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Une réduction du temps de travail encore théorique

SANS | publié le : 03.12.2002 |

Depuis le 1er janvier dernier, les 35 heures ont fait leur entrée à l'hôpital. Mais, par manque de moyens et de personnels, les heures supplémentaires s'accumulent et les jours RTT sont rarement pris.

Surcharge de travail, démobilisation des personnels, désorganisation des établissements, insatisfaction des patients... L'hôpital ne va pas bien. La conclusion du rapport d'Angel Piquemal, chargé de piloter la mission nationale d'évaluation sur les 35 heures (lire encadré) et directeur de l'hôpital de Bayonne, « n'a rien appris que l'on ne savait déjà », précise Yolande Briant, secrétaire générale CFDT-Santé. Elle, comme d'autres, refuse, pour autant, de mettre tous les maux dont souffre le système de santé français sur le dos de la RTT, en place depuis le 1er janvier dernier* pour 757 000 agents et 29 000 médecins hospitaliers.

Certes, la RTT n'a pas arrangé les choses. Mais « elle n'a fait qu'aggraver des dysfonctionnements déjà anciens », souligne Jean Garric, délégué général de l'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers, anesthésiste-réanimateur au CHU de Nancy. En particulier, la pénurie de personnels.

Pénurie d'infirmières

Lors de la signature des accords, le 27 septembre 2001, pour la fonction publique hospitalière, et le 22 octobre 2001, pour les praticiens, le gouvernement s'était engagé à la création, sur trois ans, de 45 000 postes d'infirmière - la profession en réclame d'urgence entre 12 000 et 20 000 - et 2 000 postes de médecin. Mais où les trouver ? « Il faut trois ans pour former une infirmière et dix ans pour un médecin », signale François Thuillier, secrétaire national de la coordination médicale hospitalière, pharmacien biologiste à l'hôpital de Meaux. Un premier pas avait été fait lors du relèvement du numerus clausus à l'entrée des écoles d'infirmières, en 1999, mais il ne produira pas d'effets avant 2003. Restent les opérations d'appoint, comme celle du retour à l'emploi. Lancée l'année dernière, elle visait à convaincre entre 1 % et 5 % des 50 000 infirmières, ayant cessé leurs activités prématurément, de reprendre du service. Seules 62 personnes ont répondu à l'appel. Plus efficace, le programme favorisant l'embauche d'infirmières espagnoles a permis, en huit mois, à 200 d'entre elles de franchir la frontière. Dernier né, le projet "Passerelles", lancé en novembre dernier, consiste à remettre à niveau des infirmières désireuses de reprendre leur métier.

En attendant, les hôpitaux se disputent les futures diplômées à coups de primes à l'embauche et de places en crèche. Quant à celles en poste, elles espèrent pouvoir prochainement travailler 35 heures ou récupérer entre 6 et 20 jours de RTT lorsqu'elles dépassent les 48 hebdomadaires ou les 9 heures quotidiennes admises dans l'accord.

Solution à court terme

Pour les praticiens, le problème est plus épineux. Avec une durée du travail hebdomadaire moyenne de 55 heures, ces derniers sont loin des temps légaux. Alors, pour limiter le cumul des jours RTT non pris, le gouvernement a choisi d'en racheter une partie, jusqu'à 5 jours sur les 20 prévus dans l'accord, sur la base de 300 euros brut par jour. « Cette mesure est valable, mais attention à ne pas la pérenniser, signale Jean Garric. Autrement, c'est la loi que l'on vide de son sens. » Une solution à court terme qui « pourrait être envisagée pour les non-médicaux en attendant un renfort de personnel », propose Emmanuelle Quillet, adjointe au délégué général Fédération hospitalière de France.

Autre coup de pouce gouvernemental : la rallonge budgétaire de 400 millions d'euros pour financer le Compte épargne-temps (CET). Selon l'accord, il est possible pour les médecins d'épargner jusqu'à 30 jours de congés par an et tout ou partie des jours de RTT non pris. Ce transfert court sur sept ans, sauf pour les plus de 55 ans. Alors, la limite d'utilisation du CET est prolongée jusqu'à l'âge de départ à la retraite. « Sept ans, c'est trop juste, nous réclamons dix ans », avance Jean Garric.

La situation s'aggrave

« La situation s'envenime jour après jour », annonce Bernard Sages, secrétaire général de la fédération santé CFTC. Et le pire est à venir. En effet, au 1er janvier 2003, l'ensemble des établissements devront respecter une directive européenne limitant à 48 heures hebdomadaires la durée de travail, gardes comprises, et imposant un repos obligatoire de onze heures. « Elle va provoquer une perte de temps supplémentaire de 10 % », tempête Emmanuelle Quillet. Selon le secteur, cette directive est tout simplement irréalisable.

* Au total, 850 accords 35 heures ont été signés à l'hôpital.

Les principales préconisations du rapport Piquemal

La gestion prévisionnelle des emplois, avec un recensement aussi précis que possible, pour les dix ans à venir, des besoins de postes engendrés par la RTT, mais aussi par les départs en retraite.

Le déblocage d'une allocation supplémentaire de crédits aux établissements en 2003.

Le report des jours RTT non pris en 2002 sur 2003 pour les non-médicaux.

Le maintien à la date prévue de la directive européenne.

L'annualisation du plafond actuel d'heures supplémentaires.

L'allocation de tout ou partie des crédits recrutement en 2004 dès 2003.

Le report de la mise en place des 32 h 30 de nuit prévue pour 2003.

Le rapprochement et la coopération entre activité privée et activité publique.

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