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Bonnes pratiques

Services aux salariés : Patagonia fidélise en gardant les enfants

Bonnes pratiques | publié le : 01.07.2023 | Caroline Crosdale

Le fabricant de vêtements outdoor propose aux salariés du siège, en Californie, une garderie d’enfants depuis plusieurs années. Une offre pionnière jugée essentielle aujourd’hui – au moment où les employeurs cherchent à faire revenir leurs troupes au bureau.

« Ce n’est pas seulement gagner sa vie, c’est vivre », selon Bryn Pitterle, experte en développement de produits chez Patagonia. La jeune mère et son enfant sont les vedettes d’une vidéo du groupe, mise en valeur sur le site du fabricant de vêtements outdoor. Les deux jouent dans un bac à sable, au centre Great Pacific Child Development, installé au siège de Patagonia, à Ventura, en Californie.

La direction du groupe soutient fermement le principe de la garderie d’enfants pour ses employés depuis le début des années 1980. Le service a commencé très modestement en 1983 dans une caravane, au QG. Puis, il a migré dans son propre centre éducatif : un site de 3 700 m2 aujourd’hui. Il a fait des émules au centre de distribution de Reno dans le Nevada, qui a ouvert sa garderie en 2017. Et pour les autres employés de Patagonia, éloignés de ces deux sites, une aide annuelle de plus de 23 000 dollars (plus de 21 000 euros) a été mise en place.

La garde d’enfants de Ventura, à l’ouest de Los Angeles, accueille 133 jeunes. Quelque 56 éducateurs les supervisent dans de petites classes bilingues d’une quinzaine d’élèves. Et les parents sont les bienvenus tout au long de la journée. Les jeunes mères peuvent aussi venir allaiter leurs bébés. D’autres prennent leur déjeuner avec leurs enfants. Et l’on vient régulièrement passer quelques minutes avec sa progéniture, juste pour le plaisir.

Cette politique familiale bien rodée, qui existe depuis 40 ans chez Patagonia, occupe depuis peu la une des journaux américains. Car c’est un moyen très efficace de fidéliser des collaborateurs tentés par une éventuelle démission. Et cela les incite aussi à revenir au bureau. Les employeurs ayant désormais dépassé le pire de l’épidémie, ils aimeraient voir leurs troupes de retour sur site. Mais les salariés, qui ont découvert les joies du travail à distance, résistent à l’appel. Pas les parents de Patagonia.

Des parents fidèles

Sheryl Shushan, directrice des services familiaux de la société, note ainsi que l’accord passé avec les employés du siège est de trois jours minimum de travail au bureau par semaine. Mais les parents désireux de déposer leur progéniture au Centre Great Pacific sont plus assidus. Ils y sont cinq jours sur sept… Et ils se révèlent beaucoup moins enclins à changer d’employeur. Les statistiques de Patagonia montrent ainsi qu’ils sont 25 % moins partants que les autres.

Patagonia dépense plus d’un million de dollars par an en garderie. Et le groupe a mis en place un dispositif pro parents beaucoup plus généreux que ce que les autres entreprises proposent. Selon le Bureau of Labor Statistics, seulement 11 % des entreprises offrent une assistance pour garder les enfants. Et tout juste 24 % des organisations du privé pratiquent les congés payés pour les nouveaux parents…

Chez Patagonia, ces congés sont de trois mois. Et si l’on en croit Rose Marcario, ancienne directrice générale de Patagonia, tout comme son successeur Ryan Gellert, cette politique familiale se révèle efficace.

Un bon retour sur investissement

Le prix en est élevé, mais in fine, pas si coûteux. Car l’État américain permet une déduction fiscale pour ce type de dépenses. En outre, l’entreprise fidélise sa main-d’œuvre. Le coût de remplacement d’un employé de base est estimé à 35 % de son salaire annuel, rappelle-t-on chez Patagonia. Si l’on regarde du côté des managers, recrutement et formation engloutissent 125 % du salaire annuel. Et encore plus haut, au niveau de la direction, il faut alors compter deux ans de fiches de paie… Grâce à sa garderie, le taux de rotation annuel des personnels du siège se limite à 8 %, alors que le niveau national est de 11,6 %.

Autre avantage : la rétention des femmes. Une étude réalisée par l’agence de développement de la ville de New York souligne qu’après la naissance d’un enfant, 52 % des Américaines réduisent leurs heures de travail pour s’occuper de leur progéniture. Et la moitié quittent leur poste pendant une moyenne de deux ans. Chez Patagonia, 95 % des mères reviennent au bureau dès la fin de leurs congés maternité. Jonathan Carmona, le responsable maison pour la justice, l’équité et l’inclusion, peut se flatter de la féminisation des troupes : 53 % des effectifs sont féminins et 46 % des postes de cadres supérieurs sont tenus par des femmes. Une vidéo de Patagonia sur Internet résume le dilemme habituel des cadres au féminin. « Quand notre carrière commence à décoller, c’est à ce moment-là que l’on voudrait fonder une famille, regrette Lisa Pike Sheehy, vice-présidente pour l’activisme environnemental. Chez Patagonia, les deux sont possibles ! »

Auteur

  • Caroline Crosdale