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LES 35 HEURES, BANC D'ESSAI DES ACCORDS MAJORITAIRES

SANS | publié le : 15.01.2002 |

La loi Aubry II a introduit, pour la première fois, les accords majoritaires dans les négociations collectives. Si ce principe ne s'applique pour le moment qu'aux accords 35 heures, la tentation est forte de l'élargir à l'ensemble des négociations en entreprise. Un vrai bouleversement.

Il a loi du 19 janvier 2000, dite loi Aubry II, subordonne des allégements de charges sociales à la signature d'un accord 35 heures par « une ou des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés lors des dernières élections au comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel ». Selon cette même loi, un accord est aussi considéré comme majoritaire s'il est validé par une consultation des salariés. Cette disposition a eu des incidences importantes sur les quelques 18 300 négociations d'entreprise intervenues en 2000 sur le thème de la réduction du temps de travail.

Très incitative, cette loi peut faire de la recherche de la majorité syndicale un préalable pour les directions, comme cela a été le cas pour celle du Crédit Lyonnais (voir p.20). Elle donne ensuite des indications aux DRH sur ce qui constitue la légitimité d'un accord et donc sur les moyens de mieux prendre en compte les attentes du corps social de l'entreprise.

Sources de légitimité

Cependant, le principe des accords majoritaires a complexifié la notion de légitimité d'un accord. En effet, un accord 35h signé avec un syndicat minoritaire est valable, en revanche, il n'ouvre droit automatiquement au bénéfice de l'allègement de charges que s'il est approuvé par la majorité des salariés. Le choix d'une de ces voies n'est jamais anodin sur la vie de l'accord.

Trop minoritaire, l'accord a toutes les chances de voir sa mise en place contrariée. Au pire, il peut même faire l'objet d'un droit d'opposition. Même s'il n'est pas appliqué, ce droit peut agir comme un puissant repoussoir pour la direction qui, alors, est amenée à lâcher du lest.

C'est la mésaventure qu'a connue la Fnac-Paris (voir p.20). C'est pourquoi, comme le note Jean-Emmanuel Ray, professeur à Paris-I et à Science Po, « il paraît prévisible que les accords minoritaires seront à l'avenir minorés, voire dévalorisés, et les majoritaires majorés, présentés comme les seuls légitimes ». Mais le référendum, lui aussi, est d'un usage délicat car son résultat est aléatoire. Sans forcément en arriver à un référendum négatif, il peut aller à l'encontre de l'avis de la majorité des syndicats.

Guérilla juridique

La CGT, par exemple, qui considère l'accord 35 heures de Michelin comme « licite mais illégitime », est actuellement en train de mener une guérilla juridique contre la direction et la CFDT, signataire, dont l'issue pourrait être une annulation pure et simple de l'accord (voir p. 24). Le cas d'un accord signé par une majorité de syndicats mais contredit par un référendum ne semble pas s'être encore produit.

Seules les négociations sur les 35 heures sont pour le moment concernées. Cependant, si la dynamique majoritaire se poursuit (voir p. 22), ces nouvelles règles pourraient s'élargir à l'ensemble des négociations dans les entreprises.

Si cette tendance se confirmait, il en résulterait, notamment, une recomposition du paysage syndical dont l'une des conséquences pour les DRH serait de traiter avec de nouveaux partenaires, non issus des cinq confédérations, comme l'Unsa ou Sud, et qui commencent à s'implanter dans le secteur privé. Les négociations sur les 35 heures apparaîtraient alors comme une répétition générale de ce que seront les futures négociations collectives.

L'essentiel

1 La loi Aubry II introduit les accords majoritaires dans les négociations collectives. De manière incitative, un accord ouvre droit à des allègements de charges lorsque l'accord est signé par des syndicats majoritaires et/ou voté par une majorité de salariés.

2 Depuis le 19 janvier 2000, les DRH testent sur les accords 35 heures les nouvelles règles de négociation collective résultant de cette loi.

3 Le 16 juillet 2001, la "position commune" adoptée par les partenaires sociaux prévoit d'élargir les accords majoritaires à l'ensemble des négociations collectives. Le texte est ambigu et son avenir incertain, mais les accords majoritaires ont fait un grand pas en avant.