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FACILITER LE RETOUR VERS L'ENTREPRISE

SANS | publié le : 04.06.2002 |

La discrimination due à l'état de santé est une réalité vécue quotidiennement par les malades comme par les ex-malades dans leur entreprise. Les progrès thérapeutiques et les aides de l'Etat aux employeurs permettent pourtant de concilier emploi et problèmes de santé.

Chaque année, 20 000 personnes perdent leur emploi pour des raisons liées à leur état de santé (1). Pour une grande partie d'entre elles, cela aurait pu être évité. Malgré une loi et une jurisprudence renforcées (voir p. 15), la discrimination vis- à-vis des malades est une réalité, de l'embauche à la fin du contrat de travail.

« Dans un monde du travail qui recherche toujours plus de performances pour réaliser des profits de plus en plus élevés, le malade n'est pas celui qui va présenter le meilleur profil », indique le Dr Barouhiel, médecin du travail. La recherche de performances va jusqu'à éliminer les candidats guéris, mais qui présentent des risques de rechute.

Risques de rechute

Une DRH d'une entreprise de services se souvient, avec remords, de n'avoir pu retenir un candidat à un poste directement en contact avec la clientèle parce que, neuf mois auparavant, il avait subi un triple pontage cardiaque. « Il présentait des risques pour l'entreprise en termes de rechute ou d'arrêt maladie. Je n'ai pas su trouver les arguments pour imposer son embauche et je le regrette d'autant plus qu'il était le meilleur candidat et que la personne choisie à sa place n'a finalement pas fait l'affaire. On se trouve dans un système où chacun ouvre son parapluie et laisse au bord de la route des gens dont la personnalité est pourtant renforcée par les épreuves qu'ils ont subies. »

L'accident mieux accepté que la maladie

La maladie peut générer de telles préventions qu'il vaut mieux parfois la cacher. Chargé de mission au Girpeh Ile-de-France (Groupement inter- professionnel pour la promotion de l'emploi des handicapés), Jean-Pierre Paray suggère d'évoquer un accident de la route pour justifier un blanc dans un CV ou des traitements. « Les gens ne sont pas du tout dans le même état d'esprit vis-à-vis des accidentés que face à des malades. Il y a, dans l'accident, le côté rééducation, une dimension de courage qui inspire du respect. »

La réintégration après la maladie est souvent difficile à vivre. « Nous recevons beaucoup de témoignages sur des mises au placard, indique Claire Compagnon, directrice de programme à la Ligue nationale contre le cancer. Les malades se sentent souvent rejetés pour deux raisons : on considère, souvent sans que cela ait été vérifié, qu'ils sont devenus inefficaces et ils sont victimes du tabou de la maladie qui existe dans l'entreprise comme dans la société tout entière. Conséquence : ils ne sont plus pris en compte dans la vie de l'entreprise. »

Et pourtant, médecins, associations et malades sont tous d'accord : le travail a des vertus thérapeutiques. Une étude, menée sur des personnes atteintes d'une sclérose en plaques, a montré que celles qui ne travaillaient pas développaient davantage la maladie que celles qui travaillaient.

La lutte contre cette discrimination, particulièrement injuste, passe d'abord par l'information des acteurs de l'entreprise sur les maladies elles-mêmes. « Il y a encore des gens qui croient que le cancer est contagieux », affirme Claire Compagnon. Le travail réalisé par Aides auprès des entreprises (voir p.16) pourrait inspirer d'autres associations de malades.

Progrès thérapeutiques

De plus en plus, les entreprises devront compter avec les malades et les anciens malades. Les progrès thérapeutiques, parfois spectaculaires, favorisent la reprise du travail. Environ 1 million de personnes ont eu un cancer et en sont guéries, et la moitié ont entre 25 et 55 ans ; les malades du sida, condamnés à mort il y a six ans, vivent grâce aux multithérapies.

Parallèlement, les risques de maladie nous concernent tous : une personne sur trois aura un cancer. Les associations ont beaucoup lutté pour établir un droit des malades dans la sphère médicale et privée. La loi relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé (2) en est le résultat. Elles vont maintenant s'intéresser au monde du travail. « Cela va devenir l'une de nos priorités », confirme Claire Compagnon.

Les associations en première ligne

La Ligue nationale contre le cancer a ainsi monté des groupes de travail sur l'insertion professionnelle et a invité Nicole Notat à l'un d'entre eux (3). Et, quand il le faudra, les associations sauront saisir le nouveau droit que leur confère la loi contre les discriminations (6 novembre 2001) d'agir individuellement en justice pour obtenir réparation d'un préjudice.

Pour le docteur Barouhiel, intégrer les malades participe de « l'ingénierie des ressources humaines » : « La façon dont on traite les plus faibles reflète le climat social de l'entreprise. Quand une entreprise intègre bien les malades et, mieux encore, mène une véritable politique de santé en amont, on constate une baisse de l'absentéisme et une augmentation de la motivation des salariés. Cette meilleure gestion des ressources humaines est vecteur de performances. »

(1) Chiffres du ministère de l'Emploi.

(2) Loi 2002-303 du 4 mars 2002.

(3) La revue CFDT magazine, de mai 2002, s'en fait l'écho.

L'essentiel

1 Chaque année, 20 000 personnes perdent leur emploi pour des raisons liées à leur état de santé.

2 Pourtant, médecins, associations et malades sont tous d'accord : le travail a des vertus thérapeutiques.

3 Aménagement d'horaires, mi- temps thérapeutique, aména-gement de poste : les outils de maintien dans l'emploi des malades sont multiples et bénéficient d'aides financières de l'Agefiph.

4 La loi du 16 novembre 2001, relative à la lutte contre les discriminations, renverse la charge de la preuve : c'est désormais à l'employeur de prouver qu'il n'y a pas discrimination.

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