i la performance d'une DRH était évaluée sur sa capacité à accompagner le redressement de l'entreprise, nul doute que celle des Chantiers de l'Atlantique serait très bien notée.

Carnet de commandes vide, chômage partiel, vieillissement du personnel, conflits sociaux à répétition, disparition programmée des aides de l'Etat, telle était, au milieu des années 90, la situation peu reluisante de la filiale d'Alstom Marine. « A l'époque, nous étions 4 200 salariés sur le site, contre plus de 12 000 dans les années 50. Et nous devions encore descendre à 3 000 », se souvient Alain Allorent, secrétaire du comité d'entreprise et délégué syndical CGT.

Dépêché au printemps 1997 par la direction du groupe Alstom pour gérer, en douceur, la fin de la "navale" à Saint-Nazaire (44), Patrick Boissier change de cap et réoriente l'entreprise sur le créneau des paquebots haut de gamme destinés au marché de la croisière. Dans son sillage, débarque, au poste de DRH, Philippe Bouquet-Nadaud, avec qui il avait noué, quelques années plus tôt, des relations de travail privilégiées chez Tréfimétaux.

En janvier 1998, l'entreprise lance Cap 21, un plan de redressement avec, pour objectifs, de hisser le volume de production à six navires par an, contre deux auparavant, doubler le chiffre d'affaires et diminuer les coûts de 30 % à l'horizon 2000.

Pour Philippe Bouquet-Nadaud, la contribution de la DRH à cette nouvelle stratégie se matérialise dans un plan de développement social, intégrant, notamment, le renforcement du dialogue avec les syndicats, la prévention des risques et l'aménagement du temps de travail.

But de la manoeuvre : réduire le temps de présence des salariés, tout en travaillant plus et mieux afin de soutenir le rythme de production. Résultat, après des négociations marathon avec les syndicats : le travail en 2/8 se généralise. Le site de 120 hectares est réaménagé. Pour compenser le surcroît d'activité, les départs à la retraite et la RTT, 2 400 personnes sont recrutées, dont 60 % de cadres et d'ingénieurs.

« En tant que DRH, je considère que j'ai une obligation de résultats. Le renouvellement de la pyramide des âges, la transmission des savoirs, ainsi que la fidélisation des recrues étaient inscrits dans mon cahier des charges », convient le DRH, que ses pairs viennent de consacrer "DRH de l'année". S'agissant de sa propre équipe, il a procédé au grand toilettage : « Avant mon arrivée, elle était très centralisée et orientée gestion administrative du personnel. Je l'ai adaptée au découpage de notre site avec la nomination de responsables RH de proximité. Le noyau central a, quant à lui, été resserré autour de trois personnes, en charge de la gestion administrative, des relations sociales et du développement des compétences. »

L'équipe RH, qui comptait 150 personnes pour 4 000 salariés avec un faible niveau de qualification, rassemble, aujourd'hui, 46 personnes pour 5 000 collaborateurs. Entretemps, le nombre de cadres a été multiplié par 6.

Forte de la réussite de Cap 21, la direction d'Alstom Marine a lancé un second plan stratégique pour la période 2001-2005. « Nous allons mettre l'accent sur le développement des compétences, l'innovation et la notion d'entreprise élargie, de manière à créer, avec les sous-traitants et les fournisseurs, une communauté d'intérêts », détaille Philippe Bouquet-Nadaud.

Reste que, depuis le 11 septembre 2001, les Chantiers de l'Atlantique sont entrés en récession. « Les commandes se font plus rares. C'est dans cette période de gros temps que la DRH sera jugée sur sa capacité à tenir la barre », souffle le secrétaire du CE.

> Effectifs : 5 000 salariés.

> Chiffre d'affaires : 1 842 millions d'euros, au 31 mars 2001.