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Face aux intempéries, les salariés sur le pont

SANS | publié le : 09.12.2003 |

Du 1er au 3 décembre, des pluies diluviennes ont momentanément paralysé l'activité économique de neuf départements du sud-est de la France. Pour relancer l'appareil productif, les entreprises ont dû parer au plus pressé, en misant, notamment, sur la mobilisation des salariés. Témoignages.

«Après les inondations de 1994 et celles de 2002, on commence à avoir l'habitude », raconte Patrick Penez, le directeur régional de Sika, un fabricant d'adjuvants pour béton, installé à Aramon (30). Reste que les entreprises du grand sud-est de la France ont, une nouvelle fois, été prises de court par la violence des intempéries. Leur mot d'ordre ? Rétablir au plus vite l'appareil productif.

"Choix social"

Dans cet objectif, les salariés n'ont pas hésité à mettre la main à la pâte. « Nous n'avons pas pris l'option du chômage technique », indique Christian Sarret, directeur de l'usine de Lafarge Ciments, à Lozanne (69). Lequel revendique le « choix social » d'avoir demandé à ses 89 collaborateurs « d'être sur le pont ». Sur ce site, où l'eau est parfois montée jusqu'à 120 centimètres dans les ateliers, la solidarité entre les services a été de mise. « Nous allons nous organiser par rotations, pour que tout le monde récupère », signale le directeur.

Coup de sifflet

Plus au sud, sur le Rhône, les personnels de nuit des deux centrales nucléaires d'EDF (Cruas Meysse, Tricastin) ont déclenché, dès le 1er décembre, le plan d'urgence interne. La centaine de salariés d'astreinte ont été appelés à leur domicile, suite à l'arrêt d'exploitation de deux réacteurs. « Simple anticipation », précise Claude Jeandron, directeur délégué à la sûreté nucléaire. A ce "coup de sifflet", ont répondu les cadres de direction, les techniciens, les spécialistes de l'environnement, le médecin, et, surtout, les équipes de nettoyage, confrontées à l'évacuation des débris végétaux charriés par le fleuve.

Activité désorganisée

Mobilisation générale aussi chez les Transports Munster, une PME de 640 salariés basée dans la Loire. Une dizaine de cadres, tous anciens routiers, étaient prêts à reprendre le volant pour acheminer les poids lourds à bon port. Bloqués sur l'axe St-Etienne-Lyon (A47), des conducteurs de cette entreprise avaient, en effet, dépassé le temps de conduite autorisé.

« La fédération des transports routiers nous indiquait par e-mail l'état des routes, explique-t-on chez Hérault Transport Express, une entreprise de messagerie installée près de l'aéroport de Montpellier. L'activité a été désorganisée toute la journée, mais il n'y a pas eu de chômage technique. »

Demandes de chômage partiel

Dans le Gard, un des départements les plus sinistrés, le service chargé des dossiers de chômage partiel à la Direction du travail indiquait, ainsi, avoir reçu une trentaine de demandes au lendemain des intempéries. Le chiffre définitif risque toutefois d'être beaucoup plus élevé, de nombreuses activités ayant été paralysées par la coupure d'eau qui a eu lieu, pendant plusieurs jours, à Nîmes et dans ses environs.

L'hôtellerie-restauration n'a pas été épargnée. Un secteur qui pourra bénéficier du dispositif d'aides annoncé, le 5 décembre, par le secrétariat d'Etat aux PME, au Commerce et à l'Artisanat. Les préfets et les délégations régionales du commerce et de l'artisanat sont actuellement chargés de calculer l'étendue des dommages.

Récupérations

Dans les Bouches-du-Rhône et le sud du Vaucluse, ce sont les entreprises du bâtiment et des travaux publics qui ont été les plus touchées. « Nous avons dû mettre nos personnels ouvriers au chômage intempérie, un dispositif d'indemnisation partielle du chômage technique spécifique à notre profession », explique Roland Nalin, président du syndicat des entreprises d'étanchéité des Bouches-du-Rhône.

La direction départementale du travail du Vaucluse a commencé à envoyer quelques dossiers de demande d'indemnisation du chômage partiel. « Mais, par expérience, nous savons que beaucoup de chefs d'entreprise régleront le problème par des jours de congés payés ou récupéreront les jours non travaillés en demandant aux salariés de faire des heures supplémentaires », explique-t-on à la DDTEFP 84.

D'autres entreprises ont vécu des situations plus dramatiques. Ainsi, l'aciérie gardoise Ugine (150 personnes) a été entièrement évacuée. « Nous nous sommes installés provisoirement à la Maison de l'entreprise, explique Yves Bonnet, le directeur. Nous appelons les salariés pour les tenir informés. Une douzaine d'entre eux n'ont plus de logement, nous essayons de trouver des solutions. » Bien que le site soit voué à la fermeture, en juin 2004 (lire Entreprise & Carrières n° 688), la direction est déterminée à redémarrer l'activité : « Nous avons besoin de produire, et il faut poursuivre le reclassement du personnel », explique le directeur, qui espère un redémarrage d'ici à un mois.

Selon la direction des services aux entreprises de la CCI du Vaucluse, le nord du département compterait, quant à lui, 10 ou 20 établissements en grande difficulté. Un numéro unique a été mis à leur disposition et des assistants techniques de la CCI ont, le 8 décembre, quadrillé le terrain pour évaluer les dégâts.

Situations ubuesques

Côté services publics, France Télécom annonce avoir mobilisé plus de 1 000 techniciens. Dans le Gard et l'Hérault, des personnels en RTT ont été rappelés et une trentaine de salariés d'autres régions sont venus prêter main-forte. Les inondations ont parfois conduit à des situations ubuesques, comme chez Air Littoral, une compagnie aérienne montpelliéraine touchée par un plan social. Pour cause de routes bloquées, l'entretien préalable de licenciement de certains salariés s'est déroulé mercredi... par téléphone.