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L'Europe veut ouvrir la porte aux étrangers

SANS | publié le : 09.04.2002 |

Le Comité économique et social européen propose la création d'un permis de séjour pour demandeurs d'emploi étrangers. Une idée bien reçue en France où, à l'instar des autres pays de l'UE, l'on souhaite assouplir les conditions de délivrance d'autorisation de travail.

Ouvrir les vannes de l'immigration et reconnaître les bienfaits de l'entrée d'étrangers à des fins d'emploi salarié dans les pays de l'Union européenne : c'est à peu près l'objectif poursuivi par le Conseil européen qui, dans une directive, propose d'assouplir les conditions d'entrée actuellement en vigueur. Il répond ainsi à une communication de la Commission européenne qui considère que l'absence de voies juridiques appropriées pour canaliser l'immigration des travailleurs est l'une des raisons pour lesquelles cette immigration se déroule dans l'illégalité. La Commission estime, également, que les nécessités démographiques et économiques auxquelles les pays de l'Union sont confrontés exigent une politique plus ouverte en matière d'immigration des travailleurs.

"Permis de séjour-travailleur"

Le Conseil européen propose donc la création d'un "permis de séjour-travailleur" délivré, initialement, pour une durée maximale de trois ans et renouvelable. Il peut être demandé par un étranger à partir de son pays d'origine ou dans le pays d'accueil où il séjourne légalement, à condition qu'il soit en possession d'une offre d'emploi et qu'il présente des garanties en termes de qualification et de ressources. L''employeur qui apporte la preuve que l'emploi vacant ne peut être pourvu par un ressortissant communautaire a aussi la possibilité de formuler la demande.

Dans un avis à valeur consultative, le Comité économique et social (CES) européen va plus loin. « L'unique voie légale d'immigration pour les travailleurs dont traite la proposition de directive est celle qui consiste à être en possession, au préalable, d'une offre d'emploi, explique Pariza Castanos, le rapporteur du CES et, par ailleurs, directeur du syndicat espagnol Comisiones Obreras. Or, ce ne peut être la seule. Cette voie est appropriée aux travailleurs saisonniers et aux travailleurs spécialisés, ainsi qu'au recrutement par les moyennes et grandes entreprises. Mais lorsque l'employeur est un particulier, comme pour les travaux ménagers, l'aide à domicile pour enfants ou pour personnes âgées, ou lorsqu'il s'agit d'un artisan ou d'une petite entreprise, une rencontre préalable entre l'employeur et le migrant est nécessaire. »

C'est pourquoi le CES propose la création d'un permis d'entrée et de séjour à caractère temporaire, d'une durée de six mois pour la recherche d'un travail . Conditions de délivrance : le demandeur doit justifier de ressources suffisantes et d'une assurance maladie, et fournir des informations sur ses connaissances professionnelles.

Le CES estime également que la demande de "permis de séjour - travailleur" ne doit pas rester exclusivement réservée aux étrangers en situation régulière. « Cette restriction peut empêcher toute possibilité de régularisation pour les immigrés qui se trouvent momentanément en situation irrégulière. En revanche, en leur offrant la possibilité de présenter leur demande dans l'Etat dans lequel ils sont entrés illégalement, ils pourront sortir de l'irrégularité », considère Pariza Castanos.

Des étrangers qualifiés

On peut se demander si ces deux propositions du CES trouveront un écho favorable. Loin de réclamer un recours aveugle à l'immigration, les entreprises exigent surtout d'avoir la possibilité de faire appel à des étrangers qualifiés possédant des compétences spécifiques. Par ailleurs, en France, où le taux de chômage reste élevé, les partenaires sociaux peuvent craindre que les étrangers entrés sur le sol français pour trouver un emploi aillent, au final, grossir la cohorte des demandeurs d'emploi ou tombent dans la clandestinité une fois les six mois écoulés. Sans oublier qu'avec 2,2 millions de chômeurs, la France dispose déjà d'un réservoir de main-d'oeuvre inexploitée.

L'essentiel

1 Le débat sur le recours à la main-d'oeuvre étrangère pour pallier les pénuries de recrutement agite tous les pays de l'Union européenne.

2 Dans une directive, le Conseil européen propose la création d'un permis de séjour travailleur accordé pour une durée maximale de trois ans.

3 Le Comité économique et social européen recommande d'élargir ce permis aux étrangers en situation irrégulière afin de mieux lutter contre l'immigration clandestine.

Le cheminement d'une proposition de directive

En matière d'immigration, la Commission européenne et le Conseil européen se partagent le droit d'initier des projets de loi. Cette fois-ci, l'initiative revient à la Commission. A partir de la communication de la Commission, le Conseil européen a élaboré une proposition de directive transmise pour avis consultatif au Comité économique et social, au Comité des régions et au Parlement.

Le projet de directive revient ensuite devant le Conseil, qui devra l'adopter en tenant compte ou non des avis émis. « L'adoption par le Conseil européen peut prendre beaucoup de temps, commente Pierluigi Brombo, administrateur au CES, car il est toujours difficile de trouver l'unanimité sur ces dossiers. » Une fois adoptée, la directive devra être transposée dans le droit national des Etats membres.

Les conditions actuelles en France

Première étape : l'ANPE. L'employeur dépose son offre d'emploi. Si aucun candidat ne se présente dans les cinq semaines, l'ANPE donne son accord et l'entreprise dépose une "demande d'introduction en France d'un salarié étranger" à la Direction départementale du travail (DDTEFP). Le dossier est transmis à l'Office des migrations internationales (OMI) qui sollicite l'aval du ministère de l'Intérieur. L'OMI fait suivre le dossier au consulat de France du candidat. Celui-ci dépose alors une demande de visa de long séjour.

A son arrivée en France, le candidat est convoqué par l'OMI, puis se présente à la préfecture pour obtenir une carte de séjour valable un an. Elle est renouvelable un an pendant trois ans. Au bout de la quatrième année, le travailleur peut demander à bénéficier d'un titre de résident valable dix ans.

Depuis le 15 janvier, la France a assoupli les conditions de délivrance des autorisations de travail aux étrangers présentant pour les entreprises "un intérêt technologique et commercial". Deux circulaires, des 15 et 16 janvier 2002, des ministères de l'Emploi et de l'Intérieur recommandent aux DDTEFP d'apprécier les demandes des entreprises en prenant en compte la qualification du demandeur, attestée par un haut niveau d'études et une spécialisation particulièrement recherchée, un cursus professionnel à l'étranger et la maîtrise de plusieurs langues étrangères. L'existence de l'un ou l'autre de ces critères doit conduire à un examen favorable de la demande.