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Quand le rapport au travail tue

SANS | publié le : 12.02.2002 |

Les journées de prévention du suicide se sont intéressées aux conditions de travail, comme aux effets dévastateurs des licenciements.

Si le harcèlement moral fait de plus en plus parler de lui, le suicide lié au travail reste encore largement tabou. Les Journées internationales pour la prévention du suicide, tenues du 4 au 7 février dernier, permettent de lever un coin de voile.

Christian Larose, responsable de la CGT-Textile, a souligné combien la privation de travail pouvait aussi être une forme de violence psychique. Ainsi, parmi les licenciées de l'usine Levi's de La Bassée (59), deux se sont suicidées. Et, dans le secteur du textile où s'enchaînent fermetures et licenciements massifs, le syndicaliste dé- nombre une quarantaine de suicides en huit ans.

« Il est anormal que la santé ne soit pas systématiquement prise en compte dans les plans sociaux », a-t-il affirmé. Le dispositif qui avait été négocié dans le cadre du conflit à l'usine textile de Mosley, à Hellemes (59), permettant un suivi psychologique et médical des salariés pendant deux ans, reste exceptionnel.

Révision du Code du travail

Christian Laroze propose donc la création systématique d'une cellule constituée de médecins et de psychologues rémunérés par la société, en cas de reprise d'entreprise. Il souhaite aussi une révision du Code du travail permettant, en cas de cession, d'exiger la coresponsabilité du vendeur pendant deux ans au moins.

Dans l'entreprise, la psychiatre Marie-France Hirigoyen a signalé des dérives préoccupantes du management : « Dans certains cas, le harcèlement moral, qui était le fait d'un comportement déviant, est devenu une stratégie d'entreprise et un outil de management. »

Quant à Didier Naud, chercheur au CNRS, il diagnostique de façon plus pessimiste encore les relations du travail, analysant le management comme « une source de désespoir ». L'injonction paradoxale y serait la norme, qui consiste à demander une chose et son contraire : exercer sa responsabilité pourvu qu'elle soit toujours soumise à l'autorité ; décentraliser la prise de décision si les délégations de pouvoir ne sont pas dangereuses pour la hiérarchie...

Tout aussi préoccupante, selon lui, la perte du pouvoir d'argumentation. Difficile de faire valoir pleinement ses compétences ou d'établir les bases d'un discours rationnel : « Toujours inquiets des conséquences de leur liberté de parole, les professionnels vérifient chaque jour l'impossibilité d'obtenir une délibération libérée des rapports de force, de l'arbitraire du pouvoir, du culte du statut. »

Quant au docteur Patrick Legeron, il a enfoncé le clou, parlant d'une « pression extrêmement importante ». Pour lui, « tous les indicateurs sont au rouge en ce moment en ce qui concerne le stress au travail ». Voici prévenus les managers et les DRH.