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Attention au choc du papy-boom

SANS | publié le : 05.02.2002 |

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Attention au choc du papy-boom

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Les entreprises françaises devront faire face à une pénurie de main-d'oeuvre à l'horizon de 2004 : entre 40 000 et 60 000 cadres pourraient faire défaut chaque année jusqu'en 2010. C'est ce que montrent les projections de l'Apec.

Les entreprises françaises vivraient-elles sous une épée de Damoclès sans le savoir ? Selon les prévisions de l'Apec (Association pour l'emploi des cadres), les entreprises vont connaître une pénurie de cadres, d'ici à 2004 qui risque de pénaliser leur fonctionnement interne. Les données sont pourtant connues depuis longtemps : à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les pays développés ont connu une flambée de la natalité et cette génération, dite du baby-boom, commencera à faire valoir ses droits à la retraite à partir de 2004. Compte tenu de la baisse de la natalité, les actifs ne seront plus assez nombreux... pour remplacer le départ des personnes nées entre 1945 et 1955.

« Le nombre de cadres à remplacer pourrait pratiquement doubler entre le début et la fin de la période 2001-2010 », avertit Jacques Monier, président de l'Apec. Ainsi, alors que les entreprises ont remplacé l'an dernier quelque 47 000 cadres partis en retraite, elles devront en remplacer 89 000 en 2007, puis autant en 2008 pour le même motif. Au total, entre 2001 et 2010, c'est-à-dire en l'espace de dix ans, ce sont quelque 755 000 postes qui vont se libérer, selon l'Apec, soit 200 000 de plus qu'au cours de la décennie précédente. Ils s'ajouteront aux emplois que les entreprises privées vont continuer à créer dans l'encadrement.

En prenant pour hypothèse un taux de croissance équivalent à celui de ces dix dernières années (2,6 % l'an), l'effectif cadre devrait ainsi progresser de 625 000 personnes en dix ans. Cela représente au total 1 380 000 cadres à embaucher. Et ce, sans compter le secteur public, confronté, lui aussi, à une accélération des départs à la retraite ; 500 000 cadres partiront entre 2004 et 2010.

Selon le scénario de l'Apec, les difficultés apparaîtront dès 2004, avec un déséquilibre culminant entre 2006 et 2008. Tous les secteurs d'activité sont touchés. Dans le secteur des services, par exemple, premier employeur de cadres, un tiers des besoins ne serait pas couvert en fin de décennie. Pour l'industrie, le déficit prévisible (7 000 à 13 000 cadres) pourrait représenter la moitié des besoins en fin de décennie.

Un problème déjà identifié

Dans les assurances, le problème est identifié depuis longtemps. L'âge moyen ac- tuel des salariés est de 40,4 ans et 5,19 % ont plus de 50 ans. « 37 000 salariés (sur 118 400) vont atteindre l'âge de la retraite entre 2004 et 2013, avec une accélération très forte entre 2004 et 2009. Parmi ces départs, une personne sur deux est cadre », indique Gérard Lobjeois, directeur de l'Observatoire de l'évolution des métiers de l'assurance.

Dans les banques, le phénomène est équivalent. Le rééquilibrage de la pyramide des âges devrait être l'un des objectifs de l'AFB dans les années qui viennent. En effet, alors que les 40-54 ans représentent 61 % des effectifs, les moins de 35 ans ne sont que 20 %. C'est la conséquence des recrutements massifs dans les années 1960. Les dé parts à la retraite, très nombreux entre 2005 et 2012, pourraient alors déstabiliser les établissements. « Entre 2005 et 2015, calcule Charles Normand, conseiller technique à la direction des affaires sociales de l'AFB, 5 % de nos effectifs vont partir en retraite chaque année. En moins de dix ans, nous allons nous séparer de la moitié de notre personnel. »

Bombe démographique

Tous les départs ne seront peut-être pas remplacés. Une partie pourrait être absorbée par les réductions d'effectifs attendues dans le secteur, a fortiori avec l'essor des nouvelles technologies. « Il ne s'agit pas là d'une prévision mais d'une projection », insiste Jacques Monier, destinée à alerter sur « quelque chose qui a de fortes chances de se passer si les évolutions observées ces dix dernières années se prolongent. » Le malaise est profond. Pour désamorcer cette bombe démographique, deux solutions existent : l'embauche des jeunes diplômés et la promotion interne.

Mais le recrutement des 25-30 ans ne permettra pas aux entreprises de faire face à leurs besoins de recrutement. Actuellement, le flux de jeunes diplômés sortant du système éducatif est de 160 000 bac + 4 par an, en moyenne, et les deux tiers s'orientent vers le privé. Les entreprises vont, de plus, être soumises à la "concurrence du secteur public" qui va lui aussi piocher dans ce vivier. Les promotions internes, quant à elles, restent inchangées, 460 000 postes de cadres ont été pourvus par des non-cadres sur les dix dernières années. L'Apec table sur le même rythme de croissance pour la décennie à venir.

Retarder les départs en retraite

D'autres pistes existent cependant. L'une d'elles, suivie par la Commission européenne, consisterait à retarder le départ en retraite des salariés. Dans sa stratégie pour l'emploi, définie à Stockholm, en mars dernier, les Quinze se sont, en effet, engagés à ce que la moitié des travailleurs âgés de 55 à 64 ans soient toujours en activité en 2010. Cette idée va pourtant à l'encontre des systèmes de préretraites contre embauches pratiqués actuellement par les entreprises en restructuration. Elle rencontre également l'opposition des syndicats et des employeurs.

Enfin, l'autre solution serait de faire appel à l'immigration, à l'image de l'Allemagne, qui a lancé, l'an passé, l'idée d'une Greencard pour recruter 20 000 informaticiens hors de l'Union européenne. Alors, faut-il instaurer un système avec des quotas, en fonction des besoins de l'économie ? Le problème est qu'avec un taux de chômage élevé, l'ouverture des frontières fait grincer des dents.

Sans trancher parmi ces différentes solutions, l'Apec préconise uniquement de renforcer la gestion de car- rière avec, à la clé, une meilleure identification des ressources internes et de favoriser les leviers de la promotion interne. Un chantier important pour les DRH. Mais, quoi qu'il en soit, sur ce thème-là, le débat ne fait que commencer.

Chute des recrutements en 2002

Année sombre pour le recrutement. Les embauches de cadres pourraient diminuer de 17 % au cours de cette année. Selon les premières prévisions rendues publiques, le 29 janvier dernier, par l'Apec (Association pour l'emploi des cadres), les entreprises privées ont, en effet, l'intention de réaliser quelque 150 000 embauches contre 180 000 en 2001. Toutefois, si ce ralentissement se confirme, des difficultés de recrutement n'en persisteront pas moins sur les segments de marché où offre et demande ne sont toujours pas en adéquation. En informatique, par exemple, les recruteurs ne recueillent que 8 candidatures pour une offre, alors que la moyenne des candidatures pour 2001 était de 26 pour une offre.

Globalement, l'année 2001 s'est révélée moins sombre que prévu. Les offres d'emploi, confiées à l'Apec, se sont stabilisées à un niveau qui reste élevé (121 000 offres).