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COMMENT RENDRE CES FILIERES PLUS ATTRACTIVES ?

SANS | publié le : 07.10.2003 |

Rémunération au rabais, horaires contraignants, absence de perspectives de carrière... Plusieurs filières professionnelles, comme le BTP, l'hôtellerie-restauration, la grande distribution, le transport ou encore le secteur des services à la personne, cumulent les handicaps pour recruter. Une seule possibilité : devenir rapidement attractifs pour éviter la concurrence à l'heure du choc démographique...

Des bouchers, des maçons, des routiers, des serveurs... Autant de profils que recherchent désespérément la distribution, le BTP, le transport logistique, l'hôtellerie-restauration... Au total, 56 % des chefs d'entreprise déclarent avoir des difficultés à recruter, selon une enquête Unedic/Credoc, publiée en août dernier. Les tensions sont encore plus vives dans le bâtiment : 78 % des DRH interrogés peinent à embaucher.

La canicule a également révélé une inquiétante pénurie de personnel dans les maisons de retraite et dans le secteur de l'aide à domicile. Les hôpitaux manquent à la fois d'urgentistes et de personnel paramédical. Le déficit d'infirmières s'élèverait à 10 000, voire 15 000 personnes. Le problème est encore plus criant dans les maisons de retraite. D'après Hubert Falco, le secrétaire d'Etat aux Personnes âgées, 80 % des structures d'hébergement de personnes âgées sont en sous-effectif...

Pénuries à venir

Paradoxe : le taux de chômage s'affole et le fossé se creuse entre demandeurs d'emploi et recruteurs. Certes, le phénomène n'est pas nouveau, mais ces difficultés ne sont qu'un avant-goût des pénuries à venir. Les entreprises ont donc tout intérêt à anticiper. Car, pour Claude Seibel, qui a présidé le groupe des métiers et des qualifications, auteur du rapport Avenirs des métiers (1), la démographie ne viendra pas au secours des emplois mal-aimés. « Les secteurs traditionnellement sujets aux problèmes de pénurie s'exposent à être désertés si les tensions deviennent plus vives. Ils ont donc tout intérêt à s'efforcer d'améliorer l'attractivité des emplois qu'ils proposent. »

Malheureusement, la perspective de faire carrière dans ces métiers n'enthousiasme guère les jeunes. Dévalorisés par le système scolaire qui privilégie la filière générale, touchés par des horaires pénibles et des conditions de travail plus contraignantes que la moyenne, ces métiers cumulent des handicaps.

Précarisation croissante

D'après une enquête réalisée par la fédération services CFDT (2), auprès de 5 512 salariés des branches hôtellerie-tourisme-restauration, propreté, commerces et services aux entreprises, en juin dernier, la précarisation de leur vie professionnelle est croissante, avec la multiplication des temps partiels ; 31 % des sondés affirment rencontrer des difficultés financières. Mais, au-delà des salaires, c'est aussi l'absence de gestion de carrière qui est en cause : 29,4 % des personnes interrogées estiment que les évolutions de carrière se décrètent à "la tête du client" et 64 % d'entre elles considèrent être victimes d'une indifférence totale.

Comment ces filières vont-elles s'en sortir ? La plupart des fédérations professionnelles refusent de verser dans le catastrophisme. Pour susciter de nouvelles vocations, leur nouveau credo, c'est la mobilité, l'évolution de carrière ou encore la formation continue. Mais, pour parvenir à leurs fins, elles doivent aussi être plus regardantes sur les moyens utilisés. Les DRH savent, en dépit d'une conjoncture morose, qu'une gestion du personnel à court terme pourrait être contre-productive.

Validation des acquis

Quelques initiatives ont, ainsi, été amorcées. Dans le secteur de l'aide à domicile, par exemple, l'Unassad (Union nationale des associations de soins et de services à domicile) a misé sur la validation des acquis de l'expérience pour qualifier le personnel, afin de professionnaliser la filière, l'objectif étant d'atteindre 80 % de salariés qualifiés dans les dix prochaines années. L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), qui regroupe 39 centres hospitaliers en Ile-de-France, a, de son côté, lancé un plan d'attractivité et de fidélisation, pour la période 2002-2004, en actionnant tous les leviers : intégration, gestion de carrière, conditions de travail, aides financières.

Plan pour l'emploi

La Fédération du bâtiment, consciente de l'enjeu, a initié, en 2000, un Plan pour l'emploi, constitué de conventions avec des partenaires institutionnels (ANPE, Afpa, ministères de l'Education et de l'Equipement). Elle a également favorisé l'accompagnement des nouvelles recrues dans le cadre des contrats jeunes en entreprise.

Dans le transport également, les avancées sont importantes : la durée hebdomadaire du travail a diminué de dix heures, en moyenne, et les minima conventionnels ont augmenté de 20 % à la suite du conflit des routiers de 1996.

Mais toutes les branches n'en sont pas là. Ainsi, la distribution n'a pas pris de mesures globales, les initiatives émanant surtout des grands groupes, Auchan ou Casino. Aucune solution efficace ne permet encore de pallier les problèmes structurels de pénurie. Les hôteliers peinent toujours à fidéliser, 50 % des recrues partent deux ans après leur intégration. Selon l'Observatoire des hommes et des organisations (Lab'ho) d'Adecco, qui a décortiqué les pratiques RH de ce secteur (3), la profession manque visiblement d'une vraie politique, qui prenne en compte la formation et l'évolution professionnelle des candidats.

Opérations de charme

Pour relever le défi, ces filières doivent aussi apprendre à vendre leurs métiers. En clair, à se montrer plus offensives pour persuader les jeunes de l'intérêt de ces carrières. Ce n'est donc pas un hasard si la Fédération française du bâtiment a organisé, en juin dernier, une journée portes ouvertes sur 500 chantiers, baptisée "Les coulisses du bâtiment", afin de faire découvrir les perspectives de carrière que le secteur peut offrir. De son côté, la plasturgie a lancé l'opération "Destination plasturgie", une plate-forme mobile qui sillonne la France pour présenter aux jeunes des démonstrations sur des machines-outils. Des opérations de charme, en somme, pour attirer des prétendants jusqu'ici réticents.

(1) Avenirs des métiers, Commissariat général du Plan, novembre 2002.

(2) Dans le cadre d'un programme d'enquête "Le travail en questions".

(3) Manager pour faire recette, janvier 2003, étude sectorielle réalisée par Pascale Levet et Emmanuelle Saint-Genis.

L'essentiel

1 Selon une enquête Unedic/Credoc, publiée en août dernier, 56 % des chefs d'entreprise déclarent avoir des difficultés à recruter. Ces tensions se ressentent surtout dans l'hôtellerie-restauration, le BTP, la grande distribution, le transport ou encore le secteur sanitaire et social.

2 Pour susciter de nouvelles vocations, les branches professionnelles misent sur la mobilité, la formation et les évolutions de carrière.

3 Dans le BTP et les transports, plusieurs initiatives ont été prises, mais toutes les filières n'ont pas pris la mesure du problème : dans l'hôtellerie-restauration, 50 % des recrues partent deux ans après leur intégration.

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