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Assouplir ou durcir la loi ?

SANS | publié le : 20.05.2003 |

La loi de 1987, qui fait obligation aux entreprises de plus de 20 salariés d'embaucher 6 % de travailleurs handicapés, fait débat. Certains veulent la durcir, d'autres la supprimer.

I névitablement, la loi de 1987, qui donne obligation aux entreprises de plus de 20 salariés d'embaucher 6 % de travailleurs handicapés, fait débat. Le Medef, qui siège au conseil d'administration de l'Agefiph (Association de gestion des fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées), organisme paritaire chargé de collecter et d'utiliser les versements des entreprises qui s'exonèrent ainsi d'embaucher des personnes handicapées, verrait bien une suppression pure et simple de la loi.

A l'inverse, les confédérations syndicales, siégeant également à l'Agefiph, ont une autre lecture. Elles veulent, selon leur sensibilité respective, plus ou moins durcir la loi, mais, en tout cas, souhaitent son maintien. Si la loi de 1987 n'avait pas été créée, le niveau d'emploi des personnes handicapées dans les entreprises ordinaires ne serait même pas de 4 %, estiment-elles.

Une liste de 30 métiers

De son côté, la Fédération nationale des accidentés du travail et des handicapés (Fnath), qui siège également au conseil de l'Agefiph, souhaite un durcissement de la loi, via, notamment, la suppression de la liste des 30 métiers qui y échappent. « Aujourd'hui encore, cette liste sert à atténuer l'obligation d'emploi qui pèse sur les entreprises, ce qui constitue une véritable discrimination », accuse Marcel Royez, secrétaire général de la Fnath.

Evolution technique

Claudie Buisson, directrice, depuis huit mois, de l'Agefiph, constate « que l'exclusion de ces métiers de la loi de 1987 n'est, aujourd'hui, techniquement plus très justifiée. Beaucoup de petites entreprises du bâtiment, par exemple, dont de nombreux métiers figurent dans cette liste, embauchent déjà des personnes handicapées et ont des partenariats de qualité avec l'Agefiph ! » La Fnath milite également pour la création d'une « obligation annuelle, dans les entreprises, de négocier sur l'emploi des handicapés » et sur la « transposition au plus vite et en totalité de la directive communautaire, de novembre 2000, qui introduit le handicap comme source de discrimination indirecte, et crée, à la charge de l'employeur, l'obligation de prendre des "aménagements raisonnables" en faveur des handicapés ».

Favoriser l'élection de personnes handicapées

Le Collectif des démocrates handicapés (CDH), qui ne siège pas à l'Agefiph, a été constitué en 2000, et vise, notamment, à favoriser l'élection de personnes handicapées à des postes de responsabilité publiques et politiques, afin de faire avancer leur cause.

Ce collectif opte pour l'obligation d'embauche (6 %) dans le service public et les entreprises privées, avec triplement de l'amende tous les deux ans en cas de non-respect ; une redistribution de la taxe aux travailleurs handicapés plutôt qu'aux entreprises ; une minoration des possibilités offertes aux employeurs de comptabiliser, dans leur calcul de 6 % de travailleurs handicapés, ceux travaillant pour eux en sous-traitance en centres d'aide par le travail ou en ateliers protégés ; et, enfin, une prime à l'embauche calculée au prorata : 10 % de personnes handicapées pour 25 travailleurs.

Les pouvoirs publics réfléchissent, actuellement, à une refonte de la loi, selon le souhait du président de la République. Le secrétariat d'Etat aux personnes handicapées n'ayant pas répondu à nos questions, difficile de dire, pour le moment, dans quel sens penchera cette réforme

Quel pourcentage de salariés handicapés ?

Le chiffre communément donné sur le taux d'insertion professionnelle des personnes handicapées dans les entreprises traditionnelles est de 4,1 % pour 2002. En fait, ce chiffre est construit par l'Etat sur la base de statistiques de l'année N-2. « C'est un chiffre sous-évalué, tardif et en stock. Personne n'est capable de faire le compte exact des personnes handicapées en emploi», concède Claudie Buisson, nouvelle directrice de l'Agefiph.

En fait, ce chiffre de 4,1 % est à minorer d'un tiers du fait de la surpondération de la gravité du handicap. Plus le handicap est important, plus le recrutement comptera dans les embauches de l'entreprise. En moyenne, tout salarié handicapé compte pour 1,3 dans le taux d'emploi, tous handicaps confondus. Ce qui donne plutôt un pourcentage réel de salariés handicapés dans les entreprises "ordinaires" de l'ordre de 3 %. « Ce chiffre, dit de taux d'emploi, ne mesure pas le nombre de personnes, mais un effort global des entreprises. Il évolue peu, car il mesure le stock et ne rend pas compte des flux d'entrée et de sortie, qui sont très importants. »

87 % de satisfaction

87 % des entreprises employant des salariés handicapés sont satisfaites de leur choix, annonce un sondage Louis Harris de fin 2002 pour l'Agefiph et l'Adapt. Ce taux s'élève à 97 % auprès des entreprises de 250 salariés et plus. L'image du travailleur handicapé apparaît positive en termes de motivation, de performance et de capacité à s'intégrer. On lui reconnaît, toutefois, une moindre capacité à encadrer et à se déplacer.

Le salarié intégré est reconnu pour ses compétences et ses qualités humaines, son handicap devenant secondaire aux yeux des employeurs et de ses collègues. « L'intégration de personnes handicapées dans le monde de l'entreprise déclenche davantage d'explications, de réflexes de sécurité, de créativité, et finalement, moins d'absentéisme », analyse le directeur d'un Cap Emploi.