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Défense de toucher au statut

SANS | publié le : 07.01.2003 |

Déficit de leur régime d'assurance chômage oblige, les intermittents du spectacle voient, une fois de plus, leur statut remis en cause.

Acteurs, réalisateurs, mais aussi maquilleurs, monteurs, décorateurs... Toutes ces profes- sions appartiennent, en France, à une seule et même famille, celle des intermittents du spectacle, un "statut unique en Europe".

Travaillant au cachet ou le temps d'une production, ils peuvent jongler avec plusieurs contrats et plusieurs employeurs. Leur contrat, le CDD d'usage (également utilisé dans d'autres secteurs d'activité, comme la réparation navale, les exploitations forestières...) peut être renouvelé indéfiniment, sans avoir à respecter le délai de carence. Et, contrairement au CDD traditionnel, il ne donne pas droit au versement d'une prime de précarité liée à la rupture du contrat.

Des employeurs avantagés

Des avantages évidents pour les employeurs peu scrupuleux, qui n'hésitent pas à recourir à l'intermittence plutôt qu'au CDI ou au CDD, notamment dans les sociétés de production audiovisuelle. C'est ainsi que l'ensemble du personnel de l'émission Nulle part ailleurs, sur Canal Plus, a eu le statut d'intermittent pour une production qui, elle, n'avait rien d'éphémère, puisque l'émission a duré dix ans.

Entre deux contrats, les intermittents cotisent à un régime spécifique d'assurance chômage, créé en 1969, pour assurer la continuité de leurs revenus. Particularité : les intermittents bénéficient de prestations d'assurance chômage à partir de 507 heures travaillées sur douze mois (trois mois à 69 heures) contre 606 heures pour les allocataires du régime général. Les prestations sont calculées sur la moyenne des cachets, ou, pour les ouvriers et les techniciens de l'audiovisuel et du cinéma, d'après les salaires perçus. Les 507 heures donnent droit à une année pleine d'indemnités.

838 millions d'euros d'indemnités

En 2000, les intermittents ont cotisé à hauteur de 100 millions d'euros et perçu quelque 838 millions d'euros d'indemnités. Leur indemnité, en équivalent mensuel, est de 1 304,2 euros contre 793,5 euros, en moyenne, pour l'ensemble des allocataires du régime d'assurance chômage général, selon une enquête de l'Unedic, publiée en septembre dernier.

Des chiffres faussés, selon la CGT-spectacle, qui tient à préciser que « ce montant élevé est dû uniquement au niveau de qualification des personnes concernées, cadres en l'occurrence, et qui ne peuvent donc pas être comparées à l'ensemble des allocataires du régime général »

Cotisations doublées

Compte tenu du déficit de la branche (738 millions d'euros en 2001), le patronat et trois syndicats (CFDT, CGC et CFTC) ont conclu, le 19 juin dernier, un accord prévoyant de doubler les cotisations chômage des intermittents du spectacle. Elles sont passées, le 1er septembre dernier, de 2 % à 4,2 % pour les salariés et de 3,6 % à 7,4 % pour les employeurs.

Ces mesures pourraient se révéler insuffisantes. Deux rapports, remis au gouvernement fin 2002, pointent les dérives du système : dissimulation d'activité, achat des cotisations sociales, prêt de main-d'oeuvre dans le cadre de coproductions, utilisation abusive des règles relatives au cachet... De quoi alimenter le débat sur la nécessité d'une réforme du système. Toutefois, il ne sera pas aisé d'en modifier les règles. Les intermittents du spectacle se mobilisent régulièrement en faveur de leur régime, bien décidés à conserver leurs acquis. La création artistique est, pour eux, à ce prix...

Combien sont-ils ?

Pas de photographie précise de la situation : cette catégorie, mal définie, n'est jamais prise en compte en tant que telle dans les statistiques officielles.

L'Unedic compte 96 500 allocataires (41 038 en 1991), tandis que la Caisse des congés spectacles, association qui assure, en lieu et place des multiples employeurs, le versement des congés payés, fait état de 80 000 personnes.

La Fesac (Fédération patronale des entreprises du spectacle) estime, de son côté, que seulement 60 000 à 65 000 personnes peuvent prétendre à ce régime, c'est-à-dire seulement celles travaillant dans le domaine du spectacle vivant.

Mais, pour la CGT-spectacle, « près d'un intermittent sur deux n'a pas accès au régime d'assurance chômage ».