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La création d'emplois comme projet d'entreprise

SANS | publié le : 24.06.2003 |

En février 2001, un jeune créateur d'entreprise reprenait, près de Lens (62), une entreprise de tri de courrier, avec un objectif social : créer des emplois pour des personnes non qualifiées. Deux ans après, le bilan est positif.

Quand un repreneur s'intéresse à une entreprise, il cherche d'abord à s'assurer de sa viabilité économique et sacrifie souvent une partie du personnel. Lorsque Xavier Labbe a repris, en février 2001, à Loos-en-Gohelle (62), Publitri, une société de regroupement et de tri de courrier publicitaire en liquidation, ce sont la sauvegarde et la création d'emplois qui ont constitué sa principale motivation.

Activité accessible aux femmes

Ce jeune ingénieur avait, en effet, une mission, en tant que porteur de projet d'une association d'insertion de Lens : trouver une activité créatrice d'emplois pour des personnes peu qualifiées et, plus précisément, pour des femmes. « L'association avait déjà contribué à la création de deux entreprises d'insertion, mais dans des métiers plutôt masculins, le transport et la fonderie. Il fallait donc trouver une activité plus accessible aux femmes. La société Publitri correspondait pleinement à ce que je cherchais. »

Xavier Labbe a dû donner à l'entreprise un statut de SA, car la reprise de personnel ne peut pas se faire - paradoxalement - dans le cadre d'une entreprise d'insertion. Il n'a donc pas bénéficié des subventions par poste de la direction départementale du travail. En revanche, son projet a séduit Artois-Entreprendre et France Active, qui lui ont accordé un prêt d'honneur et un prêt à taux réduit. Il a aussi reçu une subvention du conseil régional Nord-Pas-de-Calais.

De bons résultats

Xavier Labbe est, donc, actionnaire majoritaire, avec sa famille, de cette société rebaptisée Equipact. Ses clients sont des routeurs. Equipact reçoit l'ensemble de leurs mailings, les regroupe par codes postaux et les conditionne selon les normes de La Poste. L'autre grand client est, justement, La Poste, qui rémunère la prestation de tri à partir de 30 millions de plis traités par an. « C'est un travail assez dur, qui exige une certaine productivité », admet le jeune patron. Un travail également répétitif, mais qui, pour une grande partie du personnel, peut constituer une pause après des années de galère.

Toutes les personnes embauchées le sont en CDI et sont rémunérées au Smic, avec un treizième mois. Equipact fait également appel à des intérimaires d'une ETTI (entreprise de travail temporaire d'insertion), car l'activité connaît beaucoup d'à-coups. En 2002, les salariées ont reçu une prime équivalant à un demi-mois de salaire, en récompense des bons résultats.

Deux ans après sa reprise, la société affiche des résultats dépassant les prévisions : les 100 millions de plis ont été atteints en 2002, alors qu'il était prévu d'obtenir ce chiffre en trois à quatre ans, et le chiffre d'affaires a progressé de 30 %. De bons résultats qui ont permis de recruter : Equipact compte, aujourd'hui, 33 salariées, contre 14 en 2001. Les locaux sont même devenus trop exigus. Xavier Labbe envisage de faire construire une nouvelle usine pour augmenter encore la production et embaucher davantage.

Plus de transparence

Pour la déléguée du personnel, Audrey Vanez, le changement le plus remarquable apporté par la nouvelle direction réside dans la proximité du management et l'apport d'informations. « Avant, on ne savait rien. Aujourd'hui, on a l'impression que tout est ouvert et transparent. Chaque mois, on fait le point avec Xavier Labbe sur les résultats de la société, le fonctionnement, l'ambiance de travail. La formation au poste est passée de dix minutes à une semaine. Une ergonome est venue étudier nos conditions de travail, car beaucoup d'entre nous ont mal au dos. Il y a un bon suivi. »

La nouvelle vocation sociale de l'entreprise n'est pourtant pas de tout repos pour les opératrices : parmi les nouvelles, se trouvent souvent des personnes éloignées depuis très longtemps de l'emploi. « Elles ont pour elles l'envie de travailler, mais il faut passer beaucoup plus de temps à leur expliquer le travail et faire preuve de patience. C'est une tâche de longue haleine », souligne la déléguée du personnel.

Reste que les possibilités d'évolution n'existent guère. Xavier Labbe en est conscient. Il estime qu'un tiers des salariées pourraient progresser moyennant une formation. Aussi encourage-t-il les demandes de formation individuelles et informe sur les possibilités offertes par le Fongecif (Fonds de gestion des congés individuels de formation), aidant certaines salariées à constituer leur dossier.

Entrepreneur "social", Xavier Labbe n'a pas le sentiment d'être un cas unique : « Je rencontre beaucoup de gens qui se posent des questions sur le travail, qui en ont marre d'être des numéros et veulent renouer avec les responsabilités. J'ai été guidé, certes, par un souci social, mais aussi par la volonté de faire quelque chose de concret. J'ai eu la chance de pouvoir concilier les deux. »

EQUIPACT

Activité : regroupement et tri de courrier publicitaire.

Statut : S.A. au capital de 88 330 euros.

Effectifs : 33 salariés.

Chiffre d'affaires 2003 : 2 millions d'euros.