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Quand les entreprises aident les femmes cadres

SANS | publié le : 03.06.2003 |

Une enquête, rendue publique le 3 juin par Accenture et Grandes écoles au féminin, montre l'importance prise par les programmes de promotion des femmes cadres dans les grandes entreprises françaises. La plupart des actions se résument, cependant, à aider à la conciliation entre responsabilités professionnelles et familiales.

«Au point de départ de cette enquête* se trouvent les résul- tats d'études menées par plusieurs grandes écoles auprès de leurs diplômées, souligne Véronique Préaux, responsable du groupement Grandes écoles au féminin (GEF, lire encadré page ci-contre). Si les femmes représentent, aujourd'hui, 50 % des diplômés des grandes écoles de gestion et 15 % des diplômés d'écoles d'ingénieurs, et si la majorité d'entre elles travaillent à temps plein et se disent ambitieuses, elles sont, cependant, nombreuses à pointer la difficulté d'avoir une réussite globale, la vie familiale étant, en effet, vécue comme un frein, à l'inverse des hommes, qui y voient un soutien. » C'est pourquoi GEF a voulu, en partenariat avec le cabinet de conseil Accenture, en savoir plus sur la place des femmes dans les grandes entreprises françaises et les actions menées pour améliorer l'accès des femmes aux postes de management.

Premiers résultats

Les entreprises interrogées comptent, en moyenne, 30 % de femmes cadres (26 % au niveau national), 14 % de femmes au comité de direction (7 % au national) et 10 % au comité exécutif. « Les répondants font donc mieux que la moyenne des entreprises françaises, commente Sylvie Ouziel, associée chez Accenture, qui a supervisé l'enquête. Nous avons écarté un éventuel biais de sélection, dans la mesure où, parmi les entreprises répondantes, sont apparus des "militants de l'inaction", tandis que certaines entreprises, qui n'ont pas répondu au questionnaire, sont notoirement très actives dans le domaine de l'équité hommes-femmes. » Cependant, les répondants reconnaissent unanimement (93 %) qu'il existe des freins à la carrière des femmes. Elles souffrent, notamment, des a priori sur leurs supposées « moindre disponibilité » et « moindre mobilité ».

Malgré tout, seules 70 % des entreprises interrogées en ont fait un sujet de réflexion. Les 30 % qui refusent de s'en préoccuper se fondent, pour 78 % d'entre elles, sur un principe d'égalité de traitement, mais 50 % estiment que la situation des femmes est satisfaisante !

Opportunités managériales

A l'inverse, celles qui ont décidé de réfléchir au problème le font essentiellement pour des raisons d'opportunités managériales (style de management ou créativité complémentaires), et pour respecter le principe d'égalité. Elles ne sont, en revanche, que 54 %, 53 % et 51 % à évoquer des préoccupations d'image, une réponse à la féminisation de la clientèle, et l'anticipation du papy-boom ; 80 % d'entre elles ont, cependant, dépassé le stade de la réflexion et mettent en place (ou projettent de le faire) des actions visant, dans 73 % des cas, à accroître le pourcentage de femmes dans les instances dirigeantes, ou, dans 47 % des cas, à augmenter la part de femmes cadres.

Accenture et GEF ont cherché à en savoir plus sur le contenu de ces programmes "femmes". « Les actions qu'on retrouve le plus souvent sont la sensibilisation des équipes dirigeantes, car l'exemple doit venir d'en haut, et la mise en place d'une flexibilité de l'organisation du travail, souligne Sylvie Ouziel. Viennent ensuite la facilitation du quotidien, la prise en compte des cycles différenciés de carrière, la réflexion sur les systèmes d'évaluation et de rémunération. » Celles-ci peuvent ainsi être classées en trois grandes familles d'actions :

- celles qui facilitent le quotidien, pour répondre, notamment, au problème de la double journée : services, flexibilité du temps de travail, actions autour du départ et du retour de congé maternité (54 % des actions) ;

- celles qui permettent aux femmes de gérer leur carrière : insertion dans les réseaux de l'entreprise, mise en réseau, coaching et parrainage (25 %) ;

- celles qui visent à faire évoluer les règles du jeu dans un sens plus favorable aux femmes : reconsidération des systèmes d'évaluation et de rémunération, prise en compte des cycles différenciés de carrière (21 %).

"Se battre à égalité"

Le deuxième type d'actions a pour objectif d'équiper les femmes, qui ont tendance à faire moins d'autopromotion et à être moins insérées dans les réseaux, pour leur permettre de se "battre à égalité" avec leurs collègues masculins. La Société générale propose, ainsi, du coaching aux femmes à haut potentiel pour les aider à décoder les "parcours initiatiques" qui mènent aux plus hautes responsabilités. A l'inverse, la troisième catégorie d'actions vise à faire évoluer les règles du jeu de l'entreprise. « Il s'agit, par exemple, de s'interroger sur l'âge auquel on repère les hauts potentiels - si c'est 30-35 ans, cela correspond à l'âge des maternités -, ou sur la nécessité d'une expérience d'expatriation pour accéder à des responsabilités », explique Sylvie Ouziel. Pour elle, ces deux types d'actions sont à la fois des étapes successives et complémentaires : « Le networking de femmes et le dialogue entre les équipes dirigeantes et les femmes peuvent faire découvrir au top management les problématiques liées à la "gender diversity", puis les inciter à travailler sur les mécanismes discriminants, et donc à faire évoluer les règles du jeu. »

Ralentissement

Au final, même s'ils doivent souvent se fondre dans des projets plus larges de "promotion de la diversité" pour éviter le rejet, les programmes de promotion des carrières féminines semblent porter leurs fruits. Cependant, regrette Sylvie Ouziel, « chaque année, le nombre de programmes nouveaux se réduit. Peut-être s'agit-il seulement d'un "innovation gap", la majorité des entreprises attendant de voir les résultats avant de se lancer à leur tour... » ?

* Menée entre décembre 2002 et mars 2003, auprès de 300 premières entreprises françaises (selon le chiffre d'affaires 2001) ; 54 y ont répondu. Dix entretiens qualitatifs ont été réalisés.

L'essentiel

1 Grandes écoles au féminin s'est associé à Accenture pour réaliser une enquête sur la situation des femmes cadres dans les grandes entreprises françaises.

2 93 % des entreprises reconnaissent l'existence de freins aux carrières féminines ; 70 % ont engagé une réflexion sur le problème, et, parmi elles, 80 % ont décidé ou envisagent des mesures correctives.

3 54 % des actions visent à faciliter le quotidien des salariées ; 25 % ont pour objectif de les outiller pour un pilotage de carrière plus proactif, et 21 % visent à modifier les règles de gestion de carrière.

Grandes écoles au féminin

Créé début 2002 par huit associations d'anciens de grandes écoles (ECP, ENA, ESCP, Essec, HEC, Insead, Mines, Sciences po et X), le groupement Grandes écoles au féminin (GEF) a pour objectif de dresser un bilan, trente ans après l'entrée des femmes dans ces écoles.

Parmi les premières actions mises en oeuvre, la synthèse de quatre enquêtes réalisées par HEC, l'Insead, l'Essec et l'Ena auprès des leurs diplômées, et le partenariat avec Accenture pour réaliser cette enquête sur la situation des femmes cadres dans les grandes entreprises françaises.

« Au-delà de cette base de départ, nous souhaitons continuer à suivre les initiatives des entreprises en faveur des carrières féminines, dans le cadre d'un observatoire qui fera un bilan tous les deux ans, précise Véronique Préaux, responsable de GEF. Nous voulons également réaliser une étude approfondie auprès des diplômées des huit écoles à l'initiative de GEF, afin de comparer leur regard à celui des DRH. »

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