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L'espoir s'essouffle chez les ouvriers licenciés

SANS | publié le : 28.01.2003 |

Le plan social chez Bata L'espoir s'essouffle chez les ouvriers licenciés Un an après la suppression de 526 postes à l'usine de chaussures Bata de Moussey (Moselle), le bilan social s'avère préoccupant : seuls 65 salariés ont un CDI et la cellule de reclassement semble avoir sous-estimé les difficultés de réinsertion de salariés fortement dépendants de leur entreprise.

Une cité ouvrière perdue en pleine campagne, un tissu industriel local fragilisé, des salariés âgés en moyenne de 43 ans ne présentant souvent aucune autre expérience professionnelle que celle de la confection de chaussures... La reconversion des 526 salariés licenciés par Bata, à Moussey (Moselle), en décembre 2001, s'annonçait difficile.

Réindustrialisation absente

Un an plus tard, 124 d'entre eux ont retrouvé un emploi, mais la majorité des ouvriers licenciés perdent espoir. « Les anciens de Bata espéraient la réindustrialisation du site. Or, aussi surprenant que cela puisse paraître, l'usine, qui occupait 2 000 salariés voici quinze ans, ne présente pas de locaux disponibles pour de nouvelles implantations, les 300 salariés de Hello SA, successeur de Bata, ayant occupé la quasi-totalité de l'espace. Si industrialisation il y a, elle interviendra probablement dans les villes voisines de Sarrebourg ou de Lunéville (Meurthe-et-Moselle). La mobilité et la question du logement revêtent donc un caractère primordial », explique Gérard Riebel, président du comité de suivi de la cellule de reclassement instaurée, voilà un an, dans le cadre du plan social de Bata.

Les habitants de Bataville, la cité ouvrière construite dans les années 30, ont longtemps bénéficié de loyers si modiques qu'ils s'apparentaient à des salaires déguisés. Ils disposaient également d'un système de navette permettant un fonctionnement en vase clos, à tel point que 120 des 840 salariés que comptait l'entreprise en 2001 ne possédaient pas le permis de conduire. Or, les administrateurs de Bata peinent, aujourd'hui, à trouver preneur pour ce patrimoine de 158 logements parfois très dégradés. La proposition de rachat individuel des logements ayant échoué, les habitants restent dans l'incertitude et la crainte d'augmentation substantielle des loyers.

Peu de mobilisation

A cette expectative s'ajoutent les doutes quant aux possibilités de reconversion. La majeure partie des salariés ayant retrouvé un emploi occupaient des postes de mécanicien, serrurier ou technicien. Les ouvrières spécialisées dans la confection de chaussures ne perçoivent plus d'avenir dans cette production mais hésitent à s'engager dans des formations radicalement différentes. Seules 90 des 325 formations proposées ont été acceptées. « Il faut une forte capacité de mobilisation personnelle pour se lancer dans une formation à 45 ans. Certains salariés se sont découragés par avance, d'autres ont hésité face aux distances et, donc, au coût que représentaient des stages éloignés de leur domicile. Par ailleurs, j'ai été surpris de ne pas rencontrer plus de mobilisation collective pour initier ces publics aux nouvelles technologies, alors même que l'ordinateur constitue, aujourd'hui, un outil de travail incontournable », note Jacques Witz, conseiller en formation au Greta de Lunéville.

L'organisme a accueilli quelque 70 anciens salariés de Bata, notamment dans le cadre de stages de détermination de projets pour les publics les plus éloignés de l'emploi, et organise, à présent, des formations aux métiers de la vente et à l'aide à domicile.

Crédits pourtant conséquents

A la fin de l'année 2002, seuls 20 % des crédits alloués à la formation avaient été mobilisés. « Nous nous sommes battus pour obtenir des crédits conséquents. J'espère que les salariés prendront conscience de cette opportunité pour construire un nouveau projet professionnel. Il faut absolument qu'un changement des mentalités s'opère rapidement », affirme Gérard Riebel.

Ancienne représentante CGT du comité d'entreprise, Evelyne Caro, qui poursuit, actuellement, une formation d'aide-soignante, partage ce constat. « Il est vraiment dommage de ne pas saisir l'opportunité de formations de qualité, d'autant que le marché local de l'emploi est loin d'être porteur. Le cabinet Altédia, en charge du reclassement des ex-Bata, a souvent été durement mis en cause, mais je ne suis pas certaine qu'à leur place, d'autres auraient fait mieux. »

Eviter l'isolement

Jusqu'à l'été prochain, la cellule de reclassement poursuivra son action, permettant à ses membres d'éviter l'isolement. Les réunions donnent parfois lieu à des bonnes nouvelles : « Nous avons communiqué aux stagiaires les retours obtenus auprès d'employeurs ayant recruté certains de leurs anciens collègues. Les anciens Bata sont unanimement considérés comme assidus et donnant toute satisfaction », souligne Jaques Wiltz. Une remarque encourageante pour les ouvriers licenciés.

REPERES

Personnes à reclasser (adhérentes à la cellule de reclassement) : 342 sur 526 salariés licenciés.

Solutions stables : 65 salariés ont trouvé un CDI, 8 ont créé leur entreprise.

Solutions provisoires : 37 en CDD, 14 en intérim.

En attente de solutions : 72 (formation ou attente de résultats d'entretien d'embauche).

Sans solution : 146.

Source : Altédia