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A Toulouse, des entreprises s'engagent

SANS | publié le : 11.02.2003 |

Des entreprises n'ont pas attendu l'action du gouvernement pour miser sur la sécurité routière, la route étant la cause principale d'accidents mortels du travail. Illustration avec un club d'entreprises toulousain, qui compte 40 sociétés adhérentes, regroupant 60 000 salariés.

Les chiffres sont éloquents. En 2001, selon la Cnam, 262 salariés ont trouvé la mort sur la route au cours d'une mission et 574 sur le trajet domicile-travail. « Un risque totalement sous-estimé par les chefs d'entreprise, or les deux tiers des accidents mortels du travail surviennent sur la route », déclare Christian Prat, ingénieur conseil à la Cram des Pays de la Loire, dont une des missions consiste à sensibiliser les chefs d'entreprise à ces risques routiers.

« Si les conséquences humaines sont graves, les retombées économiques le sont aussi. En règle générale, le coût indirect lié à un accident (l'absence du salarié, son remplacement, l'image de l'entreprise) est trois fois plus élevé que le coût direct, ajoute Bernard Gouillon, préventeur à la Cram de Midi-Pyrénées. Il fallait que le gouvernement mesure l'ampleur du problème, dépasse les actions type Bison futé ou Itinéraire vert et entre dans une démarche plus volontariste. »

Charte nationale

En décembre 1999, la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) et la déléguée interministérielle à la Sécurité sociale signent une charte nationale, qui considère les accidents de la route des salariés, trajet et mission, comme un véritable risque professionnel. Cette charte, qui propose un cadre d'intervention général, doit être signée au niveau départemental entre le préfet et la Cram, et préciser les mesures de prévention qui seront adoptées localement. Le plus souvent, des actions de sensibilisation et de formation. A ce jour, la moitié seulement des départements ont signé cette charte, certains, comme le Gers, l'ont fait de façon tout à fait anecdotique, puisqu'elle ne concerne qu'une seule entreprise.

Des entreprises ont toutefois choisi de se regrouper pour mener des actions de plus grande envergure, pouvant aller, comme c'est le cas pour le club d'entreprises sécurité routière toulousain, jusqu'à des aménagements routiers. Ce club, qui vient de souffler ses sept bougies, compte 40 entreprises adhérentes qui regroupent 60 000 salariés.

A l'origine, Dominique Michel, l'un des responsables du service circulation de la mairie de Toulouse, qui s'est demandé ce que la mairie faisait pour réduire les accidents de la route. « J'ai regardé les statistiques. En 1990, 360 accidents mettaient en cause un employé municipal. Je me suis rapproché de France Télécom et d'EDF pour voir ce qu'ils avaient mis en place pour réduire les accidents. » Ils ont eu, alors, l'idée de se regrouper au sein d'un club d'entreprises sécurité routière pour mettre leurs moyens en commun et échanger leurs expériences.

"Bosser sans cabosser"

Association loi 1901, le club fonctionne grâce aux adhésions, 800 euros environ par entreprise, et à diverses subventions. Il choisit un logo-slogan, "Bosser sans cabosser", et édite, deux fois par an, une revue, Info entreprises, tirée à 50 000 exemplaires, qui fait le point sur les actions du club et approfondit un thème dans chaque numéro : les troubles du sommeil, apprendre à partager le territoire urbain, routier, un vrai métier...

Centre de ressources

L'une des plus grandes fiertés du club est un centre de ressources qui a ouvert ses portes en 2002 au PC routier de la Ville rose. Un emploi-jeune, titulaire d'un DESS Education et politique de la Ville, a été recruté pour l'animer. Le centre est ouvert à tout public. Outre une volumineuse documentation, il propose des éthylomètres, un cinémomètre (mesure la vitesse), des équipements de contrôle, une voiture tonneau et un testo-choc - voiture lâchée à 12 km/heure sur une pente - très utile pendant les formations que dispense le club. Des correspondants sécurité routière sont formés dans les entreprises et alertent le club dès qu'un besoin ou un problème apparaît. « Ce fut le cas lorsque La Poste a équipé certains agents de motos 125 cm3 : le nombre d'accidents était monté en flèche. Nous avons alors organisé des formations pour les deux-roues », indique Dominique Michel.

Résultats encourageants

Les actions ne manquent pas : EADS a, par exemple, construit une passerelle piétonne au-dessus de la route pour relier deux de ses sites, des cheminements piétonniers ont également été réalisés, de la zone d'activité Basso Combo au terminus du métro, où la priorité avait été donnée aux voitures. Motorola, qui a mis en place un système de covoiturage dans son entreprise, avec offres et demandes disponibles sur intranet, est en train de réfléchir aux moyens d'étendre ce dispositif aux entreprises de la zone. Dix mille salariés seraient alors concernés. Enfin, chaque entreprise dispose de carnets à souche, baptisés Iris, sur lesquels les salariés notent tous les aménagements qu'ils jugent dangereux en ville. Les remarques sont directement envoyées au service circulation de la mairie, via le club. Certaines entreprises du club ont enregistré des résultats encourageants. Ainsi, à l'agence centrale d'EDF-GDF Toulouse, 130 accidents sur un parc de 500 véhicules ont été recensés en 1994. Pour 80 % d'entre eux, la responsabilité des agents était engagée. Deux ans après, le nombre de sinistres passait à 60, avec un taux de responsabilité de 66 %. En 2001, 45 accidents étaient dénombrés. Quant au taux de responsabilité, il tombait sous la barre des 50 %.

L'essentiel

1Les risques relatifs aux accidents de la route pendant une mission professionnelle ou un trajet domicile-travail restent sous-estimés par les entreprises. En 2001, selon la Cnam, 836 salariés ont perdu la vie sur la route.

2 Des entreprises ont toutefois choisi de se regrouper pour mener des actions de sensibilisation aux risques routiers.

3 C'est notamment le cas à Toulouse où une association réunit 40 entreprises (EADS, France Télécom, EDF-GDF, Motorola, Siemens...), représentant plus de 60 000 salariés. Parmi ses réalisations : la création, l'an dernier, d'un centre de ressources dédié à la sécurité routière.

Qui sont les victimes ?

Une étude réalisée par l'INRS sur 1 901 accidents mortels survenus à des salariés en mission, entre 1990 et 1997, laisse apparaître qu'après les chauffeurs routiers et les conducteurs de bus et d'autocars (732), ce sont les directeurs et les gérants d'entreprise qui sont les plus touchés (220), suivis par les commerciaux (216).

Les entreprises les plus petites sont les plus représentées, de 1 à 9 salariés (381) et de 10 à 49 salariés (445).

Le nombre d'accidents mortels liés au travail baisse proportionnellement aux accidents de la route. En 1983, on enregistrait 1 343 décès (trajet-mission) contre 1 038 en 1991 et 916 en 1999.