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Des assurances contre les "risques sociaux"

SANS | publié le : 29.04.2003 |

Pour se protéger contre les risques sociaux, les entreprises ont la possibilité de souscrire une assurance. Mais seules celles ayant déjà une politique de prévention y ont accès.

Attaquées pour harcèlement ou pour discrimination, les entreprises doivent faire face à de nouveaux risques. Des assureurs se proposent de les prendre en charge à travers des polices appelées "rapports sociaux". Actuellement, ils sont trois à se partager le marché français : AIG, Axa Corporate Solutions, et Chubb. Avec 500 clients annoncés, le double de l'année dernière, AIG affirme détenir 80 % du marché français.

Le constat des assureurs est simple : les entreprises évoluent dans un contexte juridique de plus en plus contraignant. Il en résulte, selon Alain Mourot, secrétaire général d'AIG Europe, « une montée en puissance des procédures, une augmentation des indemnités allouées par les tribunaux et un accroissement des risques financiers pour les entreprises ».

Risques financiers

En octobre 2000, la cours d'appel de Mulhouse a condamné la société Fisher-Rosemount à verser 60 980 euros à une ex-salariée victime de harcèlement. De son côté, Manoir Industrie a été condamné à une amende de 46 000 euros pour discrimination syndicale. L'idée des assureurs est donc de proposer aux entreprises de leur transférer les risques financiers. En 2002, AIG a ainsi remboursé à Buffalo Grill les 122 000 euros d'indemnités que l'enseigne devait verser aux 14 salariés d'un restaurant de Trignac (44) pour harcèlement. De quoi déresponsabiliser les entreprises ? L'idée pourrait les effleurer lorsque, moyennant une prime annuelle de 12 000 euros, AIG annonce une garantie de 5 millions d'euros pour une entreprise de 1 000 salariés, avec une franchise de 75 000 euros.A une entreprise de la même taille, implantée seulement en France, Chubb propose 10 000 euros de prime, une franchise de 25 000 euros et une garantie de 1 million d'euros. « Nous n'assurons pas les entreprises les yeux fermés, nous leur demandons d'avoir une démarche de responsabilité sociale », explique Alain Mourot. « Les assureurs ne peuvent se permettre d'ouvrir un parachute pour les entreprises », résume, quant à lui, Dominique Bercovici, d'Axa Corporate Solutions.

Le montant des primes varie en fonction de plusieurs critères, selon Mathias Jalon, chargé de clientèle chez le courtier Gras Savoye : taille, répartition des effectifs dans le monde (l'implantation au Canada ou aux Etats-Unis crée des risques supplémentaires) et politique RH. L'entreprise doit, en effet, répondre à un questionnaire très précis.

AIG s'enquiert de la présence d'une DRH, de l'existence d'un règlement intérieur et d'une charte régissant les rapports sociaux communiqués à tous les salariés, du nombre de salariés ou de dirigeants renvoyés ou ayant démissionné dans les vingt-quatre derniers mois, de mises en cause pour licenciement abusif ou discrimination et d'enquêtes de l'inspection du travail. « Nous demandons aussi à rencontrer les DRH afin qu'ils nous exposent leur politique de lutte contre les discriminations », assure Alain Mourot, qui propose également des formations sur ces sujets.

Primes augmentées

Et si cette politique de prévention ne satisfait pas les assureurs ? Les primes augmentent en proportion du risque qu'ils devront couvrir. Une augmentation qui peut devenir rédhibitoire. « Si la politique de lutte contre les discriminations et le harcèlement ne répond pas à nos exigences, nous refusons d'assurer l'entreprise », explique Brian Vosloh, responsable des produits rapports sociaux pour l'Europe chez Chubb. De son côté, AIG déclare refuser un client sur cinq.

L'essentiel

1 Les salariés victimes de harcèlement ou de discrimination hésitent de moins en moins à faire valoir leurs droits. Cette évolution fait peser des risques financiers sur les entreprises.

2 Afin de prendre en charge ces risques, des assureurs proposent aux entreprises des polices "rapports sociaux". En France, le marché commence à se développer.

3 Mais les conditions que posent les assureurs excluent les entreprises n'ayant pas développé une véritable politique de prévention.

Ce que couvrent ces polices

Les polices "rapports sociaux", aussi appelées "polices EPL" (employment practices liability), couvrent le harcèlement et la discrimination, mais aussi les licenciements abusifs, les manquements au respect des droits acquis (congés payés, temps de travail), les propos diffamatoires, les humiliations, les violations de la vie privée et les mesures disciplinaires abusives. Elles prennent en charge les frais de défense et les dommages et intérêts à verser aux plaignants, mais ne couvrent en aucun cas le risque pénal.