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Le plan social "exemplaire" peine à séduire

SANS | publié le : 10.12.2002 |

Un an après la fin de la procédure de consultation sur la restructuration de la branche biscuit de Danone, 55 % des salariés dont le poste est supprimé ont trouvé une "solution". Des résultats jugés décevants par la direction.

Un plan social "Rolls Royce" : c'est ainsi que la direction de Danone aime à présenter le dispositif d'accompagnement social des 794 salariés de Lu à Evry, à Calais et à Château-Thierry, dont le poste est supprimé dans le cadre de la restructuration de sa branche biscuit. « Nous avions décidé, dès le départ, de mettre en place un plan social exemplaire, rappelle Jean-René Buisson, secrétaire général du groupe Danone. Cela a été le cas, tant en termes de mesures et de moyens qu'en termes de temps ».

De fait, principale originalité du dispositif, finalisé en décembre 2001 (voir Entreprise & Carrières n° 608, du 5 février 2002) : aucun salarié sans solution ne doit être licencié avant la fermeture complète de son usine, c'est-à-dire avant juin 2003 pour Calais et juin 2004 pour Evry. En attendant, le personnel continue d'assurer la production, tout en bénéficiant, à raison de deux jours par mois, de l'aide d'un Relais emploi mobilité (REM) pour construire un projet professionnel et s'équiper d'outils de recherche d'emploi.

Mobilité interne

Au premier semestre 2002, les REM se sont focalisés sur la mobilité interne : au terme d'un travail d'identification de leurs compétences et "aires de mobilité", 177 personnes (22 % des salariés concernés) ont trouvé un nouveau poste dans le groupe, notamment dans les usines Lu de Cestas (33) et de La Haye-Fouassières (44). « Un résultat satisfaisant, même si nous sommes un peu déçus dans la mesure où nous devons, aujourd'hui, recruter en externe pour ces sites », juge Jean-René Buisson. Pour les syndicats, sont en cause les différences de rémunération, notamment lorsque le salarié ne retrouve pas de poste de nuit ou de week-end.

Postes externes

Puis, les REM ont entamé la recherche de postes en externe. Occupant jusqu'à 40 personnes à temps plein, ils ont récolté 898 offres valables d'emploi (CDI se situant dans un rayon de 50 km), dont 320 à Calais. Mais pour un résultat bien maigre : seules 20 personnes ont été reclassées à Calais, 35 à Evry et 6 à Château-Thierry. « Il y a une question de timing, assure Jean-Sébastien Blanc, responsable du projet de restructuration chez Lu. Comme les salariés restent en poste, ils ont tendance à retarder le moment de s'occuper de leur avenir. »

Certains examinent les offres, mais préfèrent attendre la proposition idéale. « C'est un vrai problème : cela nous décrédibilise auprès des employeurs que nous avions convaincus de créer des postes, que l'on ne peut finalement pas pourvoir », renchérit Jean-René Buisson. « Les Rem ne proposent rien d'intéressant : le salaire moyen est de 1 295 euros bruts, voire 1 122 à Calais, quand nous gagnons 1 680 euros en moyenne », répondent Farid Djitli et Patrick Régnier, de l'intersyndicale de Lu Evry. La direction reconnaît l'écart salarial (20 % en moyenne), mais rappelle qu'elle s'est engagée à verser une compensation salariale, jusqu'à deux ans après la fin du plan social.

Au total, Danone annonce un "taux de reclassement" de 62 %. Un chiffre qui englobe, outre les mobilités internes et les reclassements externes, 162 "mesures d'âge" (complément aux Assedic payé par l'entreprise, assurant 85 % du salaire net jusqu'à l'âge de 60 ans), 5 créations d'entreprise et une trentaine de "projets personnels" (personnes qui ne souhaitent pas retravailler). Et qui est calculé à partir des 701 salariés qui se sont rendus dans les Rem (55% par rapport au nombre total de salariés à reclasser).

Des réfractaires

En effet, une centaine de personnes refusent toujours de s'engager dans le dispositif de reclassement. Principalement par espoir de voir la fermeture de leur usine suspendue. Les syndicats rappellent d'ailleurs qu'ils mènent encore deux actions en justice pour contester le motif économique des licenciements. Ces réfractaires ont le don d'agacer Danone, qui envisage leur licenciement par anticipation. Et s'interroge même sur la pertinence de sa stratégie : « A partir du moment où des postes sont supprimés et où l'on veut donner la priorité au reclassement, un an me semble être un délai raisonnable », estime Jean-René Buisson. Qui n'entend pas faire du plan social de Lu une norme à généraliser dans le groupe Danone.

REPERES

Le bilan du plan social de Lu

Pour 794 postes supprimés

> 898 OVE proposées.

> 177 mobilités internes, dont 95 réalisées.

> 162 mesures d'âge.

> 61 reclassements externes.

> 5 créations d'entreprise.

> 31 projets personnels.

Réindustrialisation difficile à Calais

Malgré une équipe dédiée à temps plein (Danone initiatives), qui a rencontré 2 500 entreprises, Lu n'a toujours pas trouvé de candidat à la reprise de ses locaux de Calais. « La mairie n'est pas équipée pour faciliter l'implantation d'entreprises et ne fait pas les efforts financiers nécessaires, justifie Jean-René Buisson. Aujourd'hui, on examine, notamment, une parcellisation des locaux pour accueillir plusieurs activités, y compris tertiaires, avec l'objectif de créer 150 à 200 emplois. »

A Evry, le problème s'annonce plus simple, grâce à la bonne localisation du terrain mais aussi à la fermeture plus tardive du site.