La loi n'ayant pas indiqué si le temps de trajet est, ou non, du temps de travail effectif, il appartient à la jurisprudence d'apporter une réponse à cette question essentielle pour certains salariés tels que les itinérants... Pour les cadres au forfait jours, l'enjeu est moindre, leur temps de travail étant décompté en jours, si ce n'est qu'en organisant leurs déplacements en fin de journée ou le week-end, la législation sur les repos obligatoires peut ne pas être respectée.

Si la jurisprudence est importante concernant les salariés du bâtiment amenés à se déplacer sur des chantiers, les décisions concernant les salariés qui doivent faire de longs trajets pour se rendre chez des clients éloignés de leur lieu habituel de travail sont rares. D'où l'intérêt de la décision de la Cour de cassation, du 5/11/2003, traitant du cas d'un salarié de l'Afpa dispensant des formations dans différents sites. Cet arrêt affirme que « le temps habituel du trajet entre le domicile et le lieu de travail n'est pas en soi un temps de travail effectif ». Il appartient aux juges de rechercher si le trajet entre le domicile et les différents lieux de travail dérogent au temps normal du trajet d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu habituel de travail.

Si cet arrêt est loin de répondre à toutes les interrogations posées dans le cas de salariés effectuant de longs trajets pour aller chez des clients, il apporte certains éléments de réponse : le temps habituel de trajet entre le domicile et le lieu du travail n'est pas du temps de travail effectif. La référence au temps habituel peut signifier qu'a contrario, le temps "inhabituel" de trajet serait du temps de travail !

Se poseront, alors, les questions de savoir ce qu'est un temps de trajet "habituel", surtout pour des itinérants sans lieu de travail fixe, et comment évaluer le temps de travail.

Un arrêt ancien (Cass. soc.16/12/1997, Sté Adéquat Système) a considéré qu'il appartient au salarié d'établir que c'est « pour se conformer aux directives de l'employeur plutôt que par commodité personnelle que le salarié effectuait des déplacements selon des modalités et un horaire l'amenant à voyager en dehors du temps habituel de travail ».

On peut en conclure que, si le salarié effectue ses déplacements selon les modalités et les horaires conformes aux directives de l'employeur, le temps de trajet est du temps de travail effectif tandis que s'il les organise selon ses commodités personnelles, cette assimilation ne joue pas. L'autonomie du salarié devrait être un élément important permettant au juge de se déterminer.