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Les espoirs des premières validations à 100 %

SANS | publié le : 07.01.2003 |

La nouvelle "Validation des acquis de l'expérience" (VAE) permet d'obtenir 100 % d'un diplôme ou d'un titre homologué. Les DRH, jusqu'alors réticents à jouer le jeu de la validation, pourraient y trouver de quoi revoir leur point de vue.

La possibilité d'obtenir 100 % d'un diplôme ou d'un titre homologué, grâce à la nouvelle VAE, a deux conséquences directes : elle raccourcit le temps nécessaire à l'obtention du diplôme visé, et elle réduit le coût de l'opération, puisqu'il n'y a plus de formation complémentaire à financer. Ces deux nouveaux avantages ont de quoi faire changer d'avis certaines entreprises qui ne veulent pas jouer le jeu de la validation par peur de subir la pression d'une demande de valorisation ou de promotion de la part d'un salarié "validé". « De plus, la course aux talents, qui risque de s'accélérer dans les années à venir, du fait du départ à la retraite d'une grande part de la population active, nécessite de prendre les devants. Les politiques de fidélisation - et notamment celle des femmes - , via la VAE, ont toutes les chances d'être gagnantes pour les entreprises », assure Nicole Ameline, ministre déléguée à la Parité et à l'Egalité professionnelle.

Autre bonne raison de s'y mettre : le décret permettant d'imputer les frais de VAE sur le plan de formation des entreprises est paru au Journal officiel du 18 décembre 2002 ! (lire les Textes page 10).

Initiatives individuelles majoritaires

Les vingt premières VAE, enregistrées fin novembre 2002, à l'université des sciences et technologies de Lille-1 (USTL), sont très majoritairement d'initiative individuelle, constate Michel Feutrie, vice-président de l'USTL, chargé de la formation continue, mais « une cinquantaine de dossiers sont en cours et les demandes affluent, tant de la part des individus que des entreprises », ajoute-t-il. Sur ces vingt premières VAE, huit ont reçu une validation totale.

Sur le fond, la VAE n'a pas changé grand-chose par rapport à la VAP (Validation des acquis professionnels), estime Michel Feutrie. Le travail d'analyse des parcours et le questionnement intellectuel est le même. La possibilité d'attribution totale du diplôme, offerte par la nouvelle formule de VAE, oblige à un peu plus d'attention de la part du jury : questions plus précises sur l'actualisation des connaissances, preuves plus fouillées...

Le problème qui se pose est celui du traitement de l'afflux des demandes différentes. « Quasiment un jury par candidat est constitué ! Les demandes identiques ne sont pas encore assez nombreuses pour qu'un jury traite plusieurs personnes dans la même session », confie Michel Feutrie.

Financement des coûts

Ces jurys, de cinq à huit personnes, sont composés, majoritairement, d'enseignants de l'université, et d'au moins un professionnel. Ils sont payés, « s'ils le demandent », via le versement d'une indemnité fondée sur la formule de l'"heure complémentaire universitaire", soit un tarif d'environ 38 euros par heure. « Le financement des coûts de jury n'est pas encore un problème, mais il va le devenir si la VAE se développe comme on le pense », analyse Michel Feutrie. Ce coût peut être assumé par les entreprises ou les Fongecif pour les salariés en poste, et par les régions et les pouvoirs publics pour les demandeurs d'emploi. Mais, en cas de manque de financement, les institutions certifiantes et validatrices seront bien obligées de faire payer le demandeur, au moins partiellement. Un tarif d'environ 700 euros pour l'ensemble d'une validation est déjà fixé par l'université de Lille-1. Ce même chiffre avait déjà été avancé par d'autres universités lors d'une réunion des présidents de service de formation continue universitaire, en 2001, à Paris. En décembre dernier, des conseillers formation continue de Greta de l'Education nationale ont également pointé un chiffre équivalent.

L'université de Lille-1 constate que la préparation des dossiers de VAE s'est majoritairement faite sur le temps libre des candidats. « Leurs personnalités sont très différentes, mais tous ont en commun d'avoir un projet : désir de reconnaissance personnelle ou stratégie de plan de carrière », analyse Michel Feutrie.

Le temps de préparation du dossier a été très variable (d'une demi-journée à plusieurs jours). Certains ont besoin d'un fort accompagnement, d'autres non. L'obligation de l'écrit n'a pas été un problème pour eux, en général cadres ou techniciens, mais elle pourrait être un véritable obstacle pour les candidats à la VAE de niveau 4 et inférieur. Laurent Gérard

Deux bénéficiaires de validation à 100 % témoignent

«Après un bac mathématiques, en 1965, je me suis occupée de marketing direct et client dans diverses entreprises et agences, raconte Chantal Sellier, 55 ans. En 2002, j'ai pris la fonction de DG de l'agence de marketing Meura, qui compte 50 collaborateurs. Parallèlement, je suis présidente du Syndicat national de la communication directe. Le directeur du magistère de marketing de l'IAE de Lille m'a proposé de donner des cours, mais, pour cela, il me fallait un niveau DESS. Or, hormis mon bac mathématiques, je n'avais que quelques UV du Cnam. Un collègue m'a parlé de la VAE. Vu mon parcours, on m'a conseillé de viser directement le DESS. J'ai rempli, en une demi-journée, le dossier, qui m'a semblé poser les bonnes questions sur mon parcours. Fin novembre 2002, un jury, composé d'un professionnel, de quatre enseignants de l'université de Lille-1 et du directeur du magistère de marketing, m'a reçue. Le DESS m'a été validé à 100 %. Le seul coût que j'ai eu à assumer a été l'inscription en DESS - même si je ne le suivais pas, puisque j'étais validée -, de 280 euros. Cette reconnaissance me permet de devenir professeur associé de marketing, et comble un peu mon rêve de devenir prof de mathématiques à l'époque de mon bac ! Mais elle ne joue pas un grand rôle dans ma carrière professionnelle. Bien que n'ayant qu'un bac, je ne me suis jamais sentie bloquée dans mon évolution professionnelle. Les qualités professionnelles sont plus importantes. »

« Je suis autodidacte, non bachelier, mais j'ai suivi un IAE par cours du soir, raconte Monsieur X, 50 ans. Après trente ans d'expérience en informatique et en gestion d'équipe, j'avais besoin d'une Miage pour évoluer professionnellement. J'ai appris l'existence de la VAE par la radio. Le dossier a été rempli en une demi-journée. Il faut avoir une vision claire de ce qu'on nous demande. C'est une sorte de super CV développé, illustrant les missions et les moyens, surtout ceux de la dernière fonction occupée. Un jury de 5 personnes m'a interrogé durant une demi-heure, au travers de bonnes questions, sans chercher à me piéger, sur ma veille technologique, l'actualisation de mes connaissances, les dernières technologies... Ma demande a été validée à 100 % par Lille-1. Le seul coût financier a été une inscription universitaire de 270 euros. L'accueil a été très réactif, pas frileux, ni hermétique, ni pointilliste, ni scolaire. Les universitaires rencontrés ne m'ont pas semblé déstabilisés par la VAE. » L. G.

L'essentiel

1 La possibilité d'une validation à 100 % raccourcit le temps nécessaire à l'obtention du diplôme visé, et réduit le coût de formation complémentaire.

2 Le travail d'analyse des parcours n'est pas fondamentalement différent entre la nouvelle "validation des acquis de l'expérience" et l'ancienne "validation des acquis professionnels".

3 Le manque de financement de la procédure (analyse, jury) pourrait pousser les institutions certifiantes à faire payer le demandeur, au moins partiellement.