E & C : Comment le social fait-il son entrée dans les assemblées générales d'actionnaires ?

F. F. : Assez timidement, en réalité. En France, pour déposer une résolution, il faut rassembler 0,5 % du capital, ce qui représente souvent plusieurs dizaines de millions d'euros. Les encours éthiques ne représentent pas de tels montants. Quant aux questions orales, les conseils d'administration ne sont pas tenus d'y répondre et, dans les entreprises qui organisent le temps de parole, les derniers se font siffler au terme d'AG parfois très longues.

E & C : La situation peut-elle évoluer ?

F. F. : En théorie, des convergences sont possibles entre des investisseurs et des organisations syndicales. Mais, pour un syndicat qui souhaite recueillir le soutien des investisseurs traditionnels, il faut savoir se positionner sur le terrain des intérêts de long terme de l'entreprise. Même avec les fonds de pension américains les plus actifs, généralement du secteur public, il est encore rare qu'une thématique syndicale soit relayée par les investisseurs. Et, quels que soient les acteurs, il faut faire le lien entre des questions sociales et les performances à long terme.

Mais le bénéfice peut être important grâce à l'effet de levier : une résolution dé- posée par des acteurs représentant 0,5% du capital pourra, au final, être votée par 20 % des actionnaires, ce qui représente un poids énorme en termes de capitalisation. Il faut, pour cela, que l'action soit bien préparée, que de multiples investisseurs soient approchés.

E & C : Comment l'Orse participe-t-il à cette évolution ?

F. F. : Nous examinons les pratiques de ceux qui se sont posé ces questions, notamment dans les pays anglo-saxons. Nous sommes en train de constituer une base de données sur ce sujet, détaillant, par exemple, les stratégies de concertation mises en oeuvre entre investisseurs.