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« Nous devons rendre le droit du travail plus efficace et plus sûr »

SANS | publié le : 08.07.2003 |

Devenu, au fil du temps, un véritable mille-feuille, le Code du travail renferme des dispositions jugées trop inadaptées, voire obsolètes. Les pistes de réforme du droit du travail favoriseraient le développement du droit conventionnel.

E & C : François Fillon, ministre des Affaires sociales, vous a confié une mission en lien avec le droit du travail. De quoi s'agit-il ?

Michel de Virville : François Fillon souhaite engager une réflexion visant à accroître l'efficacité du droit du travail. A cette fin, il m'a demandé de constituer une commission composée d'une douzaine de praticiens d'entreprise et d'experts du droit*. Elle est en place depuis le mois de juin. Nous allons nous réunir jusqu'en décembre, mois durant lequel le ministre attend notre rapport et nos différentes propositions destinées à être étudiées par la Commission nationale de la négociation collective.

E & C : Quels sont les problèmes qui se posent, aujourd'hui, dans le droit du travail et qui motivent la mise en place d'une réflexion de fond ?

M. d. V. : Trois sources alimentent le droit du travail. Il y a le Parlement, tout d'abord, qui légifère. Les partenaires sociaux, ensuite, négocient et produisent de nombreux accords et conventions collectives. Enfin, les tribunaux sont amenés à compléter et à enrichir les dispositions précédentes, du fait de la jurisprudence. Ces différents acteurs se corrigent mutuellement. Si certains changements se révèlent nécessaires du fait des nouvelles réalités qui apparaissent dans le monde du travail et dans les environnements professionnels, d'autres sont, en revanche, superflus. Il est donc essentiel d'enrayer cette inflation et de parvenir à une régulation du système, afin de le rendre plus efficace, moins compliqué, moins abondant et moins mouvant. Trop de textes nuit, en effet, à la sécurité du texte.

Par ailleurs, nous constatons que certaines règles de droit multiplient les obligations et vont très loin dans le détail. Elles imposent un formalisme et une rigidité tels qu'elles butent contre les réalités du terrain.

E & C : Quel est votre cahier des charges ?

M. d. V. : Il est nécessaire, tout d'abord, d'identifier les principales dispositions perçues par les utilisateurs comme étant inadaptées, imprécises, complexes ou encore obsolètes. A priori, tous les champs du Code sont potentiellement concernés, qu'il s'agisse de la formation, du licenciement, du contrat de travail ou encore de la représentation des personnels. Reste à avancer différentes orientations susceptibles de rendre plus sûr ce droit du travail, avec l'idée qu'il est possible d'aboutir à un tel résultat sans pour autant que cela se fasse aux dépens des garanties données aux entreprises et aux salariés.

Ensuite, il nous faut faire des propositions pour mieux réguler cette production de textes. En la matière, François Fillon attend que nous étudiions les pistes favorisant le développement du droit conventionnel. Autrement dit, comment parvenir à ce que davantage de problèmes se règlent par la voie de la négociation collective plutôt que par la loi. Et ce, à tous les niveaux : interprofessionnel, branches et entreprises. Toutefois, notre approche n'est pas de réécrire le Code du travail, mais de nous concentrer sur certains points noirs. Je pense que les partenaires sociaux et les membres de la commission, eux-mêmes, ont leur idée sur les sujets à mettre en chantier. Il s'agira, alors, de les faire converger.

E & C : Quelle est votre approche du sujet ?

M. d. V. : Ma conviction est qu'il est possible de garder un même niveau de sécurité et de protection des salariés et des entreprises, avec plus d'efficacité.

En effet, l'efficacité et la sécurité ne s'opposent pas. Sinon, multiplier les règles met en danger l'emploi. Selon moi, un bon Code du travail produira davantage d'emploi.

E & C : Quel avenir va être donné au rapport de la commission ?

M. d. V. : J'espère que le travail que nous aurons fourni sera suffisamment stimulant et suffisamment accepté pour que la Commission nationale de la négociation collective s'en saisisse. Je serai, par ailleurs, satisfait si nous parvenons à trouver les solutions capables de tendre vers toujours plus de négociations et de maîtriser cette complexification du droit.

Ensuite, l'initiative reviendra au gouvernement et aux partenaires sociaux, qui peuvent soumettre nos propositions au débat afin de moderniser le Code du travail.

* Parmi eux : Pr Paul-Henri Antonmattei, les avocats Gilles Belier et Hubert Flichy, Pierre Lanquetin, ancien conseiller à la chambre sociale de la Cour de cassation, Sylvain Breuzard, président du Centre des jeunes dirigeants d'entreprise, Anne de Ravanan, responsable juridique de la DRH de Thales.

SES LECTURES

Dune, de Franck Herbert, Pocket 2001, tome I et II.

- Oscar et la dame en rose, de Eric-Emmanuel Schmitt, Albin Michel 2002.

- Pars vite et reviens tard, de Fred Vargas, Editions V. Hamy, Collection Chemins nocturnes, 2002.

PARCOURS

En 1968, Michel de Virville est entré comme ingénieur de recherche au CNRS. A partir de 1984, il a été chargé de mission dans plusieurs cabinets ministériels avant d'être nommé directeur du cabinet du ministre du Travail, Jean-Pierre Soisson, en 1988, puis conseiller maître à la Cour des comptes en 1991.

Il a rejoint Renault, en 1993, comme secrétaire général du groupe. Cinq ans plus tard, il occupe la fonction de directeur des ressources humaines. Il est, aujourd'hui, membre du comité exécutif du constructeur automobile.

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