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Entre représentativité de droit et légitimité dé mocratique

SANS | publié le : 15.01.2002 |

La représentativité de droit des cinq confédérations fait depuis longtemps l'objet de vives critiques. Elle ne serait plus adaptée à la situation actuelle des entreprises et créerait un déficit démocratique préjudiciable à la contractualisation des relations sociales.

depuis 1966, les cinq confédérations (CGT, CFDT, FO, CGC et CFTC) bénéficient d'une représentativité de droit. Un accord d'entreprise, même signé par un syndicat minoritaire, engage l'ensemble des salariés.

Voulue par les pouvoirs publics pour favoriser le pluralisme syndical, cette représentativité est aujourd'hui l'objet de sévères critiques. Car, en trente ans, le syndicalisme salarié s'est effondré et, aujourd'hui, le taux d'adhésion plafonne, selon les sources, entre 6 % et 9 % . La principale critique est donc celle d'un déficit démocratique né d'un décalage entre le corps social "réel" de l'entreprise et ses représentants officiels, les syndicats.

« Il y a vingt ans, lorsqu'on négociait essentiellement des règles, facilement applicables, cette situation ne posait pas de problème. A présent, on négocie aussi, comme avec les 35 heures, les conditions de la vie quotidienne des salariés. Pour ces accords-là, la légitimité de droit n'est pas suffisante », déclare Daniel Labbé, consultant en ressources humaines.

Donnant- donnant

« Aujourd'hui, la politique contractuelle ne s'énonce plus uniquement en termes d'avantages nouveaux mais en termes de donnant-donnant, impliquant des concessions de la part des syndicats », souligne, pour sa part, Hubert Landier, consultant et rédacteur en chef de la revue Management et Conjoncture sociale, qui estime que « la légitimité ne peut plus reposer sur une prérogative prévue par la loi mais sur l'élection ».

En outre, le pluralisme syndical, voulu par les pouvoirs publics à la fin de la dernière guerre, « tient aujourd'hui à l'histoire et à des intérêts de personnes » et « n'a plus sa raison d'être », selon Daniel Labbé. Comparant la décision ministérielle de 1966 aux accords de Yalta, Denis Boissard, co-auteur de l'ouvrage La démocratie sociale en danger, estime qu'elle a contribué à « fossiliser le paysage syndical » et qu'elle « nie l'existence de plusieurs organisations apparues depuis (Groupe des Dix-Solidaires et l'Unsa) et pas moins représentatives sur le terrain que certains membres du "club des cinq" ».

Sur le chapitre des négociations collectives, Hubert Landier estime qu'elles sont rendues d'autant plus difficiles que « les syndicats étant en concurrence, ils ne veulent pas courir le risque de se trouver disqualifiés aux yeux du personnel en acceptant des remises en cause des avantages acquis. D'où des risques de surenchère dans la défense de ces avantages ».

Enfin, l'actuel système de représentativité serait à l'origine de la faiblesse des syndicats: le bénéfice d'un accord n'étant pas lié à l'adhésion à un syndicat signataire, le salarié n'a finalement aucun intérêt à prendre sa carte.

Place des partenaires sociaux

L'enjeu de la représentativité dépasse en fait largement le cadre de l'entreprise puisqu'il recouvre celui de la place des partenaires sociaux dans le paysage social français et de la répartition des rôles entre la loi et les négociations collectives. Pour que ces négociations soient légiférantes, comme le souhaitent les promoteurs de la contractualisation des relations sociales, ceux qui les mènent - y compris les organisations patronales - doivent jouir d'une représentativité à l'instar de celle des députés qui votent les lois, élus au suffrage universel.

A LIRE

- Syndicats et syndiqués en France depuis 1945, Daniel Labbé. Paris, L'Harmattan, 1996.

- Les négociations collectives en entreprise, Daniel Labbé et Bertrand Reynaud, Editions Liaisons 2001.

- L'entreprise face au nouveau radicalisme syndical, Hubert Landier et Daniel Labbé, Editions Liaisons, 2001.

- La Démocratie sociale en danger, Jean-François Amadieu et Denis Boissard, Editions Liaisons, 2001.