Si DRH et directeurs opérationnels s'accordent sur l'enjeu que représente, à moyen terme, la gestion des compétences, ils pointent aussi les difficultés rencontrées dans sa mise en oeuvre.
«Lors de la première édition de l'Observatoire RH, en mai dernier, les directeurs opérationnels proposaient de renforcer la gestion des compétences, pour mener à bien la transformation des entreprises, là où les DRH prônaient un reengineering des processus, puis un alignement des organisations et des outils », souligne Marc Benero, consultant métier chez Microsoft France. D'où la décision de centrer la deuxième vague de cet observatoire (réalisée en novembre 2003 et restituée le 28 janvier dernier) sur cette question de la gestion des compétences. Or, l'enquête confirme le décalage : si 65 % des directeurs opérationnels jugent le maintien ou l'accroissement des compétences très critique pour la compétitivité de l'entreprise (35 % l'estimant « assez critique »), ce n'est le cas que de 38 % des DRH (54 % le voient comme « assez critique », 8 % comme « peu ou pas critique »).
Malgré tout, souligne l'étude, « les deux populations du panel ont une vision partagée et cohérente du sujet ». Ainsi, pour la moitié des répondants, l'enjeu principal de la gestion des compétences relève de l'anticipation d'une déperdition de savoir-faire, qu'elle soit due aux départs en retraite ou au turn-over de certaines populations (voir graphique). Par ailleurs, 64 % des DRH et 66 % des DO considèrent que la gestion des compétences n'est pas un concept de spécialistes RH, mais une réalité opérationnelle, qui vise, pour 88 % des DRH et 92 % des DO, le moyen terme. Enfin, les répondants sont unanimes pour déclarer que la gestion des compétences doit s'appliquer à l'ensemble des salariés. « Mais quand on entre dans le détail, pointe Marc Benero, on s'aperçoit que trois populations sont prioritaires : les managers, les commerciaux et les experts », les interviewés jugeant la gestion des compétences du personnel administratif et de production bien moins critique.
Sur la teneur des plans d'action mis en oeuvre dans leur entreprise, là aussi, DRH et DO font preuve du même optimisme : 86 % des premiers et 74 % des seconds assurent que leur entreprise a recensé les savoir-faire et connaissances critiques ; 86 % et 76 % qu'elle a identifié les individus clés qui les possèdent ; 75 % et 62 % que les moyens adaptés (formation, base de connaissances...) ont été mis en place pour maintenir ces connaissances dans l'entreprise. Plus de 80 % du panel affirment, également, qu'ils ont « une stratégie claire et une claire conscience des métiers à faire évoluer, des évolutions attendues, des savoir-faire et connaissances critiques à acquérir à cette fin ». Ils sont encore une forte majorité à assurer que les salariés comprennent les priorités stratégiques de l'entreprise, ce en quoi ils contribuent à leur exécution, et qu'ils ont les compétences nécessaires pour atteindre le niveau de performance attendu.
Tout irait-il donc pour le mieux dans le meilleur des mondes ? Pas si sûr. Car moins d'un interviewé sur deux a la perception d'une démarche structurée de gestion des compétences, et 60 % des DRH et 70 % des DO reconnaissent que les plans d'action pour accroître les compétences sont difficiles à mettre en oeuvre (notamment ceux qui concernent les employés). D'ailleurs, 61 % des répondants avouent ne pas mesurer les résultats de ces politiques.
« Les entreprises butent essentiellement sur deux obstacles, précise Isabelle Eches, responsable RH de Microsoft France : la nécessité d'être plus pragmatiques pour sortir du piège des référentiels "usines à gaz", et celle de construire un dialogue avec chaque collaborateur. » Pour ce faire, une seule solution : s'appuyer sur l'encadrement intermédiaire, à condition, souligne Isabelle Eches, « de leur permettre d'être seulement et pleinement des managers, et non des experts responsables d'équipes ».
L'observatoire RH
Créé par Microsoft, Accenture, l'ANDCP et Novamétrie, en mai 2003, l'Observatoire RH repose sur l'interrogation régulière (par questionnaires et entretiens en face-à-face) d'un panel composé de 200 dirigeants de grands groupes, dont 43 % de DRH et 57 % de directeurs opérationnels. Les questions et les résultats sont validés par un comité prospectif composé de 8 DRH de grands groupes.