L' Intranet d'Or au groupe Danone, deux mentions spéciales décernées, l'une aux Brasseries Heineken et l'autre à La Croix-Rouge française, tel est le palmarès 2003 de la sixième édition de l'Intranet d'Or, une manifestation coorganisée par la Cegos et Entreprise & Carrières. Tel a été, en tout cas, le verdict des onze membres du jury (1), réunis le 10 septembre dernier, au siège d'Air Liquide (vainqueur de l'édition précédente).

Ceux-ci ont été amenés à trancher entre 36 dossiers (un record !), émanant de candidats aux profils variés : 25 entreprises appartenant au secteur privé, 4 administrations ou établissements du secteur public (Cram, musées, Administration), 3 organismes consulaires (chambre de commerce, chambre des métiers, collecteur de fonds), 3 associations (humanitaire, regroupement d'entreprises) et, pour la première fois, une organisation syndicale.

Les outils présentés couvrent des périmètres allant de moins de 100 personnes à plus de 12 000, pour des coûts de réalisation compris entre 12 000 euros et 5 millions d'euros, et une durée moyenne de développement d'environ six mois. Autre enseignement : les intranets ne sont plus la chasse gardée d'une seule personne, les initiateurs de ces projets relevant de directions très diverses (DSI, DRH, DAF, direction commerciale...). Ils visent aussi des populations de plus en plus variées : toutes les couches socioprofessionnelles (ouvriers, Etam, cadres, et ce, quelle que soit leur fonction dans l'entreprise) sont représentées dans les dossiers de candidature. L'ouverture, par exemple, des intranets aux opérateurs, est favorisée par l'utilisation des bornes interactives, qui se généralise. A l'image des Brasseries Heineken qui ont équipé en bornes leurs trois sites de production.

En outre, l'ajout de solutions extranet permet aux intranets de toucher de nouvelles cibles, telles que les adhérents d'une association. Enfin, note la Cegos, l'apparition d'interface web autour d'applications standards du marché (SIRH couplé à un ERP) facilite leur utilisation et améliore leur ergonomie.

Côté fonctionnalités, 16 dossiers occupent le champ des intranets de type corporate ; 8 sont de purs intranets RH ; 5 sont des outils favorisant le partage des bonnes pratiques et le travail collaboratif ; 3 sont consacrés à l'animation de réseaux ; 2 relèvent directement de la fonction communication ; et un dossier est relatif à la gestion de la formation.

Quant au e-learning, il n'intéresse qu'un seul intranet, celui mis en place par la direction générale technique de L'Oréal. Faut-il, pour autant, y voir l'échec d'un mode d'apprentissage auquel l'on promettait un avenir radieux ? « Deux interprétations sont possibles, souligne Michel Kalika, directeur de l'executive MBA et du DEA e-management à l'université Paris-Dauphine. L'une, très négative, reviendrait à affirmer que l'e-learning n'était finalement qu'un effet d'annonce. L'autre analyse, celle que je préconise, se fonde sur la complexité de la démarche. » Sa conclusion : « Les bénéfices du e-learning sont très longs à apparaître. » Partie remise, donc !

Autre surprise : la faible présence d'intranets portés sur le knowledge management (KM). Un sujet qui, l'an dernier, avait valu au groupe Arcelor une mention spéciale pour son outil de gestion et de transmission des savoirs. Apparemment, les enjeux du KM (gestion des départs massifs, déperdition des connaissances, optimisation de la productivité, innovation, etc.) ne semblent plus peser lourd face aux contraintes de coût et de temps qu'engendrent de telles applications.

Les entreprises, en tout cas celles qui n'ont jamais approché le knowledge management, ont-elles sans doute préféré miser sur des outils de travail collaboratif et d'animation de réseaux. C'est le sentiment d'Eric Thoilliez, consultant à la Cegos et chef de projet Intranet d'Or (voir l'interview p. 19) : « Les intranets de gestion des connaissances réclament une certaine maturité. Les sociétés souhaitent plutôt bénéficier d'outils de partage des bonnes pratiques rapidement opérationnels et dont les retours sur investissement sont facilement identifiables. »

Les intranets jouent aussi, de plus en plus, un rôle fédérateur au sein des organisations. Outre le site de La Croix-Rouge française, l'exemple le plus frappant est peut-être celui développé par ElcoBrandt, une entreprise née en janvier 2002 suite à la reprise, par l'israélien Elco, d'une partie des actifs du groupe Brandt-Moulinex.

« Les entreprises assignent à leur intranet une mission d'intégration organisationnelle », confirme Michel Kalika. Intégration, également, des organisations syndicales : cinq entreprises ont signalé la présence d'un espace leur étant réservé, contre une seule lors de l'édition 2002. Par ailleurs, pour la première fois, un syndicat, la CFE-CGC, postulait à l'Intranet d'Or, pour un outil appelé à améliorer l'interactivité entre la confédération et ses adhérents.

Effet de mode ou véritable instrument de pilotage, le jury n'a pas hésité longtemps avant de décerner l'Intranet d'Or à Danone pour son site Danone Way, entièrement consacré au développement durable et à la responsabilité sociale, des problématiques qui apparaissent pour la première fois dans les dossiers de candidature depuis l'organisation de ce palmarès, en 1998.