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SANS

Pâques aux tisons, août au charbon

SANS | publié le : 02.09.2003 |

Ambiance de western spaghetti, avec bourdonnement de mouches, trottoir désert, ciel bleu marine. Le thermomètre est à deux doigts d'exploser.

Tous les volets de l'immeuble sont clos, le magasin d'en face a retardé son heure d'ouverture en soirée, pour tenter de trouver un peu de fraîcheur. Personne dehors, pas un bruit. La ville est abandonnée, fantomatique. Un chat vient de se faufiler dans l'ombre de la cour, seul dans sa recherche désespérée d'un endroit de fraîcheur. Le rideau blanc de la voisine du dessus ne frémit même plus. Tout est figé. On attend une pluie improbable.

Le nez dans le climatiseur, volets tirés, j'attends que ça se passe.

Sonnerie de téléphone, modèle de bureau, juste en dessous. Tiens, on décroche. J'entends parler sans comprendre. Il y a donc quelqu'un dans l'entreprise du rez-de-chaussée ? Qui travaille en plein mois d'août, par une chaleur pareille ?

Supplément d'enquête.

Je descends, glisse la tête dans la porte entrebâillée, à la recherche d'un éventuel survivant, d'une âme humaine réchappée comme moi de la fuite aoûtienne, de la ruée sur les plages, et de la tyrannie anticyclonique.

Incroyable. Frais comme un premier communiant, le pli de pantalon impeccable et la chemise repassée, il pianote sur son ordinateur, travaille comme si de rien n'était, comme avant, dans une vie presque lointaine maintenant, quand la température et l'ambiance générale nous incitaient à aller au bureau faire normalement notre travail en ronronnant de temps en temps de plaisir et avec toute l'efficacité souhaitée. (Pour ceux qui l'ont oublié, je parle là d'une époque pas si lointaine, où l'on trouvait normal qu'il fasse chaud l'été et où travailler toute la semaine relevait d'une ardente nécessité...)

Bref, je tombe sur un archéo, ou alors est-ce l'un de ces "work-maniaques" qui polluent la vie de leur famille et culpabilisent leur entourage professionnel en n'arrêtant jamais de travailler quelles que soient les conditions climatiques extérieures ?

« Moi, courageux ? Pas du tout. Je rattrape mes dossiers en retard et j'essaie de tenir les promesses faites à mes clients. Au stade où j'en suis, je n'ai même pas besoin de courage. Juste la nécessité vitale. Non, je ne vois rien là d'extraordinaire. Bon, d'accord, il fait un peu chaud. Et alors, c'est l'été, non ? Quand il faisait un froid de canard, à Pâques, tout le monde se plaignait. Moi, je vais vous dire un truc, je suis comme tout le monde : pour l'interdiction de la pluie les week-ends, contre la chute des cheveux, et pour la baisse des impôts. Et en attendant que les poules aient des dents et que la température soit idéale, je bosse au lieu de râler. Pas question de caler mon humeur sur la météo. Trop aléatoire. »

Belle leçon !