logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

SANS

UN DIALOGUE SOCIAL A INVENTER

SANS | publié le : 12.03.2002 |

De plus en plus nombreuses et créatrices d'emplois, les PME restent pourtant un "désert syndical". Les lois Aubry ont remis le sujet au goût du jour et les partenaires sociaux sont à la recherche de modes de représentation des salariés adaptés à la réalité de ces entreprises.

Plus de la moitié des salariés appartiennent à une entreprise de moins de 50 personnes. Or, la quasi-totalité des entreprises de moins de 10 salariés (où il n'existe aucune obligation légale) et les deux tiers des établissements de 10 à 49 salariés ne sont couverts par aucune institution représentative du personnel. Ces deux chiffres suffisent à résumer l'ampleur du phénomène : la majorité des salariés français restent privés de droits sociaux, des plus élémentaires, tels que celui d'être représenté par un interlocuteur "officiel" auprès de la direction, aux plus "accessoires" (titres-restaurant, chèques-vacances, épargne salariale...). Et cette population devrait encore augmenter si la tendance à la destruction d'emplois dans les grandes entreprises, en faveur de créations dans les plus petites, qui prévaut depuis vingt-cinq ans, se poursuit.

Pourtant, dès 1982, les lois Auroux avaient imaginé des dispositifs (commission paritaires locales, délégués de site...) pour pallier l'absence de délégués syndicaux et de représentation élue du personnel dans ces entreprises. Mais ces derniers étaient restés, peu ou prou, lettre morte. Puis sont arrivées les lois Aubry, qui, rendant la réduction du temps de travail obligatoire, ont conditionné les aides de l'Etat à la signature d'un accord.

Une étape importante

« Les négociations sur les 35 heures ont marqué une étape, elles nous ont bousculés mais nous ont aussi permis de nous asseoir autour d'une table et de traiter, outre la réduction du temps de travail, de nombreux sujets : compétences, organisation du travail... », souligne Françoise Daphnis, secrétaire en charge du projet confédéral "développement de l'action syndicale auprès des PME " de la CGT. « Il y a eu un travail de découverte à grande échelle, renchérit Jacques Rastoul, délégué confédéral CFDT aux PME : les patrons ont vu que les syndicats n'étaient pas seulement des empêcheurs de tourner en rond ; les militants ont compris que les PME, ce n'était plus Zola ; et les salariés ont pu côtoyer des syndicalistes en dehors d'une situation de rupture de contrat. »

Des propos que ne désavouerait pas Robert Buguet, président de l'Union professionnelle artisanale (UPA) et chef d'une petite entreprise de bâtiment, qui, depuis la négociation sur la RTT, ne tarit plus d'éloges sur les vertus du dialogue social ! Des paroles qui s'accompagnent d'actes, puisque l'UPA a signé, le 12 décembre dernier, avec les cinq centrales syndicales de salariés, un accord sur ce thème. L'objectif : permettre de négocier de nouveaux droits sociaux pour les salariés de ces petites entreprises confrontées à d'importantes difficultés de recrutement.

Employeurs plus attractifs

La principale raison de cette soudaine conversion des petits patrons au dialogue social réside, en effet, dans la nécessité de devenir des employeurs plus attractifs : « Voilà vingt ans, nous n'aurions jamais parlé de chè- ques-vacances, reconnaît Robert Buguet. Mais aujourd'hui, l'artisanat représente plus de 16 % des emplois. Il est temps que le réalisme s'impose ! »

Et si le Medef et la CGPME fustigent l'accord UPA, ces deux organisations ont pourtant signé, avec l'UPA, la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC et FO, la "position commune sur les voies et moyens de l'approfondissement de la négociation collective" du 16 juillet dernier, par laquelle elles s'engagent à « renforcer l'effectivité de la représentation du personnel, en particulier des petites entreprises, en tenant compte des caractéristiques qui leur sont propres, afin d'élargir le nombre de salariés bénéficiant d'une représentation collective ».

Dans ce texte, les partenaires sociaux proposent, notamment, de manière expérimentale, la signature d'accords collectifs par les élus du personnel ou des salariés mandatés, qui ne seraient toutefois opérationnels qu'après approbation par une commission paritaire de branche, dans le premier cas, ou par la majorité des salariés dans le deuxième.

Pour autant, si ces solutions sont envisageables dans les moyennes entreprises dépourvues de délégué syndical ou d'institution représentative, pour les plus petites, une chose est sûre : « Les conditions ne sont pas réunies pour un dialogue social de qualité dans l'entreprise, souligne Françoise Daphnis. Nous sommes en faveur de structures locales proches, adaptées aux nouveaux lieux de travail, comme les zones d'activité. »

Accords déconcentrés

« L'erreur, jusque-là, est d'avoir voulu développer le dialogue social dans les PME au travers de délégués de site ou de salariés mandatés dans l'entreprise, affirme, quant à lui, Jean-François Veysset, vice-président aux affaires sociales de la CGPME. Il faut au contraire que les représentants des salariés et des chefs d'entreprise puissent négocier dans le cadre d'accords nationaux ou de bran- che déconcentrés au niveau territorial. »

« Un délégué syndical dans une TPE, cela n'a pas de sens, renchérit Robert Buguet. Que ce soit pour les chèques-vacances, la prévoyance ou l'épargne salariale, nous sommes obligés de passer par des formes de mutualisation. »

Commissions paritaires

Des attentes qui militent clairement pour le développement des commissions paritaires locales ou régionales, professionnelles ou interprofessionnelles. La délégation PME de la CFDT en a ainsi fait l'un de ses axes revendicatifs : ces structures, affirme-t-elle, « peuvent assurer une régulation sociale de proximité, une sorte de guichet unique, un intermédiaire nécessaire entre les branches professionnelles nationales et les millions de petites et très petites entreprises ».

L'essentiel

1 Les petites et moyennes entreprises emploient la grande majorité des salariés. Or, ces PME brillent par la faiblesse de l'implantation syndicale et des autres formes de représentation du personnel.

2 Pendant de nombreuses an- nées, syndicats et patronat se sont satisfaits de cette situation. Mais les 35 heures, en imposant la conclusion d'accords collectifs, ont changé la donne. Tout comme les difficultés à attirer les jeunes dans ces entreprises.

3 Dans leur recherche d'un modèle de dialogue social adapté au contexte des PME, les partenaires sociaux entendent miser sur l'externalisation et la mutualisation, au travers, notamment, du développement des commissions paritaires locales.