dacquet. Evidemment, il n'est pas envisagé de donner la casquette de DRH aux managers. « Tout est question d'équilibre, pour Dominique Nioré. Ainsi, s'ils doivent être partie prenante dans le recrutement de leur équipe - il est, en effet, malvenu de leur imposer quelqu'un sans qu'ils aient eu leur mot à dire -, il n'en demeure pas moins que la DRH raisonne pour chaque embauche selon une gestion globale de l'emploi à moyen et long termes. Un recrutement ne se limite pas à un seul poste, nous restons donc des arbitres. Mon raisonnement est le même pour la formation. Là aussi, un plan de formation ne peut être correctement établi qu'avec le manager. Mais il revient à la DRH de décider si les desiderata de ce dernier cadrent avec la politique globale de l'entreprise. » Au risque de voir les opérationnels développer des pratiques locales en phase avec les enjeux locaux mais contraires aux règles d'homogénéité et d'équité à observer dans une organisation.

Dimension stratégique

D'accord, donc, pour un partage, mais si la DRH garde la main mise sur toute la dimension stratégique des process. « Logique, la DRH concentre les informations qui lui permettent d'avoir une approche globale des problématiques, contrairement aux salariés de terrain », justifie Jean-François Carrara. S'ajoute un autre frein à la décentralisation, soulevé par Danièle Gonzalez, directrice d'études à Entreprise & Personnel (*) : « Le management de proximité ne constitue pas un ensemble homogène. Il est composé de personnes n'ayant ni les mêmes profils - en termes d'âge, de compétences ou d'histoire professionnelle - ni les mêmes métiers, ni, enfin, les mêmes conditions d'exercice. Leur seul point commun est d'être le dernier échelon de la pyramide hiérarchique. Au regard de ces différences, il serait vain de leur définir un rôle RH dans l'absolu. »

Amélioration du partage

Selon les spécialistes, il est, malgré tout, possible d'améliorer ce partage, sans soustraire aux DRH leurs prérogatives. Ce qui suppose, pour les managers de proximité, « d'être enfin sensibilisés à la gestion des hommes et aux techniques de relations et de communication », prévient Jean-François Carrara ; et, pour la DRH, de clarifier les rôles de chacun et les règles de coopération. Il lui restera à motiver ces opérationnels pour qu'ils s'investissent dans le monde des RH.

Les leviers ? « Il faut que l'entreprise leur démontre sa confiance et leur confère une légitimité à émettre un avis », complète Thierry Heurteaux. Le dispositif sera au point, selon Danièle Gonzalez, « lorsque la décision sera aussi partagée afin qu'il y ait un réel enjeu pour ces managers ».

(*) Danièle Gonzalez a publié, en octobre dernier, une étude intitulée Fonction RH et management de proximité, fausses évidences et vraies questions (voir Entreprise & Carrières n° 694).

L'essentiel

1 Dans les années 90, le "tous DRH" semblait séduire les directions d'entreprise. Pour autant, peu sont passées aux actes.

2 Les managers de proximité sont mis à contribution dans quelques process RH. Mais s'il y a partage de certaines tâches, il n'y a pas encore partage de décision.

3 Si une délégation complète de la fonction RH a ses limites, il existe toutefois des réalités intermédiaires à inventer.

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