Selon Philippe Joffre, directeur général de Génération formation, une filiale d'Accor Services, nous serions passés au troisième âge de la gestion administrative de la formation. « Après un suivi à la main, puis une utilisation des tableurs Excel, nous voici dans l'ère des logiciels informatiques », résume-t-il. En matière d'outils informatiques, la dernière grande nouveauté concerne le développement des intranets proposés par les principaux éditeurs.

« L'intranet formation suscite de l'intérêt et beaucoup de questionnements au sein des entreprises, témoigne Jean-Christophe Cicile, responsable marketing d'Inser, éditeur spécialisé dans la formation et la gestion des compétences. Nous avons, aujourd'hui, une trentaine de clients utilisateurs de cette version, notamment dans le secteur public. Mais la mise en place d'un tel outil est relativement longue. Le processus de décision implique, outre le responsable formation, la direction des systèmes d'information, la DRH et la direction générale. Le projet concerne, par ailleurs, l'ensemble des managers et des salariés. » C'est un véritable choix politique dans l'entreprise que de mettre en ligne un catalogue ou un processus de demande d'inscription accessible aux responsables locaux de formation, voire aux salariés.

Toutes les entreprises ne possèdent pas d'intranet ou d'outil informatique dédié à la gestion des plans de formation. Et l'utilisation des tableaux Excel perdure dans nombre de directions RH. Pourtant, à l'heure de la chasse aux coûts, un responsable formation a tout intérêt à présenter des tableaux de bord précis de ses réalisations. Les simulations budgétaires, plus ou moins développées dans les outils informatiques, l'aideront à définir les axes principaux de formation. Les fonctions de suivi du plan de formation lui permettront de garder un oeil attentif sur le respect du budget et d'opérer d'éventuels réajustements. Et les fonctions de bilan faciliteront la consolidation des dépenses, voire la déclaration fiscale "24-83".

Avant de se doter d'un outil, il s'agit de définir ses besoins de manière précise. « Les outils informatiques sont de plus en plus sophistiqués, commente Philippe Joffre. Mais il ne sert à rien de choisir des applications surdimensionnées dont on utilisera seulement une petite partie. Et attention au cahier des charges ! » (Voir encadré ci-dessous.)

L'alternative principale pour l'entreprise se pose en termes d'outils dédiés ou non à la gestion administrative de la formation. Des éditeurs informatiques se sont spécialisés dans la réalisation de logiciels uniquement destinés à l'élaboration d'un plan de formation, à sa mise en oeuvre et à son bilan. Dans cette famille, les solutions d'Inser ou de Foederis s'adressent aux entreprises des secteurs privé et public, à partir de plusieurs centaines de salariés jusqu'à plusieurs dizaines de milliers. Un logiciel comme celui proposé par l'éditeur Réalisium concerne des entreprises de plus petite taille, à partir de 150 salariés environ. Il existe, par ailleurs, des solutions consacrées à des secteurs d'activité particuliers, comme celui de la santé.

Les fonctions offertes par ces outils couvrent l'ensemble de la gestion administrative de la formation et offrent un vaste champ de simulations budgétaires, de créations de tableaux de bord, d'historiques de formations. Une palette de possibilités pour contenter le plus exigeant des responsables formation, à condition, bien entendu, qu'il ait le temps de se pencher sur toutes les subtilités proposées par le logiciel et de les utiliser. Ces fonctions sont plus ou moins développées suivant le coût du produit, sachant qu'en la matière, le facteur multiplicateur peut être de six (entre 5 000 et 30 000 euros). Parmi les points forts de ce type d'outils figure la déclaration fiscale. Une entreprise peut, en effet, éditer une déclaration " 24-83" agréée par le ministère de l'Economie et des Finances, alors que les progiciels de gestion intégrés de ressources humaines s'arrêtent, en général, aux états préparatoires de la déclaration.

Face à ces solutions informatiques dédiées, les progiciels de ressources humaines d'IBM, PeopleSoft, Sopra, SAP ou CCMX, consacrent un module à la gestion administrative de la formation. L'investissement n'est pas du même montant, mais le progiciel répond à plusieurs problématiques ressources humaines et ne se contente pas de traiter de la formation. Avantage indéniable de cette solution : le rapatriement automatique des données concernant, par exemple, la paie pour gérer le budget formation et la déclaration fiscale. A priori, les principaux éditeurs de solutions dédiées sont rodés pour gérer cette question, même si une entreprise n'est pas à l'abri d'une difficulté particulière. « Nous n'avons eu aucun souci d'interfaçage entre l'outil de gestion de la formation de Réalisium, utilisé pour 550 salariés, et notre progiciel de ressources humaines CCMX », témoigne Thomas Faivre, responsable formation de la SCET, une filiale de la Caisse des dépôts et consignations. Orange, la filiale de France Télécom, pour sa part, met actuellement en place le progiciel de ressources humaines PeopleSoft HRMS. « Le module formation en tant que tel n'a pas fait la différence dans notre choix d'un progiciel de gestion intégré pour 8 000 salariés, commente Thierry Attias, chef du projet système d'information ressources humaines "@tous" ». Nous cherchions avant tout un outil d'excellence pour les RH. Pour la partie formation, les fonctionnalités offertes sont suffisantes, même si nous devons paramétrer le module pour l'adapter à nos besoins, le fiabiliser et le compléter pour la déclaration fiscale 24-83. »

Les éditeurs de progiciels de ressources humaines font également valoir que le choix d'une solution intégrée permet de relier la gestion de la formation et celle des compétences. Et donc de mieux cibler les besoins d'apprentissage. Cependant, conscients de cette demande grandissante des entreprises, Inser et Foederis proposent un module de gestion des savoirs compatible avec celui dédié à la formation. Dans ce domaine, la limite des outils tient surtout à un facteur externe, la difficulté de réaliser et de faire vivre les référentiels de compétences. Si la réflexion dans ce domaine n'est pas très avancée, rien ne sert de se doter d'un tel outil. A moins que l'ambition de GPEC soit solide. L'entreprise doit donc, avant tout, choisir le produit qui répond au mieux à ses besoins et mener une solide réflexion en amont afin de définir précisément son cahier des charges. Faute de quoi, elle sera déçue par l'outil informatique.

« Réalisez un premier cadrage par rapport à ce qu'il est raisonnable d'envisager et tirez un trait sur les rêves inaccessibles, conseille Pascal Nicaud, consultant système d'information ressources humaines à la Cegos. En revanche, optez pour une solution suffisamment souple pour s'adapter à l'évolution de vos priorités. » Selon ce consultant, il n'existe pas de logiciel informatique parfait. Tout dépend de la stratégie de l'entreprise en matière de formation. S'agit-il d'un axe jugé essentiel, ou la formation est-elle limitée au respect de l'obligation légale de dépenses ? Dans le premier cas, le catalogue des stages renverra, par exemple, au référentiel de compétences de l'entreprise. Le responsable formation doit, par ailleurs, bien établir ses besoins pour être sûr que l'outil y réponde. Le logiciel gère-t-il des cursus et des plans de formation pluriannuels ? Est-il dans une logique de décentralisation ? Est-il prévu pour des évaluations de sessions complètes ?