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LA NOUVELLE DONNE

SANS | publié le : 28.10.2003 |

La réforme du financement des retraites n'a que quelques semaines et de nombreux décrets doivent encore la compléter. En attendant, certains outils d'épargne apparaissent déjà comme le coeur probable des futurs dispositifs de retraites d'entreprise. D'ailleurs, beaucoup de grands groupes n'ont pas attendu la loi.

Le big bang des retraites n'a pas encore eu lieu dans les entreprises. Au sein des DRH et des services de rémunération et de prévoyance, on en est à la phase de concentration de la matière grise. C'est que les 116 articles de la loi Fillon, pas un de moins, impliquent des évolutions encore difficiles à évaluer, dont une bonne partie seront cadrées par décrets et circulaires. Quant à la loi de finances pour 2004, elle en est encore au stade de projet. A côté des chantiers sur le maintien des salariés dans l'emploi et de la gestion des compétences des seniors, s'ouvriront lentement ceux qui concernent les rémunérations globales, avec leurs outils orientés retraites.

Insécurité juridique

« Nous nous trouvons, pour l'heure, en période d'insécurité juridique, résume Patrick Benammar, directeur du développement des ressources humaines de Siemens France. Il faut attendre une stabilisation avant de se lancer dans une discussion avec les partenaires sociaux. » Tous ses confrères des grands groupes français font, bien sûr, preuve d'une même prudence. La réforme du financement des retraites, coulée dans le bronze de la représentation nationale avec le vote de la loi du 21 août dernier, n'a que quelques semaines. La réflexion sur l'intérêt comparé des différents outils d'épargne (lire aussi p.16), créés ou réorientés par la réforme Fillon et le projet de budget, ne fait que commencer. Quels seront les cas de déblocage anticipé des avoirs dans les PPESVR, nouveaux dispositifs d'épargne salariale pour la retraite ? Les régimes à cotisations définies, connus aussi sous le nom d'article 83 (du code général des impôts), permettront-ils des versements volontaires au-delà des cotisations employeur et salarié, et sous quelles conditions ? Le PERP, plan d'épargne retraite individuel, pourra-t-il aussi être proposé dans le cadre de l'entreprise ?

De quoi seront faites les retraites

En attendant que ces questions soient tranchées, l'examen des outils proposés par le gouvernement permet tout de même de commencer à imaginer de quoi seront faites les retraites des salariés. Au coeur des dispositifs d'entreprise pourraient se trouver le PPESVR ou le régime à cotisations définies. Le premier doit faire entrer l'épargne salariale dans l'univers des produits de retraite, avec sa sortie en rente, même si une sortie en capital sera possible, et des cas de déblocage anticipé réduits par rapport aux anciens PPESV. Le cadre fiscal et social demeure celui de l'épargne salariale, probablement le plus favorable actuellement. « L'intérêt pour les entreprises, en particulier internationales, est qu'il permet de responsabiliser individuellement les salariés, en abondant leurs versements », indique Jocelyne Neto, consultante benefits chez Watson Wyatt. Mais il faudra sans doute que cet abondement soit suffisamment conséquent pour faire avaler une telle durée de blocage.

Epargner mieux

« La prise de conscience sur les produits de retraite devrait se faire progressivement, estime Pierre Schereck, directeur commercial épargne entreprise chez Crédit Lyonnais Asset Management. Il ne s'agit pas tant d'épargner plus - le taux d'épargne est déjà extrêmement important en France - mais de le faire dans les meilleures conditions possibles. »

En attendant, les consultants spécialisés semblent recenser une plus forte curiosité des entreprises sur les régimes à cotisations définies. « L'article 83 pourrait devenir un socle de la capitalisation en entreprise », selon Gilbert Gurcel, membre du directoire d'Arial, filiale commune de la Mondiale et d'AG2R, qui voit bien un couplage entre ce régime collectif et un complément individuel à travers un PERP.

Large palette d'outils

Régime à cotisations définies, PPESVR, mais aussi régimes à prestations définies et PERP : la palette des outils est devenue large, avec des régimes fiscaux bien précis et différents, pour l'entreprise et pour le bénéficiaire, à l'entrée et à la sortie. Les entreprises auront à les architecturer en fonction des objectifs qu'elles veulent s'assigner en matière de retraite des salariés et de rémunérations globales.

Et d'ailleurs, la plupart des groupes importants n'ont pas attendu la loi, ni même le débat sur le sujet pour proposer leurs solutions. Des groupes comme PSA Peugeot Citroën, Siemens, Coca-Cola, Lilly France ou Michelin ont mis en oeuvre, depuis des années, des dispositifs mêlant des retraites surcomplémentaires, catégorielles ou pas, et de l'épargne salariale longue, en fonction de la demande du corps social et des objectifs de fidélisation et d'attractivité qu'ils poursuivent (lire p. 20 et 21). Avec, bien souvent des solutions originales et en avance sur la réforme, qu'il s'agisse, par exemple, du PEP de PSA, un PEE bloqué sur quarante ans, ou du régime à cotisations définies de Siemens, qui dispose d'un conseil de surveillance faisant place aux représentants des salariés, tout comme un fonds d'épargne salariale, et propose une gestion générationnelle.

Différenciation compétitive

Au même titre que l'épargne salariale, on peut bien imaginer, en effet, que le dispositif d'épargne retraite proposé par l'entreprise devienne un des éléments de différenciation compétitive en matière sociale. Avec le risque d'une nouvelle fracture entre les groupes et les PME.

« D'autres entreprises restent peu concernées par la retraite, souligne Françoise Kleinbauer, directrice générale du cabinet d'actuaires Adding. Néanmoins, de plus en plus de DRH et de directeurs financiers commencent à envisager la retraite non plus seulement en termes de "coût", mais aussi comme un réel "investissement", intégré dans la politique de rémunération globale proposée aux salariés».

Communication impérative

Autre évolution, la nécessité de communiquer sur la retraite, inscrite noir sur blanc dans la loi, et le rapprochement entre une épargne individuelle privée et celle réalisée dans le cadre professionnel. Car le projet de loi de finance intègre un plafond de déductibilité fiscale pour les produits d'entreprise (régime à cotisations définies et abondement au PPESVR) dans une enveloppe plus large permettant aux particuliers un maximum de 23 500 euros de déduction par an. Place à la pédagogie, objectif à peu près unanime dans les entreprises pour l'année 2004.

L'essentiel

1 Avec la réforme du financement des retraites, la réflexion des entreprises sur ce qu'elles doivent ou non offrir à leurs salariés va s'accroître.

2 Les produits de retraites pourraient favoriser l'attractivité des entreprises. Les PPESVR, plans d'épargne à très long terme, et les régimes à cotisations définies (art. 83) sont regardés à la loupe.

3 L'architecture des systèmes de retraites d'entreprise est déjà imaginable, et beaucoup d'entre elles ont devancé la loi. Mais, pour l'heure, les DRH comme les partenaires sociaux attendent les décrets.