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Ben & Jerry's Mondialisés mais toujours militants

SANS | publié le : 05.02.2002 |

Acheté par Unilever, qui compte sur l'image de marque sociale et généreuse de Ben & Jerry's pour lui assurer une place en Europe, le glacier, connu pour son implication ancienne dans le développement durable et l'aide aux défavorisés, entend maintenir son orientation militante.

Pour un choc de cultures, c'en fut un. Il y a deux ans, Ben and Jerry's, spécialiste américain des glaces à supplément d'âme, indiquant ne pas faire du profit sa principale et unique préoccupation, passait sous la tutelle du géant agroalimentaire anglo-néerlandais Unilever, peu suspect d'avoir la philanthropie pour raison sociale. Emoi chez les actionnaires et les fidèles du glacier, qui montent des sites Internet d'opposition et des rassemblements de rues. C'est que Ben Cohen & Jerry Greenfield ne sont pas tout à fait des patrons comme les autres, et leur entreprise est connue bien au-delà des frontières américaines autant pour son engagement social que pour ses parfums riches et excentriques.

Joyeuse PME mise sur orbite en 1978 par deux hippies dans une station-service abandonnée du Vermont, la marque, malgré son ascension, a conservé son projet d'entreprise d'origine : créer et prouver la validité d'un nouveau concept de conduite d'entreprise fondé sur une prospérité partagée (linked prosperity), « traiter avec respect les individus dans l'entreprise, mais aussi en dehors, ainsi que la communauté à laquelle ils appartiennent ».

Ben & Jerry's a accordé des stock-options à tout son personnel à plein temps, lesquelles se sont transformées en jackpot avec le rachat de l'entreprise par Unilever pour quelque 380 millions d'euros, et s'efforce d'assurer des salaires un peu supérieurs au niveau du marché. Même si la règle des débuts, selon laquelle la plus haute rémunération ne devait pas être plus de cinq fois supérieure à la plus basse, a disparu en route. L'appel à un nouveau directeur général en 1997 a, en effet, déjà fait entrer quelques ferments de management plus traditionnel et "réaliste". Mais, c'est surtout par leur souci du développement durable et de l'écologie que les glaciers au grand coeur ont construit leur image : ils choisissent leurs fournisseurs parmi les coopératives de petits fermiers du Vermont qui produisent du lait sans hormones, les communautés indiennes pour les myrtilles ou mexicaines pour le café, l'association d'insertion Greyston Bakery pour les brownies... Ils cèdent des franchises, les partnershops, à des associations de réinsertion (douze aux Etats-Unis) qui doivent concilier rôle social et rentabilité, ils affectent 7,5 % des bénéfices avant impôts à diverses bonnes causes. Avec un tel pedigree, le mariage avec une multinationale pouvait être houleux. Et Ben Cohen disait ne plus reconnaître son oeuvre : « Juste une autre marque, sans esprit, sans coeur, sans âme. »

Unilever ne pouvait rester en froid avec une marque à très forte reconnaissance, à qui le groupe assigne l'objectif de passer de 350 millions à 1,1 milliard d'euros de chiffre d'affaires en conquérant l'Europe continentale.

Unilever s'est donc rabiboché avec Ben Cohen en l'aidant à créer un fonds de 5 millions de dollars censé investir dans des compagnies en zones déshéritées. Et l'on s'est empressé de réaffirmer le soutien aux bonnes causes de Ben et Jerry's. Parmi les plus récentes : l'aide aux étudiants noirs et, selon le Financial Times, le soutien à deux organisations qui avaient été parmi les initiatrices des manifestations anti-mondialisation de Seattle en 1999. Peut-être un dernier clin d'oeil des anciens hippies aujourd'hui globalisés.

REPERES

800 salariés.

350 millions d'euros de chiffre d'affaires.

Date de création : 1978.