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« On ne change pas un accord qui marche »

SANS | publié le : 25.02.2003 |

Ni aide financière ni échéance : les entreprises n'ont aucune obligation de revoir leur accord 35 heures. Du coup, l'intérêt faiblit.

D' ElcoBrandt à la Fnac, en passant par Sodexho, Otis, Manpower ou Toyota, les entreprises n'ont guère envie de se mobiliser pour assouplir leur accord sur la réduction du temps de travail. La plupart d'entre eux ont été signés dans la douleur et peu de sociétés souhaitent revenir en arrière.

« Ce qui est fait est fait, constate, ainsi, Anne-France Lucas, directrice des relations sociales de la Fnac. Deux ans de négociations ont été nécessaires pour arriver à un accord qui a, d'ailleurs, été approuvé par une large majorité de notre personnel. On ne change pas un accord qui marche. » D'autant que les entreprises ont fait leurs comptes. Si la loi Aubry revêtait un caractère incitatif, grâce à l'octroi des allègements de charges sociales et à l'attribution de l'aide pérenne, il n'en est rien avec la loi Fillon.

Pragmatisme

« Soyons pragmatiques, indique Thierry Robert, responsable des relations sociales chez Otis. La loi Aubry était intéressante pour bénéficier, notamment, des exonérations de charges sociales. Or, aujourd'hui, un accord n'est plus nécessaire pour obtenir cet abattement. La réduction des charges sociales ne nécessite plus d'accord d'entreprise. On ne va pas perdre notre temps sur le sujet, c'est un peu passé de mode. On ne va pas repasser à 39 heures. A nous, désormais, d'en absorber les coûts. »

Loi Fillon aux oubliettes

Chez ElcoBrandt, la cession partielle de l'entreprise va obliger les partenaires sociaux à renégocier l'accord. Mais, là encore, la loi Fillon ne servira pas de base aux discussions. « Nos entreprises ont vécu plus de trois ans de lois Aubry. Les habitudes ont donc été prises, constate Dominique Laurent, le DRH. Nous allons nous attacher à regarder au plus près du terrain, site par site, pour trouver une solution aux dysfonctionnements rencontrés. La loi Fillon aura donc un impact minime. »

Le problème concerne évidemment les contreparties accordées aux partenaires sociaux. Car sinon, « quelle organisation syndicale acceptera de venir s'asseoir autour d'une table pour s'entendre dire "signez pour qu'il y ait plus d'heures supplémentaires" » ? s'interroge Hervé L'Homme, DRH France Sodexho (315 000 collaborateurs).

Toute négociation aura un coût et les entreprises n'ont pas envie d'en payer le prix. C'est aussi l'argument mis en avant par Jean-Pierre Lemonnier, président du directoire de Manpower France (4 500 salariés). « Le problème, c'est que peu de branches ont intérêt à négocier, car elles ne savent pas quoi proposer en échange. Au niveau des entreprises, c'est la même chose. Si c'est simplement resigner un accord pour, au final, faire travailler ses salariés quinze heures de plus dans l'année, le jeu n'en vaut vraiment pas la chandelle. »

Possibilité de monétisation du CET

Seule Toyota, à Valenciennes, réfléchit sur le compte épargne-temps. « La possibilité de le monétiser intéresse l'usine, toujours à la recherche d'heures disponibles, affirme François-Régis Cuminal, le DRH de l'établissement. L'année dernière, la direction avait déjà décidé de payer certaines heures supplémentaires (avec un délai de prévenance de deux heures uniquement) 50 % de plus qu'une heure normale afin d'inciter ses ouvriers à se faire payer leurs heures plutôt que de les capitaliser. Le fait de pouvoir rémunérer les heures épargnées représente donc, pour nous, un certain avantage. »

Prudence

Quelques entreprises de moins de 20 salariés pourraient également profiter de la loi Fillon pour rester à 39 heures. Toutefois, là encore, la prudence est de mise. Car, face aux difficultés de recrutement, elles savent qu'elles doivent devenir plus attractives pour recruter les talents dont elles ont besoin.