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L'inquiétude sur la pratique des quotas se propage

SANS | publié le : 23.04.2002 |

Alors que l'instruction du dossier Hewlett-Packard au TGI de Grenoble aura lieu le 25 avril, des syndicalistes s'inquiètent des dérives possibles des systèmes de notation dans leur propre entreprise.

Les "affaires" IBM et HP ont eu le mérite de délier les langues. Si elles revêtent des atours plus ac- ceptables, des pratiques de notation accompagnée de quotas semblent exister dans d'autres entreprises. C'est la crainte qu'ont exprimée des délégués syndicaux (CGT, CFDT, CGC), réunis le 15 avril dernier à Paris. Selon eux, des dispositifs similaires ont été mis en place dans des filiales de groupes tels que Alcatel CIT, Schneider Automation ou encore ST Micro- electronics et Ericsson. Les systèmes d'évaluation ne sont pas, pour autant, rejetés en bloc par les syndicats présents, si tant est qu'ils soient subordonnés à l'atteinte de résultats et qu'ils ne se traduisent pas par une application « aveugle de quotas prédéfinis ».

Dérives discriminatoires

Selon Christian Pilichowski, secrétaire général de l'Union fédérale ingénieurs cadres techniciens (Ufict) de la CGT Métallurgie, ces pratiques « ouvrent la porte à des dérives discriminatoires, en relation avec le temps de travail, la santé, la maternité... ». Il existe, en l'espèce, des précédents fâcheux. A la demande d'Elisabeth Guigou, l'inspection du travail est toujours penchée sur le cas IBM, tandis que la direction insiste sur le fait que le processus d'évaluation n'est, en aucun cas, un moyen déguisé pour licencier. Sans attendre les conclusions de l'inspection du travail, qui seront rendues, selon le ministère, après les élections présidentielles, la CFDT réclame déjà « l'annulation des notations 4 [la note la plus basse] pour 2001 ».

La CGT va lancer, de son côté, une campagne internationale via le réseau Iwis (IBM workers international solidarity), pour enjoindre la direction de renoncer à ce système. Paul Desaigues (Ufict CGT d'IBM France) propose d'assortir le nouveau système d'engagements de la direction, destinés à garantir le pouvoir d'achat du salarié, et à « reconnaître les qualifications en instaurant une grille de classifications uniques ». Autre cas d'école : Hewlett-Packard (*). Dans un courrier, datant du 9 mars 2001, l'inspection du travail demandait à l'entreprise de remettre en cause « le caractère disciplinaire du classement », et d'intégrer cette question dans le cadre de ses négociations annuelles obligatoires.

"Codes de performance"

Ces expériences ne sont pas uniques. En effet, une note, rédigée en anglais, datant du 8 janvier 2001, provenant de la DRH d'Alcatel CIT, indique que les managers doivent établir des "codes de performance", selon une ventilation prédéfinie, s'échelonnant d'un niveau faible (1 et 2), concernant 5 % des collaborateurs, à une classe 5 (la plus haute), à attribuer à 5 % des subordonnés. Dans cette lettre interne, il est notifié que si la ventilation des "codes de performance" s'écarte de ce modèle, le manager doit s'en expliquer.

Enfin, le document stipule que la notation a un impact direct sur le niveau du bonus perçu par le salarié. « Nous reprochons au système son caractère déloyal, s'inquiète Dominique Campagne, délégué syndical central CGT d'Alcatel CIT, car le supérieur hiérarchique a déjà fixé sa note avant même d'avoir reçu son subordonné. Avant l'an passé, l'entretien individuel était l'occasion d'échanges constructifs. Ce n'est plus le cas. » Pour sa part, la direction du groupe se défend de mettre en oeuvre des politiques de quotas, sans contester l'existence de dérives : « L'initiative en question n'est le fait que d'un cadre isolé, exerçant dans une filiale ne comptant guère plus de 2 000 salariés. »

Une note D

Autre cas mis en exergue par les syndicats : celui d'une filiale du fabricant de semi-conducteurs ST Microelectronics, où l'entretien individuel est obligatoire pour toutes les catégories de personnel, soit 10 000 salariés en France. « A la fin février, témoigne Marc Leroux, délégué central CGT, au cours d'une réunion des chefs de service de notre unité, il a été établi que 3 % des effectifs devaient obtenir une note D. » « Pas de quotas », rétorque la direction, qui récuse l'existence de telles pratiques.

(*) L'affaire, instruite en référé le 25 avril, s'appuierait sur l'application d'un quota de 5 % des effectifs à positionner en classe 1.

Schneider : une pratique réprouvée

Chez Schneider Automation France, qui compte 785 salariés (sur 21 500 pour Schneider France), « la charte d'entretien d'appréciation s'appuie sur une terminologie qui ne permet plus d'évaluer la qualité d'expertise, indique Eddie Gritteret, délégué syndical central CFTC, mais qui repose essentiellement sur des considérations subjectives ». « Ce qui est grave, ajoute Antoine Marchese, délégué syndical central CGT, c'est qu'en 1999, deux salariés ont été licenciés parce qu'ils avaient des notes médiocres. » Pour ne rien arranger, une note émise, fin février dernier, par la direction locale, prône l'instauration de quotas. L'objectif : noter un tiers des collaborateurs à 2 (mauvais), un autre tiers à 3 et, enfin, attribuer au dernier tiers une note de 4 (bonne note). « Dès que nous en avons pris connaissance, nous sommes intervenus pour y mettre un terme, affirme Michèle Chéron, directrice du développement des RH du groupe. Ce genre de pratiques ne correspond absolument pas à la philosophie du groupe. »

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