Agilent, société informatique de la Silicon Valley, finit parmi les meilleures entreprises du classement du magazine Fortune, alors qu'elle a licencié et réduit les salaires. Mais elle l'a fait avec tact. Une nouvelle tendance, outre-Atlantique.
Nous sommes avec vous », «J'apprécie ce que vous êtes en train de faire ». Les auteurs de ces messages électroniques, envoyés à Ned Barnholt, le Pdg de l'entreprise californienne high-tech Agilent Technologies, sont des salariés tout juste licenciés ou sur le départ. Etonnant ? C'est qu'il y a manière et manière de faire ses adieux à un collaborateur. D'habitude, aux Etats-Unis, on ne prend pas de gants. Le licencié doit quitter l'entreprise dans l'heure (one hour notice), accompagné de gardes du corps. «Nous, nous voulions agir avec dignité, explique Karen Scussel, vice-présidente des relations humaines d'Agilent. Nous accordons de la valeurs à nos salariés... seulement, il n'y avait plus assez de travail pour tous. »
La direction d'Agilent, une ex-division de Hewlett-Packard, a si bien géré ce passage difficile qu'après avoir licencié 8 000 personnes et réduit les salaires, elle se retrouve à la 31e place du fameux classement du magazine Fortune des 100 entreprises où il vaut mieux travailler !
Alors qu'Agilent est en difficulté depuis le début de l'année 2001, la direction a joué à fond la carte de l'information, ne laissant rien ignorer de la situation de l'entreprise aux salariés. Ils ont d'abord appris à limiter leurs notes de frais et achats de matériel. Puis, les salaires ont baissé temporairement de 5 % à 10 %. Et quand cela n'a plus suffi, le Pdg a envoyé 3 000 cadres supérieurs se former, chez DBM, aux licenciements en douceur : comment choisir les sacrifiés ? Et comment les informer... personnellement, l'un après l'autre, avant d'annoncer la nouvelle à Wall Street ? La méthode a plu.
Bon gré, mal gré, Agilent se retrouve ainsi à l'avant-garde d'un nouveau mouvement aux Etats-Unis : le licenciement avec compassion... La presse spécialisée a ainsi détaillé quelques cas de salariés médusés de voir leur patronne fondre en larmes en leur indiquant la porte. « Les entreprises construisent un bon climat. Elles montrent aux survivants, submergés par les nouvelles tâches, comment elles entendent traiter leur personnel », apprécie Emory Mulling, patron des companies Mulling à Atlanta, expert en recrutement et coaching. «A l'avenir, nous pourrions très bien vouloir réembaucher les partants, souligne Karen Scussel. Et s'ils vont travailler pour un fournisseur ou un client, il est important qu'ils partent avec une bonne image de la société.»
Effectif : 41 000 salariés.
Chiffre d'affaires : 8,4 milliards de dollars, pertes nettes en 2001: 126 millions de dollars.
