logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

SANS

Des salariés dans le flou

SANS | publié le : 07.01.2003 |

Né au début des années 80 aux Etats-Unis, le portage salarial gagne du terrain en France. Seul problème, cette forme de travail n'existe pas aux yeux de la loi.

« Sans l'existence du portage salarial, j'aurais pu dire adieu à plusieurs offres de travail. » Claire Guilabert, docteur en sciences de 35 ans, reconnaît, sans détour, le bien-fondé de la formule qui lui a permis de dispenser des cours en université et des journées de consulting en entreprise.

Missions ponctuelles

Le principe du portage ? Permettre à un cadre de réaliser des missions ponctuelles pour des clients, sans s'immatriculer au titre de travailleur indépendant. C'est, en effet, la société de portage qui conclura un contrat commercial avec la société, puis un contrat de travail avec l'expert, allant de quelques semaines à plusieurs années. A réception du règlement de la facture, elle verse un salaire au "porté", bénéficiaire, alors, de la protection classique d'un salarié (indemnités chômage si besoin, couverture maladie et assurance vieillesse). Le tout contre une commission dite de "frais de gestion", de l'ordre de 10 % en moyenne. Mais c'est justement ce prélèvement d'honoraires qui pose problème puisqu'il flirte avec l'illégalité. Assimilé à du prêt de main-d'oeuvre, il est interdit dans le Code du travail (L.125-1). La seule exception concerne les contrats de travail conclus dans l'intérim.

Reconnaissance juridique

N'ayant, pour l'heure aucune reconnaissance juridique, le portage, au croisement de deux droits, celui du travail et celui du commercial, pose encore problème pour certains tribunaux. Autre faiblesse : le "porté" fournit un travail dans une entreprise cliente, sans pour autant bénéficier des accords collectifs en oeuvre chez celle-ci. Pourtant, la formule, lancée en 1986, fait aujourd'hui des émules. Pour preuve, le marché total du portage a dépassé, en 2001, les 15 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Le Syndicat des entreprises de portage salarial (SEPS)*, regroupant une dizaine de sociétés - il n'y en aurait pas plus de 30 en France -, parle d'une hausse de 60 % de l'effectif "porté" en 2002 par rapport à 2001, pour un total de 8 000.

Tester le marché

« Le portage répond à plusieurs motivations, analyse François Fayol, secrétaire général de la CFDT Cadres. Du côté de l'entreprise, il offre de la flexibilité. Du côté des cadres, il permet de s'accorder du temps afin de tester un marché avant de devenir créateur d'entreprise ou indépendant. »

En effet, selon une étude du SEPS, réalisée en novembre dernier, auprès d'un panel de 4 793 portés, 60 % des cadres qui choisissent le portage affirment avoir l'intention de créer leur entreprise. Et pour cause, la création d'entreprise étant un tel parcours du combattant, le portage devient une sorte de sas de sécurité, plutôt « une situation par défaut », selon Mireille Collange, de l'Ugict-CGT. Précisons, toutefois, que 30 % mènent leur projet à terme. La quête de légitimité pour la profession est, cependant, en route. Différentes négociations sont, en effet, engagées par le SEPS, avec des centrales syndicales en vue d'obtenir une extension "sur mesure" de la convention collective du Syntec.

* SEPS : 1, av. Hélène-Boucher, 93123 La Courneuve Cedex <http://www.portagesalarial.org>

LE PORTAGE EN CHIFFRES

Entreprise de portage : 30.

Portés : 8 000.

Chiffre d'affaires du marché : 15 millions d'euros.