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Cadres japonais et français : la conduite accompagnée

SANS | publié le : 15.01.2002 |

Un an après le début de la production en série sur son site d'Onnaing, dans le Nord de la France, le groupe japonais continue de faire assimiler en douceur ses méthodes de production.

En fait, les Japonais nous ressemblent », assure François Papin, manager des départements peinture et injection plastique à l'usine Toyota d'Onnaing. Avant d'entrer chez le cons- tructeur automobile, ce technicien de 36 ans, au discours résolu mais au regard parfois teinté d'anxiété, s'imaginait des choses. « Je m'attendais à une très grande rigueur pouvant aller jusqu'à la rigidité. Dans le travail quotidien, j'ai découvert des hommes dont la première valeur est le respect de l'autre. »

Idées préconçues

Hitoshi Ugi, assis à la même table d'entretien, ne cache pas qu'il avait lui aussi quelques idées préconçues en débarquant de Nagoya à Valenciennes : « Au Japon, on dit que les Français ne sont pas très travailleurs, glisse-t-il avec un sourire. J'ai vite constaté le contraire. »

Les deux hommes ont trouvé les voies d'une coopération efficace. Ils n'avaient d'ailleurs guère d'autre choix. Une vingtaine de "coordinateurs" japonais travaillent ainsi en tandem avec les cadres français de TMMF Onnaing (Toyota Motor Manufacturing France), des vice-présidents aux chefs d'ateliers. Repérés parmi les "grosses têtes" de l'entreprise au Japon, les coordinateurs sont envoyés pour des périodes de trois ans dans les usines "d'outre-mer", où sont fabriquées plus de la moitié des voitures, pour y veiller au respect des canons du "Toyota Production System".

Surtout, ne pas les qualifier de "contrôleurs" ! « Nous ne venons pas faire de grosses piqûres de système Toyota, insiste Yoshiteru Mizutami. Il s'agit de voir avec les Français, en fonction de l'environnement, comment ce système peut s'appliquer au mieux. »

Sur la même longueur d'ondes

« Nos amis japonais ont à la fois la volonté de comprendre et d'expliquer, déclare François-Régis Cuminal, DRH de l'usine nordiste. Il faut toujours "double-checker" ou "triple-checker" pour vérifier qu'on est bien sur la même longueur d'ondes. Pour nous, Français, qui avons une na- ture impatiente, cela peut paraître long mais les décisions qui ressortent de ce processus sont fondées et couvrent jusqu'aux moindres détails. »

Le DRH aussi a son "coordinateur" qui s'appelle Hidea- ki Sakaminé : âgé de 39 ans, il a déjà derrière lui une belle carrière qui l'a mené dans les usines américaines et an- glaises du groupe. Il co-anime toutes les réunions avec son double français, et forme avec lui un "binôme".

Dans les ateliers de peinture et de fabrication de pièces en plastique, où les carrosseries des voitures Yaris prennent leurs couleurs vives, François Papin coudoie, lui aussi, les deux envoyés spéciaux de la maison-mère. Il certifie qu'il dirige seul les deux ateliers où opèrent au total 260 personnes, et parle surtout, à propos de ses coordinateurs, d'"appuis techniques", de "relais " avec les services centraux basés au Japon. « Je pense que j'ai pris mon envol, poursuit le technicien français, neuf mois après la sortie du premier véhicule des chaînes d'Onnaing. Beaucoup de choses sont en place et les ateliers tournent. Mais j'ai encore besoin du soutien des coordinateurs pour parfaire la formule du travail standardisé. »

Dans le creuset de l'usine d'Onnaing bouillonne donc un mélange particulier, un carburant dont Toyota espère qu'il tiendra la route, au-delà de l'euphorie des premiers kilomètres...

REPERES

200 formateurs japonais épaulés par 25 traducteurs. Formations de base à l'Afpa.

24 "coordinateurs", en rythme de croisière, en binôme avec des homologues français du management et de la maîtrise. Nombreuses formations dans des filiales de Toyota en Europe et au Japon.

Une usine prototype

L'usine Toyota d'Onnaing, près de Valenciennes, est un prototype. D'abord, elle a été construite en un temps record : il s'est à peine écoulé vingt-sept mois entre les premiers travaux de nivellement et le démarrage de la production, en janvier 2001. L'encadrement a été réduit : les coordinateurs sont deux fois moins nombreux à Onnaing que dans les usines britanniques de Derby et Deeside, têtes de pont de Toyota en Europe. Toutes les futures implantations du constructeur japonais à l'étranger seront calquées sur ce nouveau modèle.

L'effectif de l'usine s'élève en fin 2001 à 2 000 salariés. Le recrutement des cadres et ingénieurs a commencé en 1999, celui des opérateurs, courant 2000. Les 500 derniers Toyota members, affectés notamment à l'assemblage des moteurs, seront recrutés cette année.

La première Yaris est sortie des chaînes en janvier 2001. Depuis juillet dernier, deux équipes de travail fabriquent 400 de ces petites berlines par jour.