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Deloitte & Touche veut être un "employeur de choix

SANS | publié le : 08.01.2002 |

Le cabinet d'audit et de conseil s'est engagé dans une vaste démarche de rénovation de sa politique RH, dont les résultats vont être formalisés dans une "charte des engagements ressources humaines". Objectif : devenir un employer of choice et le faire savoir.

Une autre idée de la relation. Vous vous engagez. Nous aussi. » Au mois de septembre dernier, cette base-line, accompagnant les visages souriants de jeunes gens "bien sous tous rapports", s'étalait en pleine page dans la presse économique. Et en 4x3 sur les quais de la station de métro Pont-de-Neuilly, clin d'oeil aux 2 500 salariés qui travaillent, quelques mètres plus loin, au siège social de la filiale française du cabinet d'audit et de conseil Deloitte & Touche. Jusqu'alors, pourtant, le cabinet misait essentiellement sur les candidatures spontanées et ses relations avec les grandes écoles pour recruter. « Cette campagne ne résulte pas de difficultés de recrutement, justifie éric Piétrac, le directeur du personnel (un titre un peu revival seventies, s'amuse-t-il). Mais plutôt du contexte de guerre des talents, qui continue. De la même manière que l'industrie investit dans la R & D en période de crise, c'est maintenant que nous devons attirer les meilleurs. »

Le cabinet, qui double de taille et de chiffre d'affaires tous les trois ans, prévoit en effet de procéder à 3 500 embauches dans les trois prochaines années, dont 40 % de débutants, alors que nombre de ses concurrents cherchent plutôt à réduire la voilure. Pour cela, le cabinet a choisi de mettre l'accent sur la relation entreprise-salarié, plutôt que sur ses missions, ses clients ou ses résultats. Un succès, assure éric Piétrac : « En septembre et octobre, nous avons reçu 6 000 CV, contre 2 000 seulement sur la même période de l'année précédente. »

Rénover la politique RH

Autre originalité de cette campagne : elle n'est qu'une étape d'un projet plus vaste, entamé au mois de juin dernier, afin de rénover la politique RH du cabinet. « L'objectif avoué de Deloitte est de se servir de la communication comme outil de management et de mettre la gestion des ressources humaines au centre de sa politique de développement, estime Serge Pérez, Pdg de Mediasystem, l'agence de communication qui a conçu le dispositif. Cela n'a rien à voir avec une simple campagne de recrutement : c'est une démarche plus globale, qui vise à se servir de la satisfaction des salariés comme outil de séduction. Il s'agit véritablement d'employer branding. »

Baromètre de satisfaction interne

Du 18 juin au 3 juillet, les collaborateurs ont ainsi été invités à répondre à un baromètre de satisfaction interne, autour de six thèmes (la perception de Deloitte & Touche, l'organisation et les relations internes, l'information, les métiers et les missions, l'évolution de carrière et la reconnaissance). « Ce baromètre, réalisé en collaboration avec un prestataire externe, avait deux objectifs, explique Christine Puechbroussou, directrice des opérations de l'activité conseil, en charge, notamment, des RH. Mesurer le taux de satisfaction et les attentes des collaborateurs, mais aussi se benchmarker avec les autres membres d'une base de répondants du secteur Services high-tech. » 52 % des salariés ont répondu à l'enquête, qui a fait ressortir les points forts de l'entreprise (qualité des missions, professionnalisme des équipes, rayonnement international ou encore relations de travail), mais aussi des "axes de progrès" : une meilleure prise en compte de l'équilibre vie privée/vie professionnelle et une meilleure communication sur la gestion des ressources humaines.

L'étape suivante a donc été l'organisation, de fin octobre à fin novembre, de groupes de travail, auxquels ont participé 130 collaborateurs. Ils avaient pour mission de faire des propositions dans sept domaines : l'intégration des nouveaux embauchés, le développement d'une relation client/fournisseur entre les activités, les services extra-professionnels aux salariés, la formation, l'organisation du temps de travail et l'action citoyenne.

Par ailleurs, la direction a d'ores et déjà fait évoluer son régime de prévoyance, en instaurant des garanties optionnelles, le maintien du salaire net pour les collaboratrices en congé maternité comptant douze mois d'ancienneté et un service "SOS nounou".

Démarche révolutionnaire

« La démarche est révolutionnaire, assure ève Rio-Dreyfuss, manager marketing à la direction générale, entrée chez Deloitte voilà quatre ans. Ce baromètre a été vécu par les équipes comme un signe très fort. Nous souffrions énormément du manque de gestion des ressources humaines. Là, nous avons senti une réelle implication de la direction générale, et un dialogue qui s'instaurait. » Car, si la DRH reste évasive sur les raisons qui expliquent, en tout premier lieu, la mise en place d'une telle démarche d'écoute des collaborateurs (« Le timing était bon, avance éric Piétrac, nous avions achevé un certain nombre de chantiers, comme le passage à l'euro et aux 35 heures, il y avait eu des tensions sur le marché de l'emploi, et une prise de conscience interne des changements de mentalité chez les jeunes diplômés... »), il semble que l'arrivée d'une nouvelle équipe de direction, en septembre 2000, ait été décisive. Le nouveau président, Philippe Vassor, ancien responsable des ressources humaines de l'activité audit, est crédité par ses troupes d'une "forte sensibilité RH" ; un "point faible" de l'entreprise jusque-là. Par ailleurs, au printemps dernier, s'était exprimé un fort malaise parmi les troupes de l'activité conseil, face au départ d'un directeur et de nombreux consultants. Des soubresauts qui avaient débouché sur l'arrivée, en juin 2001, du nouveau responsable de Deloitte Consulting, Joël Garlot. La direction a donc choisi la fête de Noël du cabinet, le 14 décembre dernier, pour tourner la page.

à cette occasion, en effet, ont été présentés les plans d'actions issus de la réflexion des groupes de travail. La mise en place d'un e-campus, d'un intranet formation, de services extra-professionnels renforcés et de contrats de partenariat entre les services supports et leurs clients internes, ainsi qu'une information accrue sur les possibilités de travail à temps choisi, ont ainsi été annoncés.

DELOITTE & TOUCHE FRANCE

- Date de création : 1981, sous le nom de BDA (membre du réseau Touche Ross International). Devient Deloitte & Touche en 1990.

- Effectifs : 3 500 collaborateurs, dont 180 associés.

- Chiffre d'affaires 2001 : 437 millions d'euros (+23,6 % par rapport à 2000).

-Activités : Audit/Entreprise risk services (42 % du CA), Conseil (24,5 %), Expertise comptable (16,5 %), Juridique et fiscal (10 %), Corporate finance (7 %), Human capital (activité nouvelle).

L'essentiel

1 Deloitte & Touche France mise sur le recrutement de 3 500 personnes, soit un doublement de l'effectif, d'ici à 2003.

2 Dans un contexte de guerre des talents qui se poursuit, l'entreprise a décidé de renforcer, et de mieux valoriser, sa politique RH.

3 Un baromètre de satisfaction interne a débouché sur une campagne d'image, ainsi que sur un plan d'actions RH.

Une charte des engagements RH

L'un des objectifs de la démarche "Une autre idée de la relation" est la rédaction d'une charte ressources humaines qui formalise la relation nouvelle, plus personnalisée, que souhaite instaurer Deloitte. Ce document sera joint au contrat de travail de tous les nouveaux embauchés.

« Le nom de l'opération n'a pas été donné par hasard, souligne Christine Puechbroussou, directrice des opérations de l'activité conseil : les attentes des jeunes générations ont changé. Il s'agit de dire à nos collaborateurs et à nos futures recrues : oui, nous vous avons entendus. Mais aussi de montrer que nous avons nos points forts, révélés par le baromètre. Cette charte, je la signerai sans problème, car je sais qu'elle reposera sur du réel, et pas seulement sur des mots. » Ces "engagements RH" fourniront également la base d'une nouvelle campagne de communication : «Nous en- trerons alors dans la phase dite de "preuve", explique Serge Pérez, Pdg de Mediasystem.

Enfin, la portée de la charte sera mesurée en juin prochain, à l'occasion d'une nouvelle édition du baromètre, appelé à devenir annuel.

Projets pour une entreprise éthique

L'un des groupes de travail impliquant les salariés avait pour thème l'entreprise citoyenne.

Parmi les sept task forces composées de collaborateurs (« essentiellement des managers et des associés », d'après l'une des participantes), l'une d'entre elles a étudié la piste de la responsabilité sociale. Chaque groupe devait examiner ce qui existait déjà au sein de l'entreprise, faire des propositions, puis les budgeter. « Nous avons d'abord essayé de cerner ce que recouvrait le terme d'entreprise citoyenne, interrogé un consultant spécialiste du développement durable et réalisé un mini-sondage sur l'intranet pour connaître les thématiques sur lesquelles souhaitent s'impliquer les salariés », raconte Tatiana Zeller, avocate senior manager. Le groupe a ainsi émis toute une série d'actions visant à l'amélioration, au quotidien, de l'environnement (recyclage du papier, éclairage basse tension...), mais aussi à l'embauche d'un professionnel pour aider l'entreprise à mettre en oeuvre des projets dans le domaine de l'éducation et de l'enfance. "L'entreprise éthique" fait également partie des nouvelles offres auxquelles réfléchit actuellement le cabinet, qui se propose, par exemple, d'aider ses clients à certifier leurs fournisseurs selon les critères du socialement responsable ou à mieux comptabiliser les démarches en faveur de l'environnement.