logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

SANS

Les députés suspendent deux nouveaux articles

SANS | publié le : 10.12.2002 |

François Fillon est parvenu à tempérer l'ardeur des députés de la majorité, qui souhaitaient durcir sa réforme de la LMS. Ils ont tout de même obtenu la suspension de l'amendement "Michelin" et la modification de la charge de la preuve en matière de harcèlement moral.

Il aura fallu neuf séances aux députés, pour achever, dans la nuit du 5 au 6 dé- cembre, l'examen du projet Fillon de réforme de la loi du 17 janvier 2002, dite de "modernisation sociale". Le texte, qui devait être adopté ce 10 décembre, a suscité de vifs débats, notamment entre Maxime Gremetz (PC) et Gaëtan Gorce (PS), d'une part, et François Fillon et Dominique Dord, le rapporteur du texte, d'autre part. Mais le ministre des Affaires sociales a également dû batailler contre les élus de sa majorité, dont certains réclamaient l'abrogation pure et simple des « dispositions concernant la prévention des licenciements, l'information des représentants du personnel et la lutte contre la précarité de l'emploi, pour revenir au droit antérieur, en attendant le résultat des négociations »

Négociation interprofessionnelle

François Fillon a toutefois soutenu ses troupes sur trois modifications majeures de son projet. Deux concernent son article 1, qui renvoie à la négociation interprofessionnelle neuf articles de la LMS, dont il suspend l'application pendant une période de dix-huit mois (médiateur, étude d'impact, droit d'opposition du CE, non-concomitance des procédures livre IV et livre III, pouvoirs accrus de l'Administration, abandon du critère des qualités professionnelles pour établir l'ordre des licenciements). Les députés ont, ainsi, voté la suspension de deux articles supplémentaires.

L'article 96, d'abord, dit "amendement Michelin", qui oblige à négocier sur les 35 heures avant de présenter un plan de sauvegarde de l'emploi. « D'une part, nous sommes en train d'assouplir la mise en oeuvre des 35 heures. D'autre part, cette disposition semble laisser croire que réduire le temps de travail préserve l'emploi », a justifié son auteur, Chantal Bourragué (UMP), soutenue par le ministre, au grand dam d'Odile Saugues (PS), qui a dénoncé une mesure de "revanche sociale".

L'article 100, qui oblige les entreprises à consulter leur CE avant toute "annonce publique" de nature à affecter les conditions de travail et le volume d'emploi, a également été ajouté aux dispositions suspendues pour dix-huit mois. Ces dispositions « sont inutiles et accroissent la confusion, sans apporter aucune compétence nouvelle au comité d'entreprise », a estimé François Fillon.

Harcèlement moral

Votant sans retouches l'article 2 du projet, qui instaure, pour deux ans, la possibili- té de négocier des accords d'entreprise expérimentaux, fixant des règles de procédure en cas de licenciement économique, les députés ont, en revanche, enrichi le texte d'un article supplémentaire visant à « rééquilibrer la charge de la preuve » dans les affaires de harcèlement moral. Alors que la LMS stipulait qu'un salarié présumé victime devait présenter des « éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement », le nouveau texte prévoit qu'il « établit des faits qui permettent de présumer l'existence » du délit, l'entreprise devant prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement. Une formulation conforme à celle de la directive européenne du 29 juin 2000, relative à la lutte contre les discriminations.

De manière plus anecdotique, les députés ont encore modifié un dispositif de médiation dans les affaires de harcèlement moral, en précisant que le médiateur devait faire l'objet d'un accord entre les parties. A noter qu'ils ont également donner un nouveau nom au texte, devenu « Projet de loi portant relance de la négociation collective en matière de licenciements économiques ».

Les amendements abandonnés à la demande du gouvernement

Plusieurs amendements, pourtant adoptés le 3 décembre dernier par la Commission des affaires sociales, ont finalement été retirés par leurs auteurs, à la demande du ministre. C'est notamment le cas d'un projet de suspension de l'article 105 de la LMS, qui impose aux entreprises donneuses d'ordres d'informer leurs sous-traitants de tout projet de restructuration de nature à affecter le volume d'activité ou d'emploi.

C'est aussi le cas de trois amendements visant à supprimer l'obligation, pour l'entreprise en restructuration, de mettre en oeuvre « tous les efforts de formation et d'adaptation » en vue d'un reclassement interne avant de licencier. Ou encore de l'amendement visant à modifier l'article 111, reprenant la célèbre jurisprudence "Samaritaine", qui permet au salarié, dont le licenciement a été prononcé nul, de demander au juge la poursuite de son contrat de travail (ce qui suppose la réintégration dans l'entreprise et le rattrapage des salaires). Les députés proposaient que ce droit soit remplacé par une indemnité au moins égale aux salaires des douze derniers mois.

Enfin, François Fillon a réclamé le retrait de deux amendements qui visaient, en matière de licenciements économiques, à attribuer au seul chef d'entreprise la responsabilité d'établir l'ordre du jour du comité d'entreprise (aujourd'hui fixé conjointement avec le secrétaire du CE).