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Des entreprises traquent les temps improductifs

SANS | publié le : 03.02.2004 |

Qui fait quoi ? Pendant combien de temps ? Si le suivi analytique de l'activité n'est pas un phénomène nouveau, les entreprises misent de plus en plus sur des solutions informatiques capables d'optimiser la remontée et l'analyse des informations.

Mesurer le temps de présence du personnel dans l'entreprise est une chose, mesurer le temps de travail effectif en le découpant en fonction des différentes activités individuelles en est une autre. Chez IBM Global Services, à l'instar de nombreuses sociétés de services, les salariés imputent des temps passés sur des projets et sur les différentes activités qui en découlent. Fastidieux, cet exercice obligé se déroule, chaque semaine, sur une application dédiée sur l'intranet et permet à la direction financière d'affiner la facturation clients. Il en résulte le calcul d'un taux d'utilisation, dont le niveau détermine, en partie, les augmen- tations de salaire individuelles. Bien entendu, les activités non directement productives (formation, administration, coopération, veille) n'entrent pas en ligne de compte.

Démarche stressante

« Le taux d'utilisation ne devrait pas être individuel, puisque l'exécutant n'est pas complètement maître des missions sur lesquelles il se trouve affecté. Il y a un report de la responsabilité de l'entreprise sur les salariés. La démarche est, pour le moins, stressante », avance Michel Perraud, représentant syndical CFDT au CCE d'IBM France. A noter que, chez Big Blue, l'ensemble des délégués syndicaux sont, aujourd'hui, contraints de saisir leurs heures de délégation dans l'application de suivi d'activité, en plus du pointage mensuel traditionnel.

Chez 9 Telecom (groupe LDCom), le suivi analytique de l'activité ne concerne, pour le moment, que la direction informatique. L'outil de saisie des temps vient d'être mis en place et répond à une demande des commissaires aux comptes, désireux de déterminer le pourcentage de la masse salariale pouvant être compté comme de l'investissement et celui relevant de la charge pure. « La direction nous a assuré que les informations recueillies ne seront pas utilisées à titre individuel. Trois mois après sa mise en oeuvre, on ne peut pas dire que l'outil dérive. La démarche est compréhensible. Surtout dans le contexte d'une future entrée en Bourse », explique Bruno Mercier, le délégué syndical FO.

Rappel à l'ordre

En attendant, la direction fait pression pour que les collaborateurs imputent moins de temps sur des activités jugées improductives, comme le pilotage des projets, au profit des activités de développement. Un récent rappel à l'ordre leur a été adressé par mail...

C'est à l'initiative des directions financières et opérationnelles que ces projets se mettent en place et tendent à se généraliser, grâce aux solutions en ligne proposées par les éditeurs. Par rapport aux feuilles de temps, la saisie sur le module d'un intranet optimise, en effet, la remontée et le traitement des informations.

En matière de gestion de projet, le suivi d'activité est particulièrement mis à l'honneur. « Dans sa dimension collective, le suivi analytique des activités devient un réel outil de pilotage, analyse François Pelissolo, vice-président de Planisware, éditeur de logiciels. Au-delà de sa logique financière, il permet d'affiner, mois par mois, la connaissance des besoins en compétences. La comparaison régulière avec le réalisé responsabilise les managers sur leurs prévisions. »

Comparer les activités de chacun

« Notre solution permet la comparaison des activités de chacun par rapport à des objectifs, explique, de son côté, Eric Angelier, directeur associé d'Apsylis, autre éditeur spécialisé dans la gestion de projet. En revanche, elle ne propose pas de fonction permettant à une direction de comparer les activités des uns par rapport aux autres. » Toutefois, selon Michel Picard, responsable avant-vente SIRH chez CCMX, « l'approche tend à s'individualiser et le sujet deviendra de plus en plus sensible ».

Outre les équipes affectées à des projets, le personnel de production est également concerné. Un marché où les éditeurs de gestion des temps sont, cette fois, bien présents.

Calcul de la prime de productivité

Chez Alpaci, une société de 130 salariés, spécialisée dans le traitement du papier, les badgeuses, qui enregistraient, jusqu'en mars 2003, les entrées et les sorties, ont été équipées du récent module de suivi d'activité édité par la société Bodet. En fonction de la ligne de production où ils vont travailler, les opérateurs saisissent désormais un code sur les badgeuses. « Cela simplifie le calcul de la prime de productivité, qui est fixée au prorata du temps passé sur les différentes lignes de production », explique Etienne Wathle, responsable de la maintenance et de l'informatique.

« C'est le temps de travail effectif qui intéresse de plus en plus nos clients. Cette approche analytique des temps est très anglo-saxonne », note Fabrice Chausserais, responsable marketing de Bodet.

Outre l'aspect rémunération, le suivi des temps dans une usine permet, comme chez Lapeyre, où la solution Gesmod de GFI Progiciels est opérationnelle, de faire en sorte que le personnel ne dépasse pas les seuils d'exposition réglementaires aux émanations de certaines substances dangereuses pour la santé.

Mais ces outils peuvent, tout aussi bien, instrumenter des plans sociaux, aider l'entreprise à prendre des mesures de chômage technique ou encore à élaborer des plans de recrutement. « Le lien avec la gestion des compétences est encore balbutiant », estime, cependant, Didier Bouju, directeur général d'Horoquartz. En attendant, avec la dématérialisation des processus de travail, le suivi des activités devient de plus en plus aisé du fait de son intégration, en standard, dans les systèmes d'information.

GESTION DES TEMPS

1 A l'initiative de leurs directions financières et opérationnelles, de plus en plus d'entreprises investissent dans des solutions informatiques capables de mesurer le temps de travail effectif des collaborateurs.

2Ce suivi analytique peut servir à déterminer, en partie, le niveau des augmentations individuelles, mais aussi à affiner certains besoins en compétences.

3Très courus dans les activités de service, ces outils intéressent désormais les sites de production. Un marché où les éditeurs de gestion des temps se positionnent.

Un indicateur de productivité individuelle chez Staci

Depuis mai 2003, les opérateurs permanents de Staci et les intérimaires saisissent quotidiennement, sur l'intranet, les temps qu'ils passent à accomplir un éventail de tâches : vérification des stocks, mise en stock, préparation des commandes...

Spécialisée dans la logistique des achats réalisés sur Internet, cette entreprise de 250 salariés a mis en place la solution de suivi d'activité de Cegedim SRH, afin de mesurer la rentabilité commerciale globale, mais aussi pour alimenter des indicateurs de productivité individuelle. Pour Michel Thomas, le directeur général, « l'outil a remis à plat notre politique de rémunération variable. L'approche est bien acceptée, dans la mesure où elle est synonyme d'une plus grande objectivité ».

Auparavant, il incombait, en effet, aux chefs d'équipe, de remplir les temps d'activité sur des applications bureautiques hétérogènes. Aujourd'hui, la productivité individuelle représente, environ, 30 % de la rémunération variable.

Des salariés suivis à la trace

Fini les dossiers papier ! Le service gestion de La Mondiale, société spécialisée dans l'assurance vie, fonctionne sur un mode entièrement dématérialisé. L'occasion, pour elle, de gagner en productivité à effectif constant. Entre 2000 et 2003, alors que la démarche n'était pas encore industrialisée, les gains de productivité, sur les 250 gestionnaires progressivement concernés, ont été de 3 %, avec des pointes à 6 % dans le service "calculs".

Mais ce système de gestion électronique de documents numérisés à la source permet aussi aux managers de savoir, à tout moment, sur quels dossiers travaillent les gestionnaires, quels sont les niveaux d'avancement, les temps de traitement, etc. Autant d'éléments censés outiller l'animation des équipes. A noter que les critères de rémunération variable reposent, en partie, sur ces indicateurs.

Entre les activités de finance et de gestion, des centaines de milliers de salariés seraient concernés par ce type de suivi d'activité.

Poussant plus loin la démarche, des éditeurs de progiciels avancent l'idée de corréler la façon dont les collaborateurs utilisent les fonctionnalités de leurs outils avec leurs performances individuelles. Autre exemple très en vogue : celui des conducteurs routiers "pistés" par des systèmes de géolocalisation par satellite.